Photo : toit de la maison de la famille Salhiyeh le 17 janvier 2022. Crédit : Activestills
Un Palestinien dont la famille risque d’être déplacée de force par la police israélienne de sa maison dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est, a menacé de faire exploser des bombonnes de gaz plutôt que d’être expulsé.
Des dizaines de policiers en tenue anti-émeute ont encerclé la propriété tôt lundi, au cours d’une confrontation qui a duré plusieurs heures. Les routes ont été bouclées autour de la zone, à environ un kilomètre au nord des murs de la vieille ville de Jérusalem - le site de fréquentes protestations de résidents palestiniens confrontés à une expulsion imminente de leurs maisons.
"Je vais brûler la maison et tout ce qu’elle contient", a déclaré Mahmoud Salhiyeh alors qu’il se tenait sur le toit du bâtiment, entouré de bonbonnes de gaz. "Je ne partirai pas d’ici, ou seulement pour aller dans ma tombe, parce qu’il n’y a pas de vie, pas de dignité."
"Je suis en lutte avec eux depuis 25 ans, ils m’ont envoyé des colons qui ont proposé d’acheter la maison et je n’ai pas accepté."
Alors que l’après-midi avançait, les forces israéliennes appuyées par des bulldozers et des unités spéciales ont démoli une pépinière de plantes appartenant à la famille. Au moins deux Palestiniens ont été arrêtés alors que les soldats israéliens ont attaqué les personnes qui s’étaient rassemblées autour de la maison en solidarité avec la famille Salhiyeh.
La famille Salhiyeh lutte contre son déplacement forcé pour la deuxième fois. Avant de s’installer à Sheikh Jarrah, la famille avait été déplacée de force du village d’Ein Karem à Jérusalem-Ouest en 1948.
La famille a déclaré avoir acheté la propriété de Sheikh Jarrah avant 1967, date à laquelle Israël a occupé Jérusalem-Est, tandis que l’État a fait valoir devant les tribunaux que la famille n’avait aucun droit sur cette propriété. La municipalité de Jérusalem a officiellement saisi la propriété en 2017 dans le but de construire une école pour personnes à besoins spéciaux, ce que Salhiyeh a décrit comme un "prétexte d’intérêt public."
Un tribunal de Jérusalem a statué l’année dernière en faveur de la ville et a autorisé l’expulsion forcée. La famille a fait appel et attend une décision, mais le juge n’a pas gelé l’ordre d’expulsion.
La mairie et la police ont publié une déclaration commune indiquant que le tribunal a ordonné à la famille de quitter la propriété il y a un an. La municipalité a déclaré que la propriété doit être utilisée pour construire l’école, qui doit servir aux enfants palestiniens du quartier.
Le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Omer Bar-Lev, a déclaré qu’un tribunal avait jugé qu’il s’agissait d’un squat illégal.
"Vous ne pouvez pas exiger à la fois que la municipalité prenne des mesures pour le bien-être des résidents arabes et vous opposer à la construction d’établissements scolaires pour leur bien-être", a écrit Bar-Lev sur Twitter.
Cependant, le groupe israélien de défense des droits de l’Homme Ir Amim - qui suit l’évolution de la situation à Jérusalem - a déclaré qu’au cours des dernières années, la ville avait renoncé à un autre terrain à Sheikh Jarrah, initialement destiné à une école palestinienne, pour autoriser la construction d’un séminaire pour hommes ultra-orthodoxes.
"La municipalité semble considérer qu’il est raisonnable et approprié de déposséder une famille palestinienne au profit d’une école plutôt que d’utiliser un terrain libre initialement prévu à cet effet", ajoute le rapport.
Quartier arboré de maisons en grès, de consulats étrangers et d’hôtels de luxe, Sheikh Jarrah est devenu l’emblème de ce que les Palestiniens considèrent comme une campagne israélienne visant à les déloger de Jérusalem-Est.
Alors que les habitants et les militants de Sheikh Jarrah suivaient la situation depuis les toits voisins, le consulat britannique de Jérusalem-Est, situé en face de la maison, a indiqué sur Twitter que la Consule générale, Diane Corner, s’était jointe à d’autres diplomates pour "témoigner de l’expulsion en cours."
Le consulat a déclaré que de telles expulsions en territoire occupé, sauf dans les circonstances les plus exceptionnelles, étaient contraires au droit humanitaire international. Il a exhorté le gouvernement israélien à "cesser ces pratiques qui ne font qu’accroître les tensions sur le terrain."
Israël a occupé Jérusalem-Est, ainsi que la Cisjordanie et la bande de Gaza, lors de la guerre de 1967. Il a ensuite annexé la moitié orientale de la ville - où vit la majeure partie de la population palestinienne de Jérusalem - dans un geste non reconnu par la plupart de la communauté internationale.
Traduction AFPS