Selon un communiqué du cabinet israélien de sécurité, l’armée pourra « accroître ses opérations afin de réduire les tirs de roquettes et porter des coups aux infrastructures des terroristes responsables de ces tirs ».
Ces opérations « se concentreront, à ce stade, contre le Hamas et le Jihad islamique, responsables de l’escalade » de la violence, et « des mesures plus drastiques » seront le cas échéant prises ultérieurement. « Il n’y a pas de solution miracle aux tirs de roquettes. Chaque solution est complexe et peut avoir des conséquences multiples, et c’est pourquoi nous optons pour (une riposte) graduée », a déclaré le Premier ministre Ehud Olmert.
Un haut responsable israélien a précisé que son pays écartait l’option d’une opération terrestre d’envergure à Gaza et privilégiait pour l’heure « des raids aériens et des opérations ciblées contre les chefs militaires des groupes terroristes et les activistes qui tirent des roquettes ».
En soirée, sept membres de la famille de Khalil al-Haya, un chef du Hamas et un membre du Parlement palestinien, et l’un de ses voisins ont été tués dans un raid aérien à Gaza, qui a aussi fait au moins douze blessés, selon une source médicale palestinienne.
Avant l’aube, l’aviation israélienne avait attaqué deux maisons servant d’ateliers de production de roquettes et d’entrepôts d’armes, selon l’armée. Puis, trois membres des Brigades Ezzedine el-Qassam, bras armé du Hamas, ont été tués lors d’un raid contre leur véhicule, a-t-on appris auprès de ce groupe et de source médicale. Depuis mercredi, 31 Palestiniens ont péri dans 22 raids de l’aviation israélienne.
Malgré cette riposte [1],la plus vaste et la plus meurtrière depuis la signature d’une trêve entre Israéliens et Palestiniens fin novembre, les roquettes ont continué de pleuvoir sur le sud d’Israël. Dix de ces engins ont été tirés dans la journée, et deux autres en soirée, sans faire de blessés. Depuis le 16 mai, pas moins de 116 roquettes se sont écrasées en Israël, dont 49 à Sdérot, faisant 16 blessés, selon la police.
Israël a également décrété hier « l’état d’exception » dans les villes limitrophes de la bande de Gaza et transféré à l’armée tous les pouvoirs civils, de police notamment, selon le ministère de la Défense.
La ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, a suggéré qu’une force internationale se déploie entre la frontière égyptienne et la bande de Gaza. Selon son bureau, elle rencontrera aujourd’hui à Sdérot (Sud) le haut représentant de l’Union européenne pour la Politique extérieure, Javier Solana.
De grandes quantités d’armes et d’explosifs sont passées en contrebande d’Égypte vers Gaza au moyen de tunnels, notamment au profit du Hamas, selon les services de sécurité israéliens. « Nous sommes particulièrement inquiets de l’importation de missiles sol-air, d’explosifs, et de l’arrivée de terroristes entraînés par l’Iran et le Hezbollah », a déclaré à l’AFP le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Mark Regev.
Le secteur dans lequel un déploiement d’une force internationale est envisagé est l’axe Philadelphie, une zone tampon d’une douzaine de kilomètres entre l’Égypte et la bande de Gaza, qu’Israël contrôlait jusqu’à son retrait unilatéral de ce territoire en août 2005. Début septembre 2005, l’Égypte avait déployé 750 gardes-frontières pour surveiller sa frontière avec Gaza et empêcher la contrebande d’armes, aux termes d’un accord en ce sens signé avec Israël.
La Maison-Blanche a appelé Israël à la retenue, mais a affirmé la nécessité que le Hamas cesse ses tirs de roquettes contre l’État hébreu, selon un porte-parole. Le pape a exhorté de son côté la communauté internationale « à multiplier les engagements en faveur d’une relance des négociations », et appelé les Palestiniens au « sens de la responsabilité » et Israël à la « modération ».
Le cessez-le-feu, un « moment de répit » à Gaza avant la prochaine bataille [2]
Gaza reprend peu à peu vie après neuf jours de combats sanglants. Les échoppes rouvrent, les enfants regagnent l’école, la circulation chaotique est presque de retour. Mais les habitants, qui ont vu plus d’un cessez-le-feu s’effondrer, perçoivent le dernier comme un simple « répit ».
De nombreux Palestiniens de Gaza profitent du calme pour faire des provisions de peur d’être à nouveau coincés chez eux par de nouveaux affrontements. D’autres se rendent pour la première fois à leur travail ou rendent visite à leur famille. « Cette trêve n’est qu’un moment de répit que se donnent les deux camps, et les combats peuvent reprendre à nouveau car il n’y a pas de solutions concrètes », estime Adnane Khouroubi, un médecin, en chemin vers son cabinet. Samedi, le Hamas et le Fateh ont signé un accord de cessez-le-feu, le cinquième depuis le début des violences partisanes le 11 mai dans la bande de Gaza, qui ont fait 50 morts, pour la plupart des membres des services de sécurité loyaux à M. Abbas et six civils. « Les deux camps ne se font pas confiance et diffèrent dans leur programme politique », dit le médecin.
Dans la rue, les employés des services municipaux ont repris la collecte des ordures qui s’entassaient sur les trottoirs depuis plus d’une semaine. Les blocs de ciment qui bloquaient de nombreuses rues sont enlevés. Signes des féroces combats qui se sont déroulés, les façades dans le quartier Rimal et celui de Tal el-Hawa sont criblées de balles et noircies par les impacts de roquettes antichars.
Saadeddine al-Charfa, 35 ans, inspecte l’immeuble où il vit, la tour « Nour », à Tal el-Hawa. Pendant plusieurs jours, des hommes armés ont occupé les derniers étages et le toit, forçant les résidents à quitter leurs appartements. Au cours des dernières vagues d’affrontements, cet immeuble et de nombreux autres dans le secteur ont servi de position aux tireurs embusqués, comme les ministères tout proches. « Je ne crois pas dans cette trêve car personne n’est honnête, dit Saadeddine. Les combats éclateront sûrement de nouveau. Les deux camps ne sont pas sérieux. Ils se battent pour des sièges et des postes. Au bout du compte, les seuls à pâtir de ces combats sont les civils. » « La première fois, je suis devenu un réfugié à cause des Israéliens. Aujourd’hui, je suis à nouveau un réfugié, expulsé de chez moi à cause des combats entre Palestiniens », peste l’homme.
Les combattants des deux mouvements ne croient pas non plus à cette nouvelle trêve, la première à avoir connu toutefois un début d’application sur le terrain depuis le début des combats. « Ce n’est qu’un cessez-le-feu sur le papier. Tout le monde se prépare à la prochaine bataille qui peut éclater d’un moment à l’autre », prédit sans illusion Chadi, un combattant de 28 ans des Brigades des martyrs d’al-Aqsa, également policier au sein des forces loyales au président Abbas. « Ceux du Hamas sont des menteurs, ils ne respectent aucun accord », lance-t-il. Des accusations reprises par l’autre camp.
Une chose est sûre, jamais les affrontements n’ont été aussi féroces entre les deux camps. « C’est la première fois que je vois une violence pareille dans les combats. Tout le monde est prêt à aller jusqu’au bout », lâche Chadi.