Une bataille juridique est déjà en cours pour arrêter les démolitions des 88 maisons qui forment tout le quartier de la vallée d’Al Bustan à Silwan, juste en-dessous des murs de la vieille ville. La municipalité de Jérusalem dit qu’elle veut transformer ce quartier en parc national à cause de l’importance biblique et archéologique du site.
Des militants de droits humains et des avocats disent que cette démarche est une escalade dans la tentative pour réduire la population arabe de Jérusalem Est que les Palestiniens veulent comme capitale du futur état palestinien et pour renforcer le réseau de colonies juives à cet endroit.
Le parc planifié par la municipalité sur ce qui était principalement une terre ouverte jusqu’en 1960, aiderait a connecter plusieurs enclaves juives à Silwan à celles près de la cité du Roi David où les militants soutiennent que 55% de la population autrefois entièrement arabe est aujourd’hui juive.
Alors que la ville prétend que la plupart des maisons dans la zone ont été construites sans permis, elle a émis des ordres de démolition sous la loi 212, mesure cadre d’avant la guerre des six jours, mais rarement utilisée jusqu’à présent et qui permet à l’état de démolir des bâtiments érigés légalement ou non.
Cette mesure a servi pour démolir des maisons arabes construites dans le quartier juif de la vieille ville une ou deux années après sa prise en 1967.
Mohammed Badran, 43 ans, qui vit dans une des plus anciennes maisons du quartier, construite en 1961, et qui a reçu un des dix premiers ordres spécifiques de démolition, a dit hier qu’il était sûr que son père avait reçu un permis de construire de la Jordanie qui contrôlait à l’époque Jérusalem Est. Malgré le fait qu’il n’avait plus le permis, il a produit un acte notarié frappé du cachet britannique montrant que son arrière grand-mère avait pris possession légalement du terrain en 1920.
M. Badran dit qu’il avait travaillé pour la municipalité de Jérusalem pendant 20 ans en tant qu’éboueur. « Voilà les remerciements que je reçois...je n’ai nulle part où aller. Si ma maison est illégale alors pourquoi ai-je payé des taxes d’habitation pendant toutes ces années ? « M. Badran dit que l’argent nécessaire pour acheter un ordinateur et payer le traitement médical pour son fils aveugle servira maintenant à payer les honoraires de son avocat.
La municipalité nie que les motifs des démolitions prévues soient politiques. Uri Shetreet, ingénieur de la ville, a dit qu’il voulait agrandir un petit site archéologique et il a écrit au mois de novembre au département de construction de la ville en décrivant la découverte de fragments remontant à 5.000 ans comme étant « d’importance nationale et internationale ». Il a dit, en utilisant le nom juif du district : « J’ordonne la suppression de toutes les constructions illégales dans la Vallée des Rois ».
Mais Meir Margalit, du Comité Israélien contre les Démolitions de Maisons (ICADH), rétorque : « Tout est politique à Jérusalem. Je ne pense pas que ce projet dangereux provienne de la municipalité mais plutôt du bureau du premier ministre. » Il pense que cela fait partie d’un accord passé entre Sharon et les organisations de colons juifs en échange de leur retrait de la Bande de Gaza ; Sharon renforcerait les colonies en Cisjordanie et à Jérusalem ce qui ferait parti d’un effort systématique pour miner tout espoir d’un accord de paix dans lequel les Palestiniens insisteraient pour inclure Jérusalem Est en tant que leur capitale.
M. Margalit a ajouté que le gouvernement voulait que les démolitions se fassent au moment précis où les yeux du monde seraient rivés sur le retrait de Gaza.
Sami Ershid, l’avocat qui représente M. Badran et cinq autres habitants d’Al Bustan, dit qu’il pense que ce plan équivaut à un « transfert de population » d’arabes de la vallée. « C’est étrange qu’après 35 années, M. Shetreet ait soudain découvert que cet endroit était d’une grande importance religieuse et historique ».