Ce n’est cependant pas une coïncidence - il ne s’agit pas d’une anomalie accidentelle si les palestiniens s’opposent constamment entre eux. C’est le résultat de mauvaises décisions, de politiques internes encore pires et d’un manque malheureux de perception de la part de nos dirigeants.
Nous ne sommes donc pas surpris, bien que terriblement attristés, par les conflits survenus récemment à l’ Université An Najah à Naplouse, le 24 juillet. Les médias ont fait état de 16 blessés pendant les affrontements qui ont éclaté entre les groupes d’étudiants affiliés au Hamas et au Fatah. Il y a maintenant un jeune homme décérébré dans un hôpital de Naplouse, à la suite d’une blessure par balle à la tête.
L’incident, comme tant d’autres ces jours deniers, s’est enflammé au cours de disputes des factions rivales. Une scène similaire avait éclaté au début du mois à l’université Birzeit au nord de Ramallah et l’administration s’est vue contrainte de fermer l’université pendant quelques jours pour éviter des conflits supplémentaires entre les deux forces, après que plusieurs étudiants eurent été blessés au cours des affrontements Hamas-Fatah.
A An Najah, les récits des événements sont contradictoires en fonction du rapporteur. Il y a cependant quelques points indiscutables qui prouvent qu’aucune des factions ne cherchait une solution pacifique.
Selon la version officielle de l’université, des étudiants du bloc islamiste ont défié les ordres qui interdisaient toute activité politique sur le campus, en raison de la situation explosive créée par les événements de Gaza le mois dernier. Il semble que le bloc islamiste affilié au Hamas ait fait un discours et distribué des tracts concernant trois de leurs membres, arrêtés par les forces israéliennes la nuit précédente.
Cela a provoqué l’ire des étudiants affiliés au Fatah qui auraient attaqué ceux du bloc islamiste pour empêcher le discours et la distribution des tracts. Des cris, injures et coups de poing ont été suivis d’affrontements armés avec, pour conséquence, plusieurs étudiants blessés.
Pire encore, quelques douzaines d’étudiantes du groupe islamiste ont occupé le campus en demandant la libération de ceux qui avaient été arrêtés par les forces de sécurité du Fatah. Au milieu de la confusion, le bâtiment du conseil étudiant a été incendié - ostensiblement par les étudiantes protestataires - entraînant des dommages considérables.
Dans une tentative de négociation pour maîtriser une situation déjà incontrôlable, l’université a suspendu les cours pour le restant de la journée et a également fermé ses portes mercredi, en attendant le résultat d’une investigation sur les affrontements.
Alors qu’on espère toujours que le peuple, le citoyen lambda, sera au-dessus des classes dirigeantes avides de pouvoir, ceci n’est toujours pas le cas. Les palestiniens ont ainsi montré qu’ils ne sont pas une exception.
Depuis que les affrontements sont devenus une bataille rangée entre forces fidèles au Hamas et au Fatah, conduisant à une prise en main du Hamas sur la Bande de Gaza, le flux d’accusations mutuelles ne tarit pas. La violence des charges proférées par les dirigeants des deux mouvements continue d’augmenter, et atteint un niveau équivalent à des accusations de trahison.
L’agitation qui bouillonne et le mépris mutuel de l’ « autre » se sont répandus dans la rue. Comment peuvent nos dirigeants s’attendre à ce que le peuple, avide d’une orientation cohérente, adhère à l’idée d’unité nationale alors qu’en pratique ils font tout pour miner l’idée même d’unité ?
Les incidents récents des universités Birzeit et Al Najah devraient être un avertissement sérieux pour les dirigeants des deux organisations, à Gaza et en Cisjordanie. Pendant que le nouveau gouvernement formé en Cisjordanie par le président Abbas se satisfait de sa reconnaissance internationale nouvellement acquise, il ne peut pas s’attendre à être crédible aux yeux du peuple tant qu’il se détourne de la bande de Gaza.
La main-mise du Hamas sur la bande de Gaza a pu apparaître comme une victoire lorsqu’ils ont clamé leur contrôle, mais, à l’inverse, leur légitimité proclamée sur les résidents les conduira à une impasse politique et économique. La communauté internationale n’est certes pas prête à négocier avec le Hamas, ce qui signifie non seulement ostracisme mais aussi étranglement économique. Si les dirigeants du Hamas persistent dans leur position rigide concernant leur prétention au trône du gouvernement palestinien, ils risquent de prêcher devant les derniers irréductibles qu’ils ont réussi à rallier à leur cause, mais abandonnés du reste de la population.
Le gouvernement Abbas ne devrait pas compter sur un futur meilleur s’il continue d’éviter le Hamas. Le succès de ce gouvernement, reconnu internationalement et même légitimé par Israël ne signifiera rien s’il ne bénéficie pas de la même légitimité auprès de son propre peuple.
Si les dirigeants veulent obtenir ce qu’ils prétendent rechercher - c’est à dire la création d’un état palestinien sur notre sol national - ils devront changer leurs méthodes et leurs priorités. L’unité nationale doit être la priorité majeure car sans elle nous ne sommes que des forces rivales sans autre but que de discréditer celle d’en face.
Les incidents malheureux des universités palestiniennes, qui jusqu’à présent étaient un havre pour l’éducation, la culture et la civilisation, illustrent clairement le chemin que nos dirigeants ont choisi. Pire encore, ces affrontements sembleront dérisoires en comparaison à ce qui nous attend si nos dirigeants n’entendent pas raison et n’arrêtent cette guerre des mots, aux effets improductifs. Nos dirigeants ont toujours été conscients de la politique de division et conquête d’Israël et ils ont souvent prévenu des dangers d’une telle approche. Nous y sommes cependant, en train de nous déchirer à la gorge et de jouer le jeu d’Israël.
Pendant 60 ans, Israël et son occupation militaire n’ont pas réussi à anéantir notre identité ni notre cause nationale. Il semble incompréhensible que nous permettions à nos propres dirigeants de réduire le rêve palestinien à un simple point sur l’écran de l’histoire, seulement parce qu’ils n’ont pas su adopter la diversité qui a fait par le passé l’originalité de la société palestinienne.