Le blocus de Gaza a été soigneusement calculé par les autorités israéliennes pour éviter de déclencher une « crise humanitaire ». Selon un document interne rendu public pour la première fois par le quotidien Haaretz, des experts auraient été chargés d’évaluer une ration calorique minimale.
En se basant sur la consommation moyenne de la population israélienne, et ajustant ces chiffres en fonction de la « culture et l’expérience » spécifique à Gaza, ces experts ont fixé le minimum à 2279 calories par jour et par personne. À partir de cette estimation, les autorités israéliennes ont pu calculer la quantité de nourriture nécessaire et le nombre de camions autorisés à entrer chaque jour dans Gaza. Le résultat de ce calcul a été réduit pour prendre en compte la nourriture produite dans le Territoire palestinien ainsi que les « spécificités » locales, avant d’aboutir d’après le rapport à environ 131 camions par jour.
Mais, selon l’organisation de défense des Palestiniens, Gisha, qui a obtenu une copie du document au terme d’une longue bataille juridique contre une administration réticente à le publier, le nombre moyen de camions effectivement entrés dans Gaza a souvent été inférieur à ce chiffre.
Pénuries arbitraires et inexplicables
L’administration israélienne a expliqué que le document n’était qu’une simple étude interne, n’avait jamais été appliqué, et n’avait en aucune façon guidé la politique israélienne à Gaza. D’après l’administration israélienne, un système d’alerte aurait été mis en place au début du blocus pour signaler d’éventuelles pénuries avant qu’elles ne deviennent critiques.
Pour les responsables de l’agence des Nations unies pour les réfugiés, qui subvient d’une façon ou d’une autre aux besoins des deux tiers de la population de Gaza, ce rapport envisageant de limiter les importations de nourriture représente une politique contraire à tous les principes humanitaires.
Ce document vient cependant éclairer pour la première fois, en partie, les mécanismes du blocus israélien de Gaza, en vigueur depuis 2007. Les listes de produits interdits par Israël, qui contrôle l’essentiel de l’approvisionnement du Territoire palestinien, n’ont jamais été publiées, changeant parfois sans explications, et sans toujours beaucoup de logique. À une certaine période, le café soluble était par exemple interdit d’importation, ainsi que la confiture. Les pénuries ainsi créées avaient un caractère arbitraire et inexplicable. Mais les tunnels creusés sous la frontière égyptienne au début du blocus, et qui sont depuis devenus une industrie florissante, ont depuis longtemps permis à Gaza de se procurer tous les biens interdits d’importation par Israël.