Alors que le monde célèbre les courageux travailleurs de la santé qui s’attaquent à la pandémie mondiale de coronavirus, un nouveau rapport souligne l’impunité chronique des attaques contre les travailleurs de la santé palestiniens qui les maintient dans la ligne de mire.
En 2015, le Centre pour les Droits de l’homme Al Mezan, Medical Aid for Palestinians (MAP) et Lawyers for Palestinian Human Rights (LPHR) avaient déjà publié un rapport documentant de graves attaques menées contre le personnel de santé et ses équipements pendant l’offensive menée contre Gaza l’année précédente. Ces associations appelaient à la fin de l’impunité pour de telles violations des droits de l’homme et du droit international.
Pourtant, six ans plus tard, aucune charge, aucune poursuite ni aucune accusation n’ont été retenues ou prononcées contre quiconque.
Dans un nouveau rapport publié le 30 mars, ces mêmes organisations actualisent les six cas emblématiques qui constituaient leur travail de 2014 et montrent comment les enquêtes militaires israéliennes ont toutes échoué à reconnaître une quelconque responsabilité dans ces actes et à rendre justice aux victimes. Cet important travail qui documente la persistance des attaques sur les personnels de santé renforce les inquiétudes de longue date sur la partialité des enquêtes menée par l’armée israélienne.
Publié deux ans après le début des manifestations à Gaza pour la "Grande Marche pour le Retour" le 30 mars 2018, ce nouveau rapport démontre une fois de plus que les avertissements concernant cette impunité systémique sont restés lettre morte pour la communauté internationale, avec des conséquences mortelles prévisibles. Au moins trois membres du personnel soignant ont été tués et 800 ont été blessés par les forces israéliennes dans un contexte de déchaînement de violence toujours plus systématique contre des manifestants civils. Pendant cette période, 112 ambulances et 7 équipements de santé ont été endommagés.
Le rapport relate les histoires de ces personnels soignants tués à Gaza et replace ces morts dans un contexte politique plus large, de violation du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et d’agressions graves contre le système de soins palestinien, en particulier dues au blocus illégal de Gaza par Israël depuis 13 ans.
Des enquêtes fiables et impartiales sur ces allégations de violation des droits de l’homme et du droit humanitaire - qui pourraient mener à des poursuites et à des condamnations - sont essentielles pour assurer une responsabilité juridique et rendre justice aux victimes, aux survivants et à leurs familles. De telles enquêtes constituent également le moyen de dissuasion le plus efficace possible contre de futures violations.
Nos organisations lancent un appel d’urgence à la communauté internationale pour mettre fin à ce grave cycle d’impunité et aux attaques répétées contre le personnel soignant palestinien. Pour rendre Gaza vivable, notamment en assurant à ses habitants un accès efficace et approprié aux soins. L’impératif d’une action internationale concertée est rendu encore plus urgent par la lutte pour contenir la pandémie de coronavirus dans le territoire palestinien occupé et y répondre.
Issam Younis, directeur d’Al Mezan :
Le déni systématique de responsabilité pour les victimes des attaques de 2014 encourage l’armée israélienne à continuer sans relâche à violer le droit humanitaire et le droit international qui protège les civils et le personnel médical. Seule la reconnaissance authentique d’une responsabilité, qu’Israël échoue à désigner encore et encore, peut mettre un terme à cette impunité chronique. La communauté internationale doit maintenant agir rapidement pour demander des comptes aux auteurs de ces crimes.
Tareq Shrourou, directeur de LPHR :
Ce rapport qui actualise celui de 2015 montre très clairement que le seul espoir réaliste pour établir la responsabilité des coupables et rendre justice aux victimes, aux survivants et à leurs familles, est à trouver du côté de la justice internationale. L’impunité systématique validée par le système d’enquête militaire israélien doit être contrée sinon, il est tragiquement prouvé et prévisible que des attaques graves se reproduiront de manière flagrante.
Aimee Shalan, directeur de MAP :
Alors que le monde entier célèbrent les personnels de santé qui combattent vaillamment le coronavirus partout dans le monde, nous devons nous souvenir que l’impunité est aussi infectieuse. Si les gouvernements veulent que les médecins du monde entier poursuivent sans crainte leur travail vital, qui sauve des vies, ils doivent faire en sorte qu’une responsabilité sera trouvée partout où ils seront attaqués. Et les territoires palestiniens occupés ne doivent pas faire exception à cette exigence.