Deux éminents historiens israéliens ont déclaré que l’occupation est la cause du soulèvement palestinien en cours et non une incitation (à la révolte), comme le prétend Israël, et ont confirmé dans leur entretien avec la chaine Al-Jazeera, l’efficacité du boycott pour mettre fin à l’occupation, en prenant l’ Afrique du Sud pour exemple.
L’historien israélien Shlomo Sand a souligné le rôle du traitement barbare infligé aux Palestiniens et l’avidité des colons. Il considère que le soulèvement palestinien qui a éclaté à l’automne dernier est provoqué par la poursuite de l’occupation et l’humiliation quotidienne, par la pauvreté et par l’absence d’issue.
Shlomo Sand qui est aussi maître de conférence à l’Université de Tel-Aviv, indique que l’occupation confisque les droits humains et les droits fondamentaux du citoyen aux Palestiniens depuis cinq décennies, en disant : "Nous, Israéliens, on travaille, on apprend, on rêve et on aime librement, tandis que non loin de nous, des êtres humains sont soumis à la dureté des cœurs des soldats et à l’avidité des colons."
L’historien israélien estime que la majorité des Israéliens soutiennent les atrocités de l’occupation ou ne s’y soucient pas, puisque une partie d’entre eux croient que cela est le prix qu’ils doivent payer pour la libération lente du supposé pays, promis par la Torah.
Soutien et indifférence
Sand qui est l’auteur d’un livre audacieux qui remet en question l’existence d’un peuple juif et de ce qui est connu comme la « terre d’Israël », pense que la lutte armée n’est pas considérée en elle-même comme noble et particulièrement morale.
D’autre part, il estime que les femmes et les enfants innocents auteurs d’opérations ne sont pas nés tueurs, et avant l’occupation ils étaient des êtres humains ordinaires à la recherche du bonheur dans la vie.
Il poursuit, "mais quelque chose dans l’histoire des Palestiniens a subi un déséquilibre et de graves dommages, et quelque chose dans notre histoire israélienne est devenu un monstre."
Et son collègue le professeur Ilan Pappe est d’accord avec lui sur le fait que la persécution des Européens aux juifs ne donne jamais directement une immunité contre la cruauté du cœur et la fermeture face à la destinée de l’autre, le Palestinien.
Ilan Pappe, qui a quitté Israël pour la Grande-Bretagne, pour protester contre l’aggravation du racisme il y a cinq ans, voit que la vague d’attentats palestiniens n’empêche pas jusqu’a présent de vivre de façon naturelle en Israël.
Il montre dans son interview à Al-Jazeera que la plupart des Israéliens se convainquent qu’ils surmonteront l’actuelle épreuve comme toutes les guerres et les soulèvements du passé.
L’auteur du livre "Le nettoyage ethnique de la Palestine", doute même de la possibilité de l’apparition d’une opposition politique en Israël qui soit un jour capable de changer l’orientation de l’occupation et de la colonisation vers une solution à deux Etats.
L’escalade du boycott
A propos de l’avenir, Sand estime que le rejet de l’occupation par les Israéliens est possible. Cela peut se produire si les opérations palestiniennes s’amplifient et si les adultes rejoignent les enfants et les femmes dans le cycle actuel ou le prochain cycle de la violence, en particulier lorsqu’elles sont dirigées contre des cibles militaires.
Pape rejoint Sand sur l’efficacité du boycott international d’Israël pour le sauver de son occupation, comme les sanctions qui ont porté leurs fruits en Afrique du Sud et en Iran.
Ilan Pappe estime que la campagne de boycott international actuelle est basée sur le concept qu’Israël incarne deux erreurs, par sa création et les conditions de son existence, et par ses violations du droit des Palestiniens.
Il pense que la solidarité et le soutien des Palestiniens va s’accroitre dans le monde à travers les organisations non gouvernementales, en particulier dans les institutions universitaires, et précise qu’il y a un boycott d’Israël non déclaré et une énergie latente qui peut être exploitée.
Il explique que la raison à cela réside dans les politiques "stupides" d’une droite sioniste, qui favorisent la solidarité avec les Palestiniens, et non grâce à la performance de l’Autorité palestinienne.
Ilan Pappe exhorte les Palestiniens à mettre fin à leur division et prône l’escalade du boycott sans se limiter aux produits des colonies.
Ilan Pappe et Shlomo Sand qui sont les plus éminents des nouveaux historiens concluent en affirmant que le boycott ne détruira pas Israël, mais il permettra d’éviter la poursuite de son contrôle sur la vie des autres à qui on vole depuis cinquante ans le droit de contrôler leur propre destin et de défendre leurs terres.
Traduit pour l’AFPS par Moncef Chahed