Retour en arrière pour Airbnb : le site maintient ses offres de logements dans les colonies israéliennes de Cisjordanie. Amnesty international dénonçait jeudi ce changement de politique survenu en quelques mois. La plateforme de réservation de logements est revenue sur sa décision de supprimer systématiquement les annonces situées dans les colonies, considérées comme illégales par la communauté internationale. L’ONG a rappelé dans un communiqué la responsabilité qu’a l’entreprise américaine de respecter le droit international « où qu’elle opère dans le monde. »
Airbnb espérait pourtant faire passer la pilule : l’entreprise a promis de reverser « tous les bénéfices générés en Cisjordanie à des organisations non caritatives d’aide humanitaire. » Un geste qui ne suffit pas à apaiser les ONG. « Cela montre qu’Airbnb est conscient de son impact négatif. Ils veulent donner cet argent pour se déculpabiliser et essayer de neutraliser cet impact », explique à Libération Eric Goldstein, directeur adjoint de Human Rights Watch et spécialiste du Moyen-Orient. En continuant d’attirer des touristes dans les zones occupées, le site, présent dans plus de 80 000 villes devient « complice de la violation des droits de l’homme dans les colonies ». D’après les estimations des ONG, 1% des logements israéliens répertoriés sur Airbnb se trouveraient dans ces zones.
Si un Palestinien peut réserver un séjour dans une des propriétés du site en territoire occupé, il risque néanmoins de ne pas pouvoir s’y rendre. « Il y a une sécurité à passer à l’entrée des colonies. C’est une discrimination imposée : même si le propriétaire d’un appartement accepte la réservation, un Palestinien de Cisjordanie ne pourra pas rentrer », continue Eric Goldstein.
Géants de la réservation
Mais la plateforme n’est pas la seule à être épinglée pour sa présence dans les territoires occupés. Le PDG de TripAdvisor, Stephen Kaufer, s’est vu adresser une lettre ouverte réclamant le retrait de l’entreprise de la zone, assortie d’une pétition. Celle-ci, qui doit se clore fin juin, rappelle que le site « répertorie plus de 70 propriétés, activités et attractions se trouvant dans des colonies israéliennes illégales. » Pour Amnesty International, promouvoir ces zones comme des destinations touristiques « tend à normaliser et à légitimer la colonisation aux yeux du grand public. » Ces géants de la réservation, à qui s’ajoutent Booking et Expedia, sont accusés par l’ONG « d’induire en erreur leurs clients en s’abstenant d’indiquer systématiquement que les offres concernées sont situées dans des colonies israéliennes. » Ces sites proposent par exemple du camping dans le désert, pour « faire l’expérience de la tranquillité » et « venir goûter la chaleureuse hospitalité israélienne ». Mais ces vacances ont un prix : compter jusqu’à 409 euros la nuit en tente six personnes. D’après l’ONG, ces offres se situent sur des terres « que les Bédouins exploitaient par le passé pour faire de l’élevage » et dont elles utilisent la culture pour attirer les touristes.
« Airbnb a réalisé ce que nous avons plaidé depuis le début : les boycotts de Juifs où que ce soit, même juste en Cisjordanie, sont de la discrimination », avait déclaré Eugene Kontorovich, professeur de droit international au Kohelet Policy Forum de Jérusalem, et membre du groupe qui s’était mobilisé contre le départ de l’entreprise. Dans son communiqué, cette dernière a rappelé « s’être toujours opposée au mouvement Boycott désinvestissement et sanctions (BDS) », qui lutte contre la colonisation des terres palestiniennes.