La semaine dernière, dans une tentative pour sauver sa peau, après le scandaleux fiasco au Liban, le Premier ministre israélien Ehud Olmert a passé un accord avec le parti d’extrême droite Israel Beytenu (Israël Notre Maison), l’invitant à entrer au gouvernement. Aujourd’hui (30 10 2006) la Knesset va voter la nomination du dirigeant de ce parti, le député Avigdor Lieberman, au poste de vice-Premier ministre et ministre des Menaces stratégiques, en charge du dossier iranien.
Les Palestiniens ont connu un large éventail de gouvernements israéliens, de la gauche à la droite.
En 1993, sous le travailliste Yitzhak Rabin, les Palestiniens ont signé les Accords d’Oslo et cru qu’ils s’étaient embarqués vers le commencement de la fin de la domination israélienne. Rien n’était plus éloigné de la vérité. Non seulement ces accords ont davantage enchaîné les Palestiniens à la prédominance israélienne, mais ils ont ouvert la route à des accords bilatéraux encore plus oppressifs.
En 1999, l’accord de Wye River a été signé alors que Benjamin Netanyahu était Premier ministre, et il divisait Hébron en zone contrôlées par les Israéliens et par les Palestiniens, dans le but en fait de protéger les quelque 400 colons juifs extrémistes.
Pourtant, presque tous les gouvernements israéliens précédents ne sont rien en comparaison de celui qui est formé actuellement.
Lieberman est bien connu pour ses sentiments anti-palestiniens que, rappelons le, il affiche ouvertement.
Lieberman, qui a émigré de Moldavie, dans l’ancienne URSS, en 1978, a d’abord adhéré au Likud au début des années 90, avant de former ’Israel Beytenu’ en 1999.
L’une des propositions de Lieberman est de redessiner la Ligne verte, pour exclure les Palestiniens qui vivent en Israël ( en les privant de leur nationalité israélienne et les reléguant dans les zones contrôlées par l’Autorité palestinienne) tout en annexant toutes les colonies juives illégales à l’Etat. Il justifie cette position en affirmant que les “Arabes” sont plus loyaux envers les Palestiniens qu’envers Israël, et qu’ils ne sont pas partisans d’un Etat juif.
Lieberman a même été jusqu’à appeler à l’exécution des membres arabes de la Knesset qui avaient des contacts avec les députés du Hamas. Ses opinions racistes sont si extrêmes qu’en 2002 qu’il a déclaré qu’il fallait noyer tous les prisonniers politiques palestiniens dans la Mer morte, et qu’il pouvait fournir les bus.
Quelles ont les répercussions pour les Palestiniens ? Même si le dit-processus de paix est depuis des années maintenant dans un état comateux, seulement ramené à la vie de façon temporaire par un électrochoc de la diplomatie internationale de temps en temps, l’entrée de ’Israel Beytenu’ au gouvernement va certainement marquer son arrêt de mort. Ce n’est pas seulement que le parti de Lieberman est entré au gouvernement avec l’assentiment y compris du parti travailliste qui est préoccupant, c’est surtout que la communauté internationale n’a pas eu un battement de cils devant cette nomination.
Même l’Union européenne, traditionnellement plus neutre que les Etats-unis en ce qui concerne Israël et les Palestiniens, a choisi de ne pas frapper Lieberman d’ostracisme au vu de ses positions, alors que les deux puissances occidentales l’ont fait au gouvernement palestinien élu dirigé par le Hamas.
Au contraire, durant les 6 jours de son voyage au Moyen-orient, le chef de la politique étrangère de l’UE, Javier Solana, a rencontré Lieberman, bien qu’il ait concédé avoir été en désaccord avec lui « pendant toute sa vie ».
Une telle démarche n’augure rien de bon pour les Palestiniens. Alors qu’ils souffrent des conséquences du boycott international de leur gouvernement depuis que le Hamas est arrivé au pouvoir en mars dernier, Israël met l’un de ses politiciens les plus extrémistes dans une situation de décideur sans que la moindre voix exprime une quelconque préoccupation.
Bien sûr, les députés arabes à la Knesset se sont opposés publiquement à ce que Lieberman prenne le train en marche. Les trois partis arabes ont déposé des motions de défiance pour protester contre l’invitation faite à Lieberman d’entrer au gouvernement. Le député arabe Ahmad Tibi a traité Lieberman de “politicien dangereux, de raciste et de fasciste astucieux.”
Alors que la nomination de Avigdor Lieberman au gouvernement est techniquement parlant une affaire intérieure israélienne, il n’y a aucun doute que tout ce qui se passe dans les couloirs du pouvoir israélien a des répercussions sur les Palestiniens.
Le gouvernement et le parlement ne doivent pas écarter ce nouveau développement explosif comme simplement de la politique israélienne interne. C’est vrai, la situation palestinienne doit rester notre priorité et rien ne doit nous empêcher de mettre de l’ordre chez nous. La situation interne a atteint un niveau catastrophique avec des groupes de milices qui en arrivent à enlever et tuer des gens, sans respecter l’état de droit. C’est assurément le problème le plus urgent pour nous, car nous ne pouvons tolérer de tels incidents.
Néanmoins, il est aussi important que nous estimions la situation de ceux qui nous entourent, notamment les événements et développements qui impliquent notre oppresseur. C’est ici que les médias et les relations publiques sont bien utiles.
Les Palestiniens devraient tirer parti de la haute technologie actuelle pour faire passer autant d’ information que possible sur les vues dangereuses et venimeuses de Lieberman et pour expliquer comment sa présence dans la vie politique israélienne « normale » pourra entraver toute possibilité d’arriver à un juste règlement du conflit.
Il n’est certes pas réaliste de penser que les Palestiniens peuvent changer le cours de la politique israélienne et empêcher Lieberman d’entrer dans le cabinet, par contre ils sont certainement capables de dévoiler publiquement les positions extrémistes de cet homme à l’encontre des Palestiniens en particulier et des Arabes en général. Dans ce domaine ils peuvent faire avancer les choses.