Le 8 février 2005 s’est tenu à Sharm el Sheikh en Egypte un sommet entre le président palestinien, le premier ministre israélien, le roi de Jordanie et le président égyptien qui était à l’initiative de cette rencontre.
Ariel Sharon qui avait d’emblée prévenu qu’il s’agirait seulement de négociations sur l’ « arrêt de la violence », sous-entendue palestinienne, s’est vu ainsi reconnaître sur la scène arabe et internationale d’où il était exclu de facto depuis le début de la répression de l’Intifada. En conséquence l’Egypte et la Jordanie vont renvoyer des ambassadeurs à Tel-Aviv.
Mahmoud Abbas ayant annoncé « l’accord de cessez-le-feu de toutes les organisations palestiniennes », Sharon s’est engagé à arrêter les opérations militaires en Palestine occupée et à mettre fin aux exécutions extrajudiciaires. Il a accepté de libérer 900 des quelque 8000 prisonniers politiques palestiniens détenus dans les geôles israéliennes (sans concertation avec les autorités palestiniennes sur qui serait « libérable »), et à remettre aux Palestiniens la « responsabilité » de 5 villes de Cisjordanie. Oui, mais...
Rien sur l’arrêt de la colonisation qui continue à s’étendre en Cisjordanie et même à Gaza, et le démantèlement des colonies, toutes illégales.
Rien sur l’arrêt de la construction et le démantèlement (exigés par le droit international) du Mur d’annexion, dont Barak reconnaît qu’il a pour objectif d’inclure de 60 à 80 % des colons de Cisjordanie à Israël (Libération, 1/ 2 /2005).
Rien sur les autres prisonniers, dont les députés élus du peuple palestinien, Barghouti et Khader, illégalement détenus.
Rien sur la levée des quelque 750 check-points qui interdisent toute vie en Palestine et qui ont été multipliés avant le sommet, ce qui permettra de mettre en évidence la « générosité » de Sharon quand on reviendra à la situation d’avant sommet, en en levant certains.
Rien non plus en termes politiques ( Sharon avait annoncé qu’il n’y aurait pas de discussion politique).
Rien sur l’état palestinien dont la direction israélienne ne veut pas (en octobre 2004, Weisglass, conseiller de Sharon, omniprésent dans les rencontres actuelles, a déclaré que « la feuille de route c’est comme du formol » où on peut conserver indéfiniment tout processus de paix, toute perspective d’état palestinien).
Rien sur Jérusalem, territoire occupé dont Israël revendique la propriété et la judéité exclusives, où il a refusé de laisser inhumer le président Arafat, « terroriste arabe », et dont il exclut les résidents palestiniens à tour de bras.
Rien sur le droit au retour des réfugiés palestiniens. Avi Pazner, porte-parole israélien a déclaré sur Radio France le 9 février : « il n’y aura jamais de retour des Palestiniens en Israël et jamais Jérusalem ne sera la capitale de l’état palestinien ».
Mahmoud Abbas a fait le pari de la solution politique négociée, fondée sur le droit international, mais il lui faut un partenaire israélien or toutes les déclarations israéliennes actuelles sont très préoccupantes, aucune ne va dans le sens de la négociation sur les sujets clés, les revendications nationales du peuple palestinien.
Alors, pour que ce sommet ne soit pas une simple sommation israélienne à Mahmoud Abbas d’assurer la sécurité d’Israël et de ses colons - ce qui préoccupe considérablement la population palestinienne qui l’a élu sans enthousiasme mais en étant convaincue qu’il ne braderait pas ses droits-, et pour qu’il soit vraiment ce premier contact vers des négociations bilatérales honnêtes où Israël aussi s’engage à rechercher la paix et à reconnaître les droits nationaux légitimes des Palestiniens, pour qu’il y ait vraiment « un espoir de paix », la communauté internationale doit s’investir pleinement en imposant une perspective politique clairement affirmée et reconnue, basée sur le droit international, avec un calendrier précis pour y parvenir.
A nous de ne pas la laisser l’oublier.