Le secrétaire d’Etat américain a souligné qu’aux yeux de Washington les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés sont « illégitimes » (contrairement aux Européens et aux Palestiniens, les Américains ne les qualifient pas d’« illégales »), et il a pris le contre-pied des affirmations répétées ces derniers jours par Benyamin Nétanyahou.
Le premier ministre israélien accuse en effet Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, de créer une « crise artificielle » en dénonçant la relance de la colonisation, alors même qu’il en aurait accepté le principe par son retour à la table de négociations, fin juillet, et en échange de la libération de prisonniers palestiniens, ce que démentent formellement les responsables palestiniens. « Je veux dire très clairement qu’à aucun moment les Palestiniens n’ont de quelque manière que ce soit consenti, lors de la reprise des pourparlers, à entériner ou à accepter la colonisation », a souligné John Kerry, tout en précisant que les intéressés, comme les Etats-Unis, savaient que les constructions allaient se poursuivre.
Nouvelles étapes
A quel rythme, c’est toute la question. Or le gouvernement israélien a annoncé une forte relance de celles-ci immédiatement après la libération d’un second contingent de vingt-six prisonniers palestiniens, le 29 octobre. En tout, quelque 5 000 logements, à différents stades de la procédure administrative, sont concernés. Le secrétaire d’Etat américain a rappelé que Mahmoud Abbas s’est engagé à ne pas franchir de nouvelles étapes dans le processus de reconnaissance de la Palestine par les Nations unies, tant que les pourparlers de paix se poursuivent et tant qu’Israël continue à libérer des prisonniers palestiniens.
« Dans toute négociation, il y a des hauts et des bas », a voulu relativiser M. Kerry. En réalité, la consigne du secret des tractations exigée par les Américains a volé en éclats et la crise est désormais ouverte. La dernière réunion (la dix-septième, semble-t-il, en un peu plus de trois mois), qui a eu lieu mardi soir, s’est déroulée de façon houleuse, confirmant qu’en fait de négociations c’est un dialogue de sourds acrimonieux qui se poursuit. Lundi, M. Abbas a reconnu que les discussions « ne sont pas encourageantes et n’ont encore produit aucun résultat tangible ». De son côté, Benyamin Nétanyahou a accusé les Palestiniens de se livrer à « des incitations à la violence et de créer des crises artificielles ».
La stratégie de John Kerry pour garder le processus de paix sur les rails semble désormais incertaine. C’est manifestement avec le souci d’inciter les Palestiniens à la patience qu’il a annoncé, mercredi, la décision de l’administration américaine d’investir 75 millions de dollars (55,4 millions d’euros) supplémentaires dans des projets d’infrastructures en Cisjordanie. « Nous devons développer les économies pour montrer aux deux peuples que la paix profite à la prospérité et à une meilleure qualité de vie », a souligné le secrétaire d’Etat. C’est là une déclinaison du principe de la « paix économique » que défendent à la fois les Etats-Unis et Israël. Au-delà, si le blocage des négociations perdure, l’administration américaine n’exclut plus de présenter aux deux parties sa propre « feuille de route ».
Mais c’est sans compter les impondérables : de ce point de vue, le retour, prévu lundi 11 novembre, à son poste de ministre des affaires étrangères d’Avigdor Lieberman, que l’on sait farouchement hostile à la création d’un Etat palestinien, n’est pas de bon augure. Pas plus que la publication du rapport des experts suisses concluant à l’empoisonnement de Yasser Arafat….