Bernard Kouchner, le « French doctor » devenu le ministre « d’ouverture » des Affaires étrangères du gouvernement de la France a rapidement succombé à ce syndrome majeur : un dédoublement aigu et patenté de la personnalité.
Ainsi vient-il à nouveau de déclarer, ce jour même à Jérusalem, que la France faisait tout pour obtenir la libération de Gilad Shalit capturé à Gaza. Mais il n’a pas eu le moindre mot, bien que de nouveau fortement alerté par nos soins, pour exiger la libération de notre jeune compatriote français de 23 ans, incarcéré 7 ans dans les geôles israéliennes, Salah Hamouri.
Le premier, Gilad Shalit, est franco-israélien tandis que le second, Salah Hamouri, est franco- palestinien. Le premier a été capturé sur un char israélien, en uniforme, à Gaza. Il est membre, de facto, d’une armée d’occupation. Le second a commis le « crime » de passer en voiture devant le domicile d’un chef religieux extrémiste. Arrêté trois mois plus tard, un tribunal militaire l’a condamné , sans pouvoir fournir la moindre preuve, à sept ans de prison affirmant que ce fait témoigne qu’il avait « naturellement » l’intention d’attenter à la vie dudit rabbin.
Et Bernard Kouchner, le héraut de l’intervention humanitaire, demande la libération du premier et ne dit rien de public – il ne demande rien d’autre en privé que la « clémence » – pour le second. Allez comprendre quelque chose, vous. Ou plus exactement on comprend bien : quand on est israélien et français, même si on est membre d’une armée d’occupation, libération est demandée ; quand on est palestinien et français, quand bien même on n’a rien fait de coupable, on ne demande rien de tel.
Pire, on vous expliquera que Salah Hamouri ayant, sous peine d’encourir une peine encore plus lourde, « plaidé coupable » c’est donc bien que le tribunal militaire israélien, qui juge ceux qui sont occupés, dit le vrai ! Et être capturé sur un char d’une armée d’occupation, c’est quoi ? Ce n’est rien… pour Bernard Kouchner.
Ce simple fait, grave s’il en est, témoigne de la vérité des faits de la politique française : pour les autorités françaises il y a Français et Français. Du moins il y a des Français de seconde catégorie, des déchets en quelque sorte, et il y a des Français tout court. Mieux vaut s’appeler Gilad que Salah, Shalit que Hamouri.
Personne ne demande ici un deux poids deux mesures et d’inverser les termes actuels des demandes françaises.
Nous demandons au contraire, et cela vaut pour toute notre politique au Proche-Orient, l’égalité de traitement et, en conséquence, la libération de Salah Hamouri. Celle-ci doit être plus facile à obtenir que celle de Gilad Shalit dès lors qu’il n’est pas aux mains, on ne sait où, d’un groupe mais aux mains d’un Etat. Faut-il encore pour cela être animé d’une même passion et d’un même courage pour exiger l’universalité des droits de l’Homme qui ne saurait s’arrêter là où commence Israël.
Exiger cela, Bernard Kouchner n’en a ni l’envie politique, ni la force morale. Raison de plus pour ne pas baisser la garde et de rejoindre le Comité de soutien pluraliste qui s’est constitué pour Salah.