Ce qu’il y a de terrible dans cette réélection de Mahmoud Abbas, c’est que tout le monde aimerait bien que la Palestine puisse devenir une vraie démocratie avec des institutions qui représentent vraiment la totalité de la population et notamment sa jeunesse. Or les jeunes palestiniens qui ont 18 ans aujourd’hui n’ont jamais connu au pouvoir que Mahmoud Abbas depuis la mort de Yasser Arafat en 2004. Il est le patron du Fatah, donc, mais aussi de l’OLP et de l’Autorité palestinienne, tous les pouvoirs exécutifs concentrés entre ses seules mains.
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Les experts d'Europe Soir - 29/11/2016 par Europe1fr
Plus grave, ces leviers de pouvoirs sont des plus faibles. L’occupation israélienne de l’armée et des colons ne laisse à Mahmoud Abbas qu’un contrôle sur à peine 40% de la Cisjordanie tandis qu’à Gaza, c’est le Hamas, la faction islamiste rivale qui contrôle le territoire, entièrement encerclé par Israël et totalement dépendant de l’Etat hébreu pour son approvisionnement et son économie.
On aurait pu se dire dans de telles conditions que le mieux était peut-être de passer la main et de laisser une nouvelle génération reprendre le flambeau, mais ce n’est pas pour demain. Parce qu’il n’y a pas en fait trente six alternatives. Il n’y a personne aujourd’hui pour incarner une politique plus accommodante vis-à-vis des israéliens. Et c’est d’ailleurs le problème de Mahmoud Abbas, accusé par les éléments les plus radicaux d’être ni plus ni moins qu’un collaborateur d’Israël.
Des discordances au sein même du Fatah
Il existe en revanche des voix plus fortes au sein même du Fatah et en dehors, celles qui viennent de la société civile notamment, et qui réclament d’abord un énorme effort contre la corruption qui continue de gangrener sérieusement la direction palestinienne, en particulier les cercles les plus proches d’Abbas.
Il y a également la voix dissonante de Mohammed Dahlan l’ancien patron de la sécurité palestinienne à Gaza, exclu du Fatah et qui vit en exil aux Emirats arabes unis. Lui en appelle à un renouvellement de génération, à la libération du héros de l’intifada Mahmoud Baghouti et à une posture plus offensive face à Israël. Ces réformateurs seront-ils entendus ? Ce n’est pas le cas à ce stade. La seule concession du clan Abbas tient dans la création d’un poste de N°2 du Fatah qui sera élu la semaine prochaine et qui deviendra aussi le n°2 de l’OLP, autrement dit un très probable successeur. Mais pour quoi faire ? On ne le sait pas.
Il faudrait qu’Israël de son côté fasse preuve d’ouverture pour un retour au processus de paix. Or de ce côté-là, tout est gelé avec Benjamin Netanyahou, lui même otage de ses propres alliés nationalistes et religieux. Et ce n’est pas Donald Trump à la Maison Blanche qui tordra le bras aux dirigeants israéliens pour renégocier une solution à deux Etats. Tout cela ressemble, pour les Palestiniens et pour toux ceux qui souhaitent sortir de cette paix introuvable, à un immense gâchis.