Communiqué, 7 juin 2005,
Attaché à ce message se trouve un article qui a paru dans le quotidien Ma’ariv. L’article expose une opération de vengeance menée par l’armée en réponse à l’attaque palestinienne de la veille contre un barrage de route à Ein-Arik dans laquelle six soldats avaient été tués.
Cet événement démontre la corruption morale qui atteint les plus hauts niveaux de commandement : ceci n’est pas un autre soldat qui a « dérapé » et maltraité des civils à un check-point, mais des opérations préméditées et bien planifiées dont le seul but était la vengeance. Ceci démontre encore une fois le degré de comportement pourri et indécent qui a été atteint dans les territoires.
Ces témoignages s’additionnent aux centaines qui ont été publiés cette dernière année par « Breaking The Silence » et souligne encore une fois la nécessité désespérée d’une discussion publique autour de la politique israélienne dans les territoires. Une véritable société ne peut pas permettre à sa plus puissante organisation d’éviter d’être critiquée et de rendre des comptes.
Nous de « Breaking The Silence » continuerons à exposer la vérité cachée sur la réalité dans les territoires occupés en espérant initier et soutenir la discussion publique dont on a si désespérément besoin.
Le 20 février 2002, nous avons tué des policiers par vengeance, confessent des soldats israéliens]
Par Donald Macintyre à Jérusalem, 3 juin,
Independent News :
Deux soldats israéliens ont accepté de décrire comment ils avaient pris part à ce qu’ils disent être une opération officiellement commandée de « vengeance » pour tuer des officiers de police palestiniens dont certains n’étaient pas armés.
Dans un témoignage cru, un des soldats a reconnu qu’il avait « réellement pris du plaisir » à la chasse pendant laquelle il a tiré à la tête sur un Palestinien non armé qui essayait de fuir lors d’une série de raids de représailles commandée le lendemain de la tuerie de six soldats israéliens par des militants armés embusqués trois ans auparavant.
Ce qui pourrait être le premier compte rendu interne sur une telle opération, les soldats de deux unités de reconnaissance disent qu’ils faisaient partie des commandos auxquels leur commandant avait ordonné de « liquider » des officiers de police dans plusieurs check-points palestiniens de Cisjordanie et ce malgré le fait qu’il n’y avait aucune preuve qu’ils aient été impliqués dans la tuerie des Israéliens.
Les raids faisaient partie d’une série d’attaques terre, air qui ont tué en tout 15 Palestiniens, dont 12 d’entre eux étaient des policiers, à et autour de Naplouse et Ramallah, 24 heures après que les six soldats israéliens avaient été tués à un poste militaire dans le village d’Ein Arik, à l’ouest de Ramallah, au plus fort de l’Intifada.
Un soldat, qui a pris part à l’attaque contre un poste palestinien à Deir es Sudan, raconte qu’ayant trouvé le poste vide en arrivant au milieu de la nuit, ils avaient attendu allongés.
« L’idée était de les tuer, c’est tout. Nous allions les tuer quand ils arriveraient, qu’ils aient été armés ou non. Si c’étaient des policiers palestiniens, ils devaient être tués. L’ordre avait été donné et tous les six, nous avons ouvert le feu ».
Le soldat, de la troupe de reconnaissance Yael, raconte que leur commandant de groupe (naval) leur avait dit : « Nous allons tuer six policiers palestiniens quelque part pour venger les six des nôtres qu’ils ont tués ». Puis il a ajouté : « A ma question : qu’ont-ils fait ? la réponse a été qu’on suspectait que le terroriste qui les avait tués (les soldats israéliens) était passé par un check-point palestinien. Soupçon, mais aucune preuve concrète. Mais on m’a dit ‘cela ne fait rien, ils nous ont pris six des nôtres alors nous allons prendre six des leurs’. »
Le soldat raconte qu’après avoir touché et blessé deux des Palestiniens alors qu’ils essayaient de s’enfuir, les soldats ont continué à tirer tandis que l’un d’eux a couru dans un abri en tôle ondulé et l’autre dans un cimetière. Après avoir arrosé de balles l’abri, une bombonne de gaz à l’intérieur a pris feu. « Nous avions tué un policier, un autre brûlait dans cet enfer et un troisième, s’échappait. Nous avons couru après lui dans le cimetière... nous avons grimpé sur le mur de l’enceinte et avons tiré sur lui. Nous l’avons tué lui aussi ».
Le soldat dit que les Palestiniens n’avaient pas répliqué et a ajouté : « Plus tard, nous avons compris qu’aucun d’entre eux... n’était armé ».Il ajouta qu’il avait inspecté le corps complètement fracassé (sur lequel il avait tiré pour « confirmer la mort ») de l’homme dans le cimetière et que « c’était un type dans la cinquante/soixantaine, un vieux ».
Les comptes rendus sont généralement remis à « Breaking the Silence », un groupe de jeunes ex soldats qui critiquent les méthodes utilisées par l’armée dans les territoires occupés.
Un des porte-parole du groupe, Avishai Sharon, un ancien membre des réputés Brigades Golani, soutient que l’opération du 20 février 2002 avait été commandée par des personnes « hauts placées » y compris par le ministère de la défense et il ajouta : « A mes yeux, ceci est un exemple très dur du franchissement des frontières morales et humaines ».
Il dit que cela a montré que « nous ne sommes plus une force de défense mais une tribu qui prend sa revanche dans le sang. En tant qu’Israélien, cela me fait peur ».
Il dit que les soldats dont les témoignages sont publiés aujourd’hui dans le Maariv, sont restés anonymes pour « raisons légales ».
L’autre soldat de l’unité de reconnaissance de parachutistes Tzanchanim, décrivant une autre attaque le même jour au check-point Beit Ha Mitbachayim, (situé sur la lisière est de Naplouse, attaque pendant laquelle la police palestinienne a répliqué), raconte que l’ordre de tirer sur des Palestiniens avait été donné par le commandant de l’unité et que le commandant de Brigade, Cochavi, était présent.
Il dit que les policiers étaient ceux qui normalement auraient dû être avertis par les officiers de liaison israéliens que des opérations militaires devaient avoir lieu dans leur zone.
L’armée (IDF) dit hier soir que les check-points attaqués ce jour là incluaient ceux où la police palestinienne avait « activement assisté...les terroristes » en facilitant leur passage. L’armée avait reçu des instructions de « l’échelon politique » de changer son mode opératoire. Il avait été décidé que l’armée « pourchasserait toutes les personnes impliquées dans le terrorisme » y compris les membres de l’appareil de sécurité palestinien tant que l’Autorité Palestinienne n’empêcherait pas de telles attaques.
JERUSALEM (Reuters) - Les forces spéciales israéliennes ont mené en 2002 une opération de représailles en abattant 15 Palestiniens, dont des policiers, à la suite d’une embuscade mortelle contre des soldats israéliens en Cisjordanie, rapporte le quotidien Maariv.
Cités par le journal, deux anciens membres de ces commandos s’exprimant sous le sceau de l’anonymat disent avoir reçu l’ordre d’attaquer des barrages palestiniens en Cisjordanie en représailles à la mort de six soldats pris sous le feu d’activistes palestiniens à un point de contrôle proche de Ramallah, en février 2002.
"Nous allons liquider des policiers palestiniens à un barrage par vengeance pour nos six soldats tués", a déclaré un commandant, cité par l’un de ces ex-commandos. L’officier aurait ajouté que "l’idée, c’est de répliquer ’oeil pour oeil’".
Cet article met une nouvelle fois en cause le comportement des militaires israéliens, qui affirment respecter un strict code éthique dans la lutte contre les activistes palestiniens.
Dans un communiqué diffusé en réaction à cet article de Maariv, l’armée affirme que les forces israéliennes ont pris pour cible "des barrages tenus par des policiers palestiniens qui ont facilité le passage et activement aidé (...) des terroristes", responsables de la mort de civils et de soldats.
Elle ajoute que les militaires, à cette époque, avaient "reçu pour instruction de l’échelon politique de modifier leur mode opératoire et de l’ajuster à la dure réalité du terrain".
Cette évolution signifiait notamment "traquer toutes les personnes impliquées dans des activités terroristes, y compris les membres de l’appareil de sécurité de l’Autorité palestinienne", tant que celle-ci n’empêcherait pas "les attaques terroristes émanant des villes palestiniennes", précise l’armée.
L’autre ancien commando cité par Maariv décrit pour sa part la manière dont son unité a attaqué des policiers palestiniens en train de boire un café à un barrage proche du lieu de l’embuscade meurtrière tendue aux soldats israéliens.
"A partir du moment où nous avons su que nous allions les éliminer, nous ne les avons plus considérés comme des êtres humains", dit cet homme, désormais étudiant.
Il affirme avoir lui-même porté le coup de grâce à un homme âgé d’une cinquantaine d’années : "C’était la première fois que je tuais et la première fois que je voyais quelqu’un mourir. C’était tout simplement une journée agréable."
L’Autorité palestinienne, qui démentait à l’époque toute collaboration entre ses services et les activistes, a depuis reconnu que certains de ses hommes avaient partie liée avec des groupes radicaux.
Sur la base de l’article de Maariv, il est impossible de savoir si les policiers palestiniens tués avaient ou non aidé les activistes responsables de l’embuscade meurtrière.