« Un rapport sensible qui
accuse Israël de se dépêcher
d’annexer les parties
arabes de Jérusalem-est vient d’être
mis au placard par les ministres des
Affaires étrangères de l’Union européenne
à Bruxelles hier ... de crainte de
fâcher Israël [1].
Javier Solana, le chef de la politique
étrangère de l’UE, a persuadé les ministres
de laisser tomber le rapport, en arguant
que l’influence de l’Europe sur Israël
serait largement compromise si le rapport
était publiés [2].
Le ministre britannique Jack Straw, dont
les représentants diplomatiques à Jérusalem-
est ont écrit le rapport dans le
cadre de la présidence britannique de
l’UE, a annoncé ce recul lors d’une
réunion des ministres des Affaires étrangères
européens. « Le paysage politique
a changé en Israël, il y aura une élection
dans quelques mois » a-t-il déclaré à propos
de la décision d’Ariel Sharon de former
un nouveau parti politique en prévision
des élections du 28 mars.
« Nous avons donc jugé opportun de ne
pas approuver ou publier le document
mais au contraire de continuer de présenter
nos préoccupations de la manière
usuelle ».
La position de M. Straw intervient après
qu’Israël a manifesté sa colère devant le
rapport, dont le Guardian [3] a eu connaissance
le mois dernier. Il accuse le gouvernement
de M. Sharon de compromettre
toute perspective de paix en
essayant de placer hors négociations
l’avenir de la partie arabe de Jérusalemest.
Selon le rapport « les activités d’Israël
à Jérusalem violent à la fois ses obligations
dans le cadre de la feuille de route
[4] et le droit international ».
Israël occupe Jérusalem-est depuis la
guerre de 1967 et la revendique comme
« capitale indivisible ». Les Palestiniens
veulent que la ville, siège du troisième
site le plus sacré de l’islam, soit leur
capitale.
Les diplomates du Consulat britannique
à Jérusalem -l’ambassade est située à
Tel-Aviv [5] - ont jugé qu’Israël utilisait
l’énorme nouvelle barrière de sécurité
pour exproprier les Arabes de leurs terres
dans et autour de la ville. « Cette annexion
de facto des terres palestiniennes sera irréversible
sans qu’il y ait évacuation forcée
à grande échelle des colons [6] ni
changement du tracé de la barrière ».
« Quand la barrière sera achevée Israël
contrôlera tous les accès à Jérusalemest,
la séparant totalement des villes
toutes proches de Bethléem et Ramallah
et de la Cisjordanie tout autour ».
Le débat sur le rapport a mis en évidence
les divisions qui existent en Europe
en ce qui concerne Israël. L’Allemagne
et l’Italie se sont ralliées au point de vue
de M. Solana sur la partialité du rapport
et partagent l’idée qu’il réduirait
l’influence de l’Europe sur Israël. Il
semble que les pays nordiques qui ont
traditionnellement plus de sympathie
pour les Palestiniens ont plaidé pour la
transparence. Apparemment la Grande-Bretagne a fait siennes les objections
de M. Solana, s’interrogeant sur l’opinion
qu’a Downing Street du consulat
britannique à Jérusalem, considéré par
certains au N°10 comme un bastion des
pro arabes du « Camel Corps » [7].
« Ce rapport est un peu trop corsé » a
déclaré un diplomate européen. « Javier
Solana a clairement fait entendre qu’il
est partial et qu’il n’est utile en rien ».