A Naplouse, ville qui nous est devenue familière, nous avons rencontré plusieurs associations
Toutes oeuvrent en direction des enfants et des adolescents chez qui les répercussions de la violence de l’occupation israélienne sont les plus graves.
A notre arrivée, nous avons rencontré notre voisin. Il était démoralisé :
Naplouse est de plus en plus difficile. Avant-hier il y a eu encore 3 morts !
Nous sommes rentrées dans un cimetière. Un groupe de jeunes, aux visages rempli de tristesse préparent la tombe de leur copain assassiné et enterré la veille.
Plus loin, un homme accompagné de deux enfants nous a conduit près de la tombe de son fils
assassiné alors qu’ il n’avait que 17 ans !
Nous avons passé un après-midi dans le camp de réfugiés d’El Aïn, situé à l’intérieur de la ville. 6.800 habitants s’y entassent !
Pour ce camp d’El Aïn, l’association France Palestine Solidarité de la Loire vient de financer un projet :réalisation d’un recueil de contes, par des enfants de 10 à 13 ans, qui sont allés rencontrer des personnes âgées, pour recueillir leurs légendes et histoires de vie . Après le travail d’écriture, ces contes ont été illustrés. Le premier recueil ‘contes sous couvre-feu’, traduit en quatre langues, arabe, français, espagnol et anglais, devrait être édité mi-janvier.
La présidente de l’Association du Comité des handicapés du camp
d’El Aïn nous a reçues. Nous avons rencontré les enfants, et un conteur.
Nous avons visité le camp.
Les ruelles sont étroites, les murs criblés de balles, les vitres cassées,
les murs des maisons lézardés. Chaque nuit l’armée israélienne pénètre
dans le camp.
Quelques jours auparavant, l’incursion a duré 3 jours avec couvre-feu.
Trois morts, de nombreux blessés et arrestations. L’armée a fait exploser
une maison de trois étages mettant ainsi plusieurs familles à la rue.
Près des ruines nous avons aperçu les traces des chenilles des chars israéliens
Lors du dernier ramadan, l’armée a tué un homme en prière.
Sa belle sœur a été blessée.
Pendant son hospitalisation l’armée est revenue et a tué son mari
Une nuit, un soldat qui était entré dans une maison a tiré dans le ventre
d’une femme enceinte de 7 mois. La balle s’est logée dans la tête du bébé
qui n’a pas survécu.
Nous avons rencontré Yasmine, treize ans, au visage profondément souffrant.
Sa maison a été détruite et son grand-père blessé.
Un enfant de treize ans est mort d’une crise cardiaque. C’est de plus en plus
fréquent tant les peurs vécues sont grandes.
Invitées par une famille devenue amie, nous avons passé un week-end dans un village proche de Naplouse. Tout près d’une colonie. En Août 2007, les colons ont arraché 850 oliviers, en ont brûlé 1000 ainsi que des champs de blé.
Le maire du village a invité la télévision à faire un reportage. L’Association Israélienne, pour la défense des droits de l’homme, B’Tselem, a prêté aux villageois un caméscope pour leur permettre de filmer les méfaits des colons. Une plainte a été déposée auprès de la Haute Cour Suprême Israélienne…..sans réponse jusqu’à ce jour.
Le père de famille qui nous a accueillies, vivait dans un camp. Il est venu récemment s’installer dans ce village, n’en pouvant plus des incursions nocturnes de l’armée israélienne.
Il nous a raconté l’arrestation d’un de ses fils en novembre 2006 alors qu’un de ses fils avait déjà été assassiné en 2004 et un autre emprisonné en 2003 :
les soldats ont encerclé notre maison. ‘vous avez 5 secondes pour sortir sinon on la fait exploser’. Nous sommes sortis en pyjama. Mon fils a été arrêté, déshabillé, frappé sur la tête et le nez. Je n’ai pas pu m’approcher de lui, tenu à distance par leurs armes.
Il a été incarcéré pour deux ans et demi. Motif : appartenance à un mouvement de résistance et collage d’affiches. A sa sortie, il devra payer 2050 NIS (410 Euros), son frère 3000 NIS (600 Euros), soit 1050 Euros, somme énorme pour une famille très pauvre.
Les parents sont interdits de visites.
Seuls les deux plus jeunes de la famille âgés de 14 et 4ans peuvent aller voir leurs frères en prison, dont l’un se trouve au Nord, et l’autre au Sud d’Israël.
Mais lorsque celui de quatorze ans essaye de s’y rendre, il se fait refouler aux Check-points parce qu’il est mineur. Un plus âgé doit l’accompagner. Remise de vêtements, de nourriture est interdit. Seul l’argent est autorisé. Est-il remis au prisonnier ?
Nous sommes allées dans un autre village, situé à 5 kms de là. Un jeune couple, avec 2 enfants y vivaient jusqu’au 7 décembre 2006, date à laquelle le mari a été incarcéré. Le 25 janvier 2007, dans la nuit, les soldats sont venus chercher sa jeune femme de 28 ans. Elle est depuis emprisonnée avec son bébé. Motif : elle faisait partie d’un mouvement type Hezbollah. Ce ne sont que des mensonges , nous a dit son beau-frère qui nous reçoit. Elle a été jugée : deux ans de prison. A sa sortie elle devra payer 3000 NIS (600 Euros). Somme énorme !
Son beau-frère ne peut lui rendre visite parce qu’il ne porte pas le même nom qu’elle. Elle ne voit personne, toute sa famille vivant en Jordanie.
Son mari lui, n’a toujours pas été jugé
Sur le chemin du retour, un barrage volant. Avec beaucoup de dédain, le militaire exige du chauffeur de taxi qu’il s’arrête à ses pieds. Lorsqu’il nous aperçoit, changement de comportement. Le taxi repart aussitôt sans vérification de papiers. La même chose se produira un autre jour, à un check-point, avant d’arriver à Naplouse. A croire que les soldats israéliens n’apprécient pas que des étrangers soient témoins de leur attitude méprisante à l’égard des Palestiniens.
Un soir, accompagnées de trois jeunes, nous nous sommes rendues dans la
vieille ville pour saluer cette femme qui a perdu l’usage de ses membres après
être restée, avec son mari, sept jours sous les décombres de sa maison,
bombardée avec ses habitants à l’intérieur (11 morts dont un bébé).
A notre surprise, nous n’avons pas rencontré, comme l’an passé, des résistants
armés à chaque coin de rue :
ils sont tous morts, ou presque
nous explique un des jeunes qui est avec nous.
Il nous montre les coins des rues où ses copains ont perdu la vie :
l’armée israélienne nous bloque et tire.
Le 3 décembre, retour sur Naplouse. Dans l’autre sens de nombreux véhicules emmènent des familles accueillir à Ramallah les 435 prisonniers libérés .Des barrages volants, plus nombreux, ralentissent encore leur déplacement.
Ces 435 prisonniers sont, pour la plupart, en fin de peine. Les semaines précédentes 500 avaient été incarcérés.
Bien sûr, ceux et celles retrouvant un fils, un frère, un mari, sont heureux.
Pourtant il n’y a pas eu la fête :
11.700 palestiniens sont toujours en prison. Un homme est incarcéré depuis 31 ans.
Comment peut-on faire la fête ?
Le 5 décembre, à notre départ de Naplouse, après avoir passé le check-point d’Huwara, nous avons pris un car pour aller à Ramallah. Quelques kilomètres plus loin ; le car est stoppé sur une place, à l’écart. Longue attente. Les papiers d’identité sont vérifiés. Le car ne pourra repartir que lorsque le chauffeur aura dû demander à un jeune de descendre. Pour l’armée israélienne, tout jeune est un terroriste potentiel et ne peut circuler librement dans son propre pays !