12.07.11
Madame la Haute Représentante,
Les membres du Quartet pour le Proche-Orient se sont réunis hier à Washington, pour réfléchir aux moyens de relancer le « processus de paix » israélo-palestinien.
Le constat opéré au cours de cette réunion est sans appel : c’est l’impasse totale du fait des positions israéliennes récusant les propositions énoncées par le président Obama et soutenues « officiellement » par tous, à savoir l’établissement de deux États sur la base des frontières de 1967.
Mais on ne peut se contenter d’acter cette impasse. Il ne peut pas non plus être considéré, comme vient de le faire le Quartet, que, désormais « c’est aux parties de prendre les décisions difficiles », le Quartet se déclarant seulement « disposé à les aider » pour aller dans en ce sens.
C’est là un signe politique clair et négatif qui marque le renoncement du Quartet à agir et un aveu d’impuissance volontaire absolument non conforme à ce qu’impose la Charte des Nations unies, à savoir le devoir d’imposer la paix au titre de son chapitre VII. Car il ne s’agit pas pour la communauté internationale de « prendre des photos » des situations, mais d’agir pour modifier la situation en se basant sur la volonté et une détermination claires : faire prévaloir le droit international.
Vingt ans ont passé depuis le lancement à Madrid d’une négociation qui devait aboutir à « l’échange de la terre contre la paix ». Dix-huit ans ont passé depuis la signature à Washington de l’accord intérimaire israélo-palestinien dit d’Oslo. Celui-ci fondait explicitement la négociation sur le droit international et fixait un calendrier devant permettre l’émergence d’un État palestinien indépendant, souverain, dans les frontières de 1967, au plus tard dans les cinq ans. On sait ce qu’il en a été : outre que la colonisation israélienne, et singulièrement dans et autour de Jérusalem, a littéralement explosé, la reconnaissance de l’État de Palestine a été ajournée jusqu’à une date indéterminée. Huit ans ont passé depuis la « Feuille de route » qui devait conduire à l’établissement de cet État en 2005 ; quatre ans depuis Annapolis qui devait voir s’établir un État palestinien en 2008.
Il n’est plus raisonnable ni réaliste de vouloir chercher à continuer à seulement aider une négociation impossible en tête-à-tête entre les deux parties, d’inventer régulièrement de nouvelles étapes jamais respectées, et de soumettre ainsi la mise en œuvre des droits nationaux du peuple palestinien à l’accord préalable de l’État qui les bafoue.
En mai dernier, Benyamin Netanyahu a réitéré aux États-Unis, devant le Congrès, les grandes lignes de son projet. Un programme qui se résume à une série de refus : refus des frontières de 1967, refus du démantèlement des colonies – pourtant illégales –, refus du gel de la construction d’implantations coloniales quelles qu’elles soient, refus du partage de Jérusalem pourtant appelée à renouer avec son histoire riche et plurielle et à devenir la capitale de deux États, et refus de la reconnaissance des droits des réfugiés palestiniens.
Benyamin Netanyahu se déclare certes favorable à la création d’un État palestinien, mais à la condition inacceptable de nommer « État » une suite de mini enclaves privées de tout droit et de toute viabilité.
Partout dans le monde arabe, les peuples se soulèvent pour la liberté, la démocratie et le droit. Cette vague, non-violente, de dignité et de justice, ne saurait se heurter plus longtemps au mur des refus des dirigeants israéliens. Elle est au contraire un espoir pour tous les peuples de la région, singulièrement le peuple palestinien et le peuple israélien, et pour l’avenir commun de la Méditerranée.
L’Organisation de Libération de la Palestine a décidé de présenter lors de l’Assemblée générale des Nations unies, en septembre, une demande d’adhésion de l’État palestinien à l’ONU.
Il est temps, Madame la Haute Représentante, de faire en sorte que l’Union européenne se déclare désormais prête à le reconnaître enfin. Après tant de décennies et soixante-quatre ans après le partage de la Palestine mandataire, l’État de Palestine indépendant et souverain dans ses frontières de 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale, ouvrant la voie à la mise en œuvre pleine et entière de l’ensemble des droits du peuple palestinien c’est aujourd’hui la seule façon de faire bouger les lignes et d’agir – agir enfin – pour que s’instaurent deux États vivant en paix et en sécurité, l’un à côté de l’autre.
Le Quartet s’est refusé à montrer son engagement pour la paix, la liberté, le droit. Il avait pourtant l’occasion de faire parvenir ce message clair et dynamique, porteur d’espoir, à tous les peuples de la région et à leurs jeunesses.
La paix par le droit suppose des actes. Que l’Union européenne se déclare solennellement prête à reconnaître l’État palestinien dans les frontières de 1967 en juillet puis en septembre prochain, c’est la seule voie vers la paix.