12 décembre 2022
À l’occasion de la Journée internationale des droits de l’Homme, Al-Haq publie son rapport : "Responsabilité des entreprises : Le droit à l’eau et le crime de guerre du pillage." Le rapport expose "l’apartheid de l’eau" qu’Israël impose aux Palestiniens vivant dans le territoire palestinien occupé (TPO) et les entreprises qui le soutiennent. Cet apartheid de l’eau constitue une attaque systématique contre le droit du peuple palestinien à l’eau et à l’assainissement, qui met activement en danger la santé des Palestiniens et tient l’économie palestinienne captive des entreprises qui exploitent ce marché à des fins commerciales. En plus du rapport, nous lançons un court-métrage qui illustre l’apartheid de l’eau et la complicité des entreprises.
Le rapport détaille comment, par la limitation et la surveillance de l’accès à l’eau, la destruction des infrastructures hydrauliques palestiniennes et le pillage des sources d’eau palestiniennes, Israël utilise des entreprises pour s’approprier les sources d’eau palestiniennes et revendre cette eau pillée aux Palestiniens à des prix toujours plus élevés, dans un marché captif.
Le rapport cite des entreprises telles que Merkorot Water Company Ltd, Hagihon Company, TAHAL Group International B.V., Hyundai, Caterpillar Inc, JC Bamford Excavators Ltd et Volvo Car Group ; ces entreprises sont des complices actives de la violation du droit des Palestiniens à l’autodétermination et à la souveraineté permanente sur leurs ressources naturelles ; elles sont également complices du crime de guerre qu’est le pillage et des actes inhumains de dépossession des ressources naturelles ; cela correspond au crime d’apartheid.
Vous trouverez ci-dessous quatre courtes histoires décrivant le système israélien d’apartheid de l’eau :
L’apartheid de l’eau est une discrimination
En raison de leur identité, les Palestiniens sont soumis à un système d’apartheid discriminatoire qui leur refuse l’accès à leur propre eau. Le régime d’apartheid d’Israël est fondé sur des lois, des politiques et des pratiques discriminatoires qui permettent aux autorités militaires israéliennes de détenir le contrôle total de toutes les ressources en eau et des infrastructures liées à l’eau dans le Territoire palestinien occupé (TPO). Dans la zone C de la Cisjordanie occupée, sous le contrôle militaire et civil d’Israël, Israël contrôle et refuse aux Palestiniens l’accès aux réservoirs d’eau et aux sites de pompage, détruit régulièrement les puits d’eau et impose un régime de permis discriminatoire et arbitraire pour la mise en œuvre de tout projet lié à l’eau.
Par exemple, si vous êtes un Palestinien vivant dans le TPO, vous devez obtenir l’autorisation d’Israël, la puissance occupante, pour forer un nouveau puits d’eau ou réparer un ancien puits. Cependant, les Palestiniens se voient régulièrement refuser ces autorisations. Pour beaucoup, les propositions de construction de toute sorte d’infrastructure d’eau, en particulier dans la zone C, seront automatiquement rejetées. Si vous êtes un Palestinien vivant dans le TPO et que vous construisez par nécessité sans permis, ces structures hydrauliques seront démolies. En revanche, les colons israéliens illegaux ne sont confrontés à aucune restriction de ce type et bénéficient d’une abondance d’eau, de terres agricoles bien irriguées et ont accès à des piscines. Les politiques et pratiques discriminatoires d’Israël, puissance occupante, sont le reflet de la discrimination institutionnalisée d’Israël à l’encontre du peuple palestinien, ce qui peut constituer un crime d’apartheid, crime contre l’humanité passible de poursuites devant la Cour pénale internationale.
L’apartheid de l’eau est une dépossession
Les autorités israéliennes restreignent l’accès des Palestiniens à l’eau en leur refusant ou en limitant leur accès à de grandes parties de la Cisjordanie. Des ordres militaires arbitraires permettent aux autorités israéliennes de saisir les terres palestiniennes qui renferment des sources d’eau, sous prétexte qu’il s’agit de terres publiques ou d’État, telles que des réserves naturelles ou des zones militaires. L’accès aux terres dans ces zones est perdu alors que ces terres renferme inévitablement des ressources en eau palestiniennes telles que des sources ou des puits. Les Palestiniens n’ont pas le droit de retourner sur ces terres, ils ne reçoivent aucune compensation et on ne leur propose pas de structures d’eau alternatives. En vertu du droit international, Israël n’est que l’administrateur des terres occupées du territoire palestinien et, par conséquent, toute extraction de ressources naturelles, par exemple l’eau, doit se faire au bénéfice de la population occupée uniquement, et non de la puissance occupante. Refuser aux Palestiniens l’accès à l’eau, démolir les structures hydrauliques palestiniennes ou profiter des opportunités créées par les violations des droits de l’Homme est en contradiction directe avec le droit international.
L’apartheid de l’eau, c’est la ségrégation
La ségrégation est rendue possible par un système bureaucratique de restriction de l’eau dirigé par Israël et des entreprises. Si Israël joue un rôle central dans la perpétuation de la colonisation des ressources en eau par ses pratiques et ses politiques, les entreprises soutiennent de plus en plus cette appropriation en limitant l’accès des Palestiniens à l’eau et en utilisant l’eau comme un outil politique pour faire pression sur les communautés palestiniennes et les opprimer. Une entreprise israélienne, Mekorot, a pris en charge la totalité de l’approvisionnement en eau en Cisjordanie, tant pour les communautés palestiniennes que pour les colonies israéliennes illégales. La société détient un pouvoir discrétionnaire total sur l’approvisionnement en eau des villages palestiniens et applique le "deux poids, deux mesures" en matière d’approvisionnement en eau. Ce fonctionnement intégré inégalitaire explique l’énorme disparité dans la consommation et la répartition de l’eau entre Palestiniens et Israéliens. On estime que les colons israéliens, résidant illégalement dans le TPO, consomment trois à huit fois plus d’eau que l’ensemble de la population palestinienne de Cisjordanie, à l’exclusion de Jérusalem-Est. L’industrie agricole dans les colonies israéliennes illégales est florissante en raison de l’abondance de l’eau des terres palestiniennes extraite et volée.
Les structures hydrauliques palestiniennes sont également démolies à l’aide de bulldozers de sociétés internationales, telles que Bobcat, JCB, Volvo et Caterpillar. Les entreprises qui ne font pas preuve de diligence raisonnable en matière de droits de l’Homme courent le risque juridique de commettre des crimes de guerre ou d’y contribuer et de faire l’objet de demandes en dommages et intérêts dans le cadre d’un procès civil.
L’apartheid de l’eau, c’est la domination
Les entreprises israéliennes et étrangères tirent profit du projet israélien de désalinisation (processus consistant à rendre l’eau salée potable) comme solution à l’apartheid de l’eau imposé aux Palestiniens. Au lieu de respecter le droit des Palestiniens à la souveraineté sur leurs ressources en eau, Israël présente le dessalement comme la meilleure réponse au manque d’eau qu’il met à la disposition des Palestiniens. Pourtant, le dessalement est la méthode la moins efficace économiquement et la moins durable pour gérer les pénuries d’eau. Les usines de dessalement ont non seulement un impact négatif sur l’environnement, mais elles constituent également un obstacle au développement économique du TPO. Les équipements coûteux et les grandes quantités d’énergie nécessaires pour alimenter les usines de dessalement obligent les Palestiniens à dépendre des industries israéliennes, ainsi que des marchés et des fabricants étrangers. Cela renforce le marché captif sur lequel les Palestiniens doivent compter pour obtenir une eau sûre et accessible. Cela permet à Israël, et aux entreprises privées, de profiter continuellement du manque d’accès à l’eau et du manque de contrôle des Palestiniens sur leurs ressources naturelles. Israël utilise le dessalement comme un outil pour masquer les conséquences de son occupation et de son apartheid de longue date en matière d’eau, tout en violant activement le droit à l’eau des Palestiniens.
Traduction : AFPS