Quelle est la situation à Qana ?
Salah Salame :
Qana est une ville blessée dans son âme. Elle est devenue le symbole des martyrs de tout le Liban mais aussi le symbole de l’injustice qui frappe cette région.
Elle a été bombardée par les Israéliens en 1996, puis en 2006. Des dizaines de civils ont été tués, pour la plupart des femmes et des enfants. 67 tués lors du dernier conflit, 55 lors du fameux raid aérien et 12 vieilles personnes du fait du blocus imposé. 136 maisons ont été détruites, 250 ont été endommagées et 93 ne sont plus habitables. 300 familles vivent maintenant comme des réfugiés sur leur propre terre et 40 ont dû partir dans des villages voisins. Les riches sont partis, les pauvres sont restés.
Qana paie le prix d’un conflit imposé bien qu’elle n’ait jamais été un centre militaire. Toutes les organisations non gouvernementales (ONG) ont constaté que Qana est une ville où chrétiens et musulmans vivaient en paix.
Mais la rentrée des classes est très difficile. La plupart des écoles ont été endommagées et réparées à la hâte. Surtout, les parents ont du mal à assumer l’achat des fournitures scolaires.
Quelle est l’aide internationale dont vous disposez ?
Salah Salame :
L’Association nationale des élus communistes et républicains (ANECR) en France a élaboré un plan de parrainage et lance une campagne nationale pour venir en aide à la population de Qana. C’est un geste de solidarité
extraordinaire que nous apprécions. Cela montre que la cause de la paix et de la justice est une cause universelle, partagée par tous les hommes de libre conscience. Avec cette initiative des élus communistes français, nous sentons que nous ne sommes pas seuls face à la catastrophe, que nous pouvons défendre des valeurs humaines dans un cadre multiparti et multiconfessionnel. Il faut aussi souligner l’aide importante du Secours populaire français (SPF), de Première urgence (PU) et plus généralement de la France par le biais de son ambassade à Beyrouth qui nous a envoyé de l’eau, du lait pour les enfants, des médicaments.
Comment analysez-vous la situation politique du Liban ?
Salah Salame :
Il y a d’abord des questions sur le rôle que la FINUL renforcée (Force des Nations unies - NDLR) devrait jouer. La population du Sud s’attendait à ce que cette force protège le Liban face à la machine de guerre israélienne et aide l’armée libanaise à s’installer dans le Sud.
Mais lorsque les Libanais entendent la chancelière allemande expliquer que la FINUL est là pour assurer l’existence d’Israël, alors ils ne comprennent plus. Si Israël veut la paix, il faut qu’il quitte les territoires libanais, syriens et palestiniens qu’il occupe depuis 1967.
Au plan national, le problème politique reste entier. Dans un sens, la guerre a même aiguisé les clivages sur la scène politique libanaise. En tant que maire démocrate et indépendant, j’essaie de rassembler tous les courants autour de la municipalité, créer un espace de dialogue et de fraternité.