Si un militant européen de la cause palestinienne décide d’aller à Beyrouth
en ce moment, ce ne peut être
que pour des raisons fortes : manifester sa solidarité avec
la résistance d’un peuple qui, comme le peuple palestinien, subit dans l’impunité totale une nouvelle agression militaire d’Israël.
Mais il sait aussi que sur le territoire libanais existent douze camps regroupant plusieurs centaines de milliers de réfugiés palestiniens.
Le rendez-vous avec nos amis de Chatila était indispensable. Aujourd’hui
la « crise libanaise » est inséparable de la « crise palestinienne » : l’offensive israélienne contre le Liban
est la seconde étape
d’une escalade commencée
à Gaza et préparée de longue date.
De tout ce que j’ai vu et entendu sur place, sous un ciel bruissant en permanence des vols des avions, des drones et des hélicoptères israéliens, je retire d’abord une première évidence.
Si l’on part du postulat que le Hezbollah est « le » problème que la communauté internationale doit résoudre en priorité y compris par la force, on ne fera qu’aggraver
la situation... Si en revanche on pense qu’il n’est pas
le seul problème et qu’en réalité le problème essentiel
est la politique israélienne, la question n’est plus
de désarmer le Hezbollah mais de désarmer le conflit.
Et vouloir désarmer le conflit, c’est admettre que
la situation actuelle provient fondamentalement du refus israélien de se retirer des territoires conquis par la guerre de 1967 - y compris le Golan et les fermes de Chebaa (revendiquées par les Libanais et qu’Israël continue d’occuper) - et de négocier pour un échange
de prisonniers.
Vouloir désarmer le conflit, c’est s’opposer au refus
par Israël de respecter le droit international (qui affirme l’illégalité de l’acquisition de territoires par la force).
C’est refuser l’imposition manu militari de ses conquêtes
à travers la fixation unilatérale de « frontières », qui bafouent les droits et les aspirations légitimes des peuples palestinien, libanais et syrien. C’est imposer, y compris par des sanctions économiques, politiques et diplomatiques à Israël, une issue d’ensemble à cette tragédie régionale.
De Beyrouth bombardé, ma conviction est sortie renforcée que seule une conférence internationale fondée
sur l’application des résolutions de l’ONU peut établir
les conditions d’une paix juste et durable dans la région.
Bernard Ravenel
Publié dans L’Humanité du 8 août 2006
Source : http://www.humanite.fr/journal/2006-08-08/2006-08-08-834684