Ehoud Olmert a fini par céder. Empêtré dans plusieurs scandales financiers et crédité de 14 % d’opinions favorables, le premier ministre a annoncé mercredi qu’il quitterait son poste après la nomination de son successeur par son parti, Kadima, qui doit organiser une consultation sur cette question le 17 septembre prochain. Au sein même de son parti, les appels à sa démission s’étaient depuis quelques mois multipliés.
Il n’a jamais été populaire
Arrivé au pouvoir en 2006 en ayant pris la tête de la formation tout juste créée par Ariel Sharon pour accompagner le retrait de l’armée israélienne de Gaza, Olmert n’a jamais été populaire. Sa décision à l’été 2006 de lancer le pays dans une guerre désastreuse contre le Liban en représailles à des enlèvements de soldats israéliens a encore terni son image. Accusé, entre autres, d’avoir reçu, quand il était maire de Jérusalem, 150 000 dollars de l’homme d’affaires juif américain Boris Talansky, Olmert avait jusque-là refusé de quitter son poste. Il semble que cette fois la pression des enquêteurs, qui doivent de nouveau interroger le premier ministre aujourd’hui, et la menace de retrait du Parti travailliste, principal partenaire de Kadima au sein de la coalition gouvernementale, aient eu raison de sa résistance [1].
Le départ d’Olmert plonge Israël dans une période d’incertitude. Quatre ministres membres de Kadima sont candidats à sa succession mais la compétition devrait surtout opposer Tzipi Livni, actuelle ministre des Affaires étrangères, à Shaul Mofaz, ministre des Transports. Venue du Likoud, le parti de droite, pour rejoindre Sharon dans Kadima, Livni, surnommée Madame Propre en raison de son intégrité supposée, est la favorite. Mais elle est talonnée par Mofaz, ancien ministre de la Défense et chef d’état-major de l’armée, un partisan de la manière forte qui fait des appels du pied à la droite et va tenter de jouer sur l’inexpérience militaire de sa concurrente pour gagner. Une fois élu, ce qui pourrait ne pas être simple tant les tensions sont fortes au sein du parti, le dirigeant de Kadima sera nommé en remplacement d’Olmert. Il disposera alors de 28 à 42 jours pour se constituer une majorité à la Knesset, où Kadima ne dispose que de 29 sièges sur 120. Une gageure compte tenu du caractère hétéroclite de la coalition dirigée par Olmert. Déjà, Benjamin Netanyahou, le très droitier chef du Likoud, a estimé que « ce gouvernement est en bout de course, et peu importe qui sera à la tête du Kadima ». Largement favori dans les sondages, il réclame des élections anticipées. Un scénario que les observateurs jugent probable en raison des difficultés qu’aura le nouveau chef de Kadima à former une majorité au Parlement.
Le résultat de cette compétition aura des conséquences pour la région, où Olmert a fait quelques pas en direction d’un apaisement. Entamée cette année, les négociations indirectes avec la Syrie, qui viennent de clore leur quatrième cession en Turquie, ont été critiquées en Israël et rien n’indique que son successeur, quel qu’il soit, poursuive dans cette voie.
L’attitude d’Israël vis-à-vis de l’Iran
En ce qui concerne les négociations avec les Palestiniens, Netanyahou ou Mofaz sont hostiles à toute concession. Livni devrait se contenter de la politique de demi-mesures de son prédécesseur, qui a tout de même permis de briser le tabou du dialogue avec le mouvement islamiste palestinien Hamas, pour aboutir à la signature d’une trêve en juin dernier. Mais le principal sujet d’inquiétude est l’attitude d’Israël vis-à-vis de l’Iran. Beaucoup dans le pays sont partisans de la manière forte face à un régime qui ne cache pas sa volonté de rayer Israël de la carte. Face à la position plus conciliante adoptée par les États-Unis sur ce dossier, trois ministres, dont Livni et Mofaz, se sont rendus à Washington pour s’assurer que l’option militaire restait bien sur la table. Une victoire de Mofaz, qui en juin avait promis que,« si l’Iran poursuit son programme nucléaire, nous l’attaqueront », et plus encore de Netanyahou, risquerait de précipiter une action militaire qu’un changement d’administration à Washington pourrait rendre plus complexe.
Selon le Monde diplo L’après-Olmert a commencé
Le premier ministre israélien Ehud Olmert a annoncé, le 30 juillet, qu’il démissionnerait après le choix par le parti Kadima de son successeur, à l’occasion d’élections primaires prévues le 17 septembre. Si l’ancien maire de Jérusalem a fini par craquer, c’est en raison à la fois de son « échec sévère » — selon les termes du rapport de la commission Winograd — dans la conduite de la guerre du Liban de l’été 2006, et des multiples « pots de vin » que des témoins l’accusent d’avoir touchés.
L’après-Olmert comporte une incertitude et une certitude. L’incertitude concerne sa succession : compte tenu de l’âpre combat entre les deux principaux candidats, la ministre de la défense Tzipi Livni et l’ex-chef d’état-major Shaul Mofaz, rien ne garantit que Kadima parvienne à empêcher la tenue des élections législatives anticipées qu’exige le leader du Likoud, Benyamin Netanyahou. La certitude, c’est le coup fatal ainsi porté au soi-disant « processus de paix » d’Annapolis, censé permettre un accord global entre Israéliens et Palestiniens avant la fin de l’année. En réalité, la politique israélienne de colonisation, de bouclage et de répression interdit, sur le terrain, toute avancée vers la naissance d’un véritable Etat palestinien indépendant.
http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2008-07-31-L-apres-Olmert-a-commence