Les organisateurs, les sympathisants et les passagers ont pour but de mettre fin, de façon non violente, à la punition collective brutale imposée aux habitants de la bande de Gaza depuis 2006, quand le gouvernement israélien a commencé un blocus aérien, naval et terrestre rigoureux de la bande de Gaza, explicitement pour punir les habitants de Gaza d’avoir choisi un gouvernement Hamas lors d’élections démocratiques. Le Hamas et les gouvernements israéliens ont tué des civils sans discernement lors d’attaques répétées, mais l’immense majorité de ces attentats tout au long du conflit ont été perpétrés par les soldats et les colons israéliens sur des Palestiniens sans armes. J’ai été témoin d’une telle attaque, il y a deux ans, dans la bande de Gaza, sous les bombardements israéliens intensifs d’un quartier de civils, à Rafah.
En janvier 2009, je vivais dans une famille à Rafah, durant les derniers jours de bombardements de l’opération « Plomb durci ». Nous étions à quelques rues d’une zone qui était intensément bombardée. Utilisant ses stocks d’armes US, toujours réapprovisionnés, le gouvernement israélien cherchait à détruire les tunnels qui passent sous la frontière égyptienne et par lesquels de la nourriture, des médicaments, des matériaux de construction dont les Palestiniens avaient cruellement besoin, et peut-être aussi quelques armes, entraient dans la bande de Gaza en échappant à un blocus condamné internationalement.
Tout au long de cette épouvantable agression, Israël a pilonné les civils dans la bande de Gaza, transformant les villages, les maisons, les camps de réfugiés, les écoles, les mosquées et les infrastructures en tas de ruines. Selon l’organisation israélienne des droits de l’homme, B’Tselem, l’agression a tué 1385 Palestiniens, près d’un quart étant des mineurs, avec un nombre incalculable de personnes décédées dans les mois et années qui ont suivi, de malnutrition, de maladies, de désespoir suicidaire, conséquences d’un appauvrissement forcé sous un siège qui durait et envenimait les terribles blessures de Gaza, empêchant même de commencer à y reconstruire.
Tout ce que j’ai ressenti à l’époque, c’est que la population dans la bande de Gaza était horriblement prise au piège, presque paralysée.
Le jour du cessez-le-feu, quand le bruit des bombes s’est arrêté, mes jeunes amies ont insisté pour que nous nous rendions rapidement à l’hôpital Al Shifaa, à Gaza ville. Les médecins y étaient secoués et stupéfiés, après des jours à essayer de sauver des vies dans une salle d’urgences désespérément bondée, les pieds baignant dans des nappes de sang. Le Dr Nafez Abu Shabham, chef du service des grands brûlés à Al Shifa, a mis sa tête dans ses mains et nous a parlé, d’un ton incrédule. « Pendant 22 jours, le monde a regardé, » se lamentait-il, « et aucun pays n’a même essayé d’arrêter le massacre ».
Il pourrait bien, aujourd’hui encore, se mettre la tête dans les mains alors que beaucoup d’entre nous ont arrêté même de regarder. « Les groupes des droits de l’homme dans la bande de Gaza pressent les groupes humanitaires internationaux et les donateurs d’intervenir et apporter d’urgence une aide médicale aux hôpitaux palestiniens de la bande de Gaza, » écrit Al Jazeera dans un article du 14 juin. « Les officiels palestiniens affirment que les stocks de médicaments à Gaza sont presque épuisés, à un niveau critique. Ceci affecte les premiers secours, mais aussi tous les autres niveaux des procédures médicales. »
Après l’agression, je me suis rendue au foyer d’une jeune étudiante universitaire à Gaza ville avec deux de ses amies. C’était un désastre. Nous avons fouillé dans les verres brisés et les débris, espérant sauver quelques livres et textes. Leur vie avait été comme cela. Elles ont obtenu depuis leurs diplômes, mais il n’y a pas de travail. « La bande de Gaza entre dans sa cinquième année d’un blocus total par Israël, terrestre, aérien et maritime, avec un taux de chômage de 45,2 %, l’un des plus élevés au monde, » selon un rapport d’un organisme humanitaire des Nations-Unies (au 14 juin 2011). Sara Roy, diplômée de Harvard, note dans un article du 2 juin 2009 paru dans le journal étudiant Crimson d’Harvard, que :
« Gaza est un exemple de société qui a été délibérément réduite à un état de dénuement misérable, sa population autrefois productive a été transformée en une population d’indigents tributaires des aides... Après l’agression israélienne de décembre (2008), les conditions déjà critiques de Gaza sont devenues pratiquement invivables. Les moyens de subsistance, les maisons et les infrastructures publiques ont été endommagés ou détruits à une échelle que même les Forces de défense israéliennes ont reconnue injustifiable. A Gaza aujourd’hui, il n’y a pour ainsi dire aucun secteur privé, et il n’y a aucune industrie. »
Quand les bombardements ont cessé, nous avons visité les maisons et les villages où des gens sans armes avaient été tués. Sabrina Tavernise, du New York Times, allait confirmer plus tard que, dans le village d’Al Atatra, des soldats des FDI avaient tiré des missiles au phosphore blanc, à l’intérieur de la maison d’une femme nommée Sabah Abu Halemi, la brûlant cruellement et brûlant à mort son époux et trois de ses enfants. Je suis allée à l’hôpital, et j’ai vu un médecin palestinien passer avec gentillesse un temps grandement nécessaire, assis à son chevet, lui apportant un réconfort sans parler alors qu’elle lui avait saisi la main.
Nous ne devons pas nous détourner des souffrances de Gaza.
Nous devons continuer à essayer de communiquer avec les Gazaouis qui vivent sous le siège.
Il existe un certain risque lié à cette flottille. Le gouvernement israélien menace d’arraisonner chaque navire de la flottille avec des tireurs d’élite et des chiens d’attaque. Il y a un an, la marine israélienne a fait feu, depuis les airs, sur le navire turc, le Mavi Marmara, puis utilisé les réactions de ses passagers pris de panique pour justifier l’exécution de neuf militants, dont un jeune citoyen des États-Unis, Furkhan Dogan, touché à plusieurs reprises dans le dos et dans la tête, à bout portant. La marine a ensuite refusé de coopérer à l’enquête internationale.
L’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, équivalant à ce qui est reconnu au niveau international à un système d’apartheid, pourrait se terminer pacifiquement, si Israël abandonnait sa violence paranoïaque et raciale pour permettre la paix. L’apartheid a pris fin en Afrique du Sud sans la vague de sang et de vengeances que ses partisans prétendaient craindre comme excuse pour garder la richesse et le pouvoir que leur système leur permettait. Ils ont obtenu une paix et une sécurité plus grandes pour eux-mêmes et leurs descendants en trouvant le courage, enfin, de permettre la paix, la sécurité, et la liberté à leurs voisins. C’est une leçon que le gouvernement des États-Unis a trop souvent méconnue. Ce mois de juin, les gouvernements d’Israël et (surtout) des États-Unis doivent enfin trouver l’audace de l’espoir.