Paris, le 11 janvier 2013
Pascal de Izaguirre
Président du Groupe Nouvelles Frontières
Monsieur le Président,
L’AFPS vous avait adressé un courrier en date du 9 septembre 2009 à propos d’erreurs graves constatées au niveau de textes et cartes parus dans votre brochure Israël 2009 qui faisaient « une présentation fallacieuse d’Israël, sans aucune référence à l’existence de la Palestine, que ce soit à travers les cartes présentées ou les circuits proposés, alors même que ceux-ci passent par plusieurs villes de Cisjordanie »(dans ce que le Droit International appelait alors en 2009 « Territoires Palestiniens occupés ». )
Dans votre réponse du 24 /9/2009 vous indiquiez vouloir « prendre en considération » nos demandes et vous ajoutiez : « nous proposons de modifier les cartes de nos circuits... . Nous veillerons également à préciser à nos clients la traversée des villes situées en territoire palestinien ». En conclusion vous indiquiez que votre « objectif est de faire connaître l’histoire de ces régions dans toute leur richesse et complexité »
Force est de constater hélas que la majorité de nos demandes et votre objectif rappelé ci-dessus ne sont pas au rendez-vous dans les circuits proposés pour 2013, que ce soit dans vos catalogues ou sur votre site !
Nous prenons acte des modifications réalisées sur les cartes qui séparent clairement la Cisjordanie du territoire de l’Etat israélien et la bande de Gaza de celui de l’Etat égyptien. Dans un certain nombre de cas vous avez aussi remplacé Israël par Israël-Cisjordanie.
En revanche la présentation des circuits comporte encore de nombreuses anomalies ou lacunes dont vous trouverez une analyse détaillée en annexe à cette lettre. La plus flagrante étant l’absence systématique des termes Palestine et Palestiniens. Ce constat inacceptable, déjà mentionné dans notre premier courrier prend une dimension nouvelle depuis le 29 novembre dernier.
Comme vous le savez, le 29 novembre 2012, une décision historique de l’Assemblée générale de l’ONU a admis l’Etat de Palestine. Cette décision a été acquise à une énorme majorité : 138 États se sont prononcés pour, dont la France, et seulement 9 contre dont les États-Unis et Israël. L’État de Palestine est désormais admis à l’ONU, ce qui vaut reconnaissance de la Palestine en tant qu’État par l’instance suprême qui fixe les règles de l’ordre juridique international. Pour la communauté internationale, Gaza et la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est, ne sont donc plus des « Territoires Occupés » mais forment un seul territoire qui est la Palestine.
La Charte du Voyage présentée sur toute une page à la fin de vos catalogues sous le label Tourisme et Ethique, dont Jean-Christian Pinot Directeur des relations internationales de votre entreprise a été l’un des premiers signataires, est patronnée par le Ministère du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme. Aussi nous vous demandons de faire respecter la conformité des informations données à vos clients à cette Charte. Ces informations ne sauraient être en contradiction flagrante avec le Droit international comme c’est le cas aujourd’hui (résolutions de l’ONU et 4ème convention de Genève notamment).
Nous vous saurions gré de nous faire savoir les mesures que vous prendrez pour faire rectifier ces anomalies en contradiction flagrante avec le Droit international. A la fois sur votre site qui peut être corrigé très rapidement, puis sur les futures brochures que vous éditerez.
Dans cette attente, nous sommes à votre disposition pour une rencontre et nous vous prions de croire à l’expression de nos sentiments distingués.
François Leroux, pour le bureau national de l’AFPS.
Annexe 1 – Analyse des circuits proposés Brochure Circuits 2013
– Voyage « Terre d’Histoire » pages 134-135 :S’il comprend bien en en tête en page 135 « Israël-Cisjordanie » , il ne mentionne en introduction que « La terre d’Israël » et « l’avis de notre spécialiste d’Israël » sans aucune mention ni dans l’introduction ni dans le détail du circuit des mots Palestine ou Palestinien alors que le séjour de 8 jours passe par Haïfa, Nazareth, Jérusalem, Jéricho , Bethléem (en option)... villes (et régions) d’Israël et de Palestine où vivent 4,1 millions de Palestiniens :1,4 millions en Israël et 2,7 millions en Cisjordanie ( la bande de Gaza étant exclue de vos circuits).
– Voyage « Au fil du temps de Petra à Jérusalem » pages 138 et 139 : de la même façon l’introduction ne mentionne que 2 pays – Jordanie et Israël – et non 3 comme ceci devrait l’être puisque le circuit comprend une visite de la vieille ville de Jérusalem. De même, au J6 la frontière est celle de la Palestine et non celle d’Israël
Site internet
La rubrique circuit avec son menu déroulant de recherche ne comprend ni « Territoires palestiniens occupés » ni Palestine (terme à retenir aujourd’hui).
Les remarques sur les contenus des circuits « Terre d’Histoire » et « Au fil du temps de Petra à Jérusalem » figurent ci-dessus.
Enfin ces remarques concernent également les publicités insérées par vous dans d’autres médias : c’est en particulier le cas dans le spécial GEO de décembre sur Jérusalem, qui proposent le circuit "Terre d’Histoire" mentionné ci-dessus.
Annexe 2 – Recommandations générales
Au niveau des cartes la Bande de Gaza et la Cisjordanie doivent désormais être indiquées Palestine. En particulier Jérusalem-Est ne doit pas être intégré à l’Etat israélien. Sa représentation sur les cartes ne doit donc pas être identique à celle des capitales de la région (Le Caire, Amman, Damas, Tel-Aviv...), mais doit bien symboliser les parties occidentales et orientales de Jérusalem (rond ou carré avec 2 parties de couleur différentes par exemple). Ce qui n’est évidemment pas le cas sur les cartes officielles israéliennes, qui ne doivent donc pas être utilisées en l’état.
– Au niveau des textes, Bethléem, Jéricho, la vallée du Jourdain... et l’ensemble des villes ou sites situés en Palestine, ne doivent pas être présentés comme « sites majeurs d’Israël » mais présentés comme « sites de Palestine ». En particulier la plupart des sites historiques de Jérusalem étant situés à Jérusalem-Est, les textes sur ces sites ne doivent pas être intégrés à Israël et à son patrimoine, mais être rattachés au patrimoine de Palestine. En conformité avec la Charte du Voyage qui indique "Aider au respect de l’environnement, de la culture et du patrimoine du pays d’accueil". Et en accord avec votre " objectif " "de faire connaître l’histoire de ces régions dans toute leur richesse et complexité "
– Au niveau des photos : celles qui représentent les sites ou paysages situés dans l’Etat de Palestine sont souvent siglées Ministère Israélien du Tourisme (OT Israël). Ceci est anormal, et il doit donc y être mis fin.
– Au niveau des guides et des moyens d’hébergement. La charte du voyage indique « Participer au développement économique durable sur place ». L’Etat de Palestine subit les conséquences économiques dramatiques de l’occupation et de la colonisation. Le secteur touristique israélien confisque à son seul profit de nombreux sites antiques situés en Palestine et ne fait que très rarement travailler les guides et les hôtels palestiniens, notamment ceux de Jérusalem-Est ou de Bethléem. Dans l’esprit de cette Charte, Nouvelles Frontières ne doit pas cautionner cette pratique mais au contraire faire travailler les structures palestiniennes en Palestine.