Pendant la dernière guerre contre Gaza, j’ai été obligé de prendre en considération le fait que ma maison pouvait être détruite par un missile alors que nous étions encore à l’intérieur. Et je pourrais être enterrée sous les décombres. Je pourrais vivre. Je pourrais mourir. Je pourrais vivre en perdant une partie de mon corps. Je pourrais perdre un membre de ma famille, ou tous les membres de ma famille. Je pourrais vivre mais être dans le coma. Peut-être que ma famille me perdrait. Nous pourrions nous perdre les uns les autres. De nombreux "si" et "peut-être" ont dominé mes pensées pendant cette période.
Tous les matins, je me réveillais et je regardais des vidéos réalisées par des Palestiniens et des médecins expliquant comment survivre si vous êtes pris sous les décombres et que vous avez la chance d’être en vie. Lorsque les frappes aériennes lourdes étaient près de ma maison, chacun d’entre nous dans ma famille préparait un petit sac au cas où nous devions nous échapper de la maison pour nous sauver. Dans un moment de silence, un moment de deuil, je me suis sentie triste du fait que nous abandonnions nos souvenirs sans le vouloir. Un petit sac rempli de documents et de papiers officiels ne nous définit pas. Devons-nous vraiment prendre ce petit sac et laisser la maison elle-même derrière nous ? Qu’en est-il de mes affaires et de ma bibliothèque ? Et le jardin de mon père ? Les citronniers, les pommiers et les oliviers derrière ma fenêtre ?
J’aimerais que les habitants de Gaza puissent déraciner nos maisons et les déplacer loin de ce bombardement monstrueux. Ou au moins avoir obtenu la possibilité de cacher nos proches dans des endroits secrets jusqu’à la fin de l’escalade.
La guerre de 11 jours m’a ramené en 2014, lorsque la guerre a duré 51 terribles jours. A l’époque, ma famille et moi avions dû quitter notre maison à cause des frappes aériennes. Si j’avais su que ce serait la dernière fois que je verrais cette maison, j’aurais dit au revoir. Mais la maison, y compris tous nos chers souvenirs, a été pulvérisée par un missile F-16 comme si elle n’avait jamais existée. Cette horreur nous hante encore aujourd’hui. La guerre n’a pas cessé depuis.
Je pensais que tout serait terminé une fois le cessez-le-feu entré en vigueur, mais comme d’habitude, je me suis trompée. La ville a été déformée. 243 personnes, dont plus de 100 femmes et enfants, ont été tuées. Plusieurs familles ont été rayées du registre civil à côté de bâtiments endommagés et en ruine. Et je suis censé faire face à tout cela ?
Pendant la guerre, cette croyance m’a traversé l’esprit et s’est installée - que peut-être si je mourais maintenant, Allah serait miséricordieux envers moi même si je n’étais pas prêt à le rencontrer. Au moins, je ne vivrais pas dans la peur et la terreur en m’attendant à recevoir un missile sur la tête à tout moment.
Le cessez-le-feu a été déclaré et la vie tente de redevenir normale. Malheureusement, les roquettes me suivent toujours dans mon sommeil. Depuis le cessez-le-feu, et jusqu’à ce jour, je fais toujours des cauchemars de cette guerre sans fin. Chaque fois que je vais me coucher, je vois la mort d’un être cher, la destruction d’un endroit qui m’est cher, et moi courant seule pour essayer de me sauver des missiles. Chaque fois, je me réveille en sueur, paniquée et remerciant Allah que ce ne soit qu’un cauchemar. Et je suis sûre que c’est la même chose pour tous ceux qui vivent à Gaza en ce moment.
Il y a deux jours, j’ai fait un horrible cauchemar. Je criais à l’aide, et les missiles ne s’arrêtaient pas. Il y avait un homme qui essayait de protéger sa famille ; je pleurais et je lui ai dit de s’enfuir, mais il m’a regardé et m’a dit : "C’est ma maison, si je suis destiné à mourir, je mourrai dedans." C’est bizarre comme les cauchemars me relient à des personnes que je n’ai jamais rencontrées auparavant, mais nous partageons tous la même douleur.
Aujourd’hui, l’horrible cauchemar s’est déroulé comme suit : J’étais à mon université, l’endroit le plus cher à mon cœur, il faisait nuit noire et les bâtiments étaient tous détruits au sol. Apparemment, dormir n’est plus mon réconfort.
Chaque cauchemar me montre une réalité plus horrible que la précédente. Dormir, qui était ma tranquillité après de nombreux matins horribles, est maintenant ce que j’essaie d’éviter. Je ne pense pas que je guérirai un jour de la guerre, ni que les cauchemars cesseront de me hanter.
Traduction : AFPS