"Les événements de Jéricho ne sont pas un simple fait divers. Ils ont une
signification politique. Le premier visé est certes Mahmoud Abbas. A
peine avait-il quitté son pays que l’assaut contre la prison était lancé
par les forces israéliennes. C’est la déstabilisation délibérée d’un
homme dont les Israéliens n’ont jamais vraiment voulu comme
interlocuteur, alors qu’ils avaient déjà assiégé son prédécesseur et
l’avait assigné à surveillance.
Le second visé est le Conseil législatif palestinien. On n’a pas assez
dit que Ahmed Saadat, le prisonnier recherché, était un élu récent du
CLP.
Et si le Hamas a fait depuis les élections législatives de 2OO6 de
timides pas vers la voie de reconnaissance de l’Etat d’Israël en ses
frontières de 1967, les images humiliantes de prisonniers à moitié nus,
yeux bandés et poignets attachés derrière le dos qui ont fait le tour du
monde, l’empêche désormais d’aller plus loin.
Mais l’Europe est visée
aussi, et toute sa politique à l’égard de la Palestine.
Nous nous apprêtions à recevoir Mahmoud Abbas à Strasbourg et nous voilà
sans lui. Non seulement la visite est annulée, mais les Européens sont
devant un spectacle navrant : ce sont des Palestiniens qui kidnappent
leurs ressortissants et qui saccagent les bureaux de l’Union européenne.
Et certains députés de cet hémicycle commencent à s’interroger ; faut-il
vraiment continuer à aider les Palestiniens après cette ingratitude-
alors que nous sommes les premiers donateurs ?
Mais ne vous y trompez pas, mes chers collègues, ce n’est pas une
question d’argent. Je vous le dit : même si les Palestiniens ont
désespérément besoin d’aide pour survivre, il n’y en a pas un qui ne
l’échangerait sans regret pour une position politique claire et forte de
l’Union européenne !
Pouvons nous taire aujourd’hui qu’Israël a choisi
est une voie unilatérale et sécuritaire qui n’a plus rien à voir avec la
feuille de Route ?
Le plan Olmert est unilatéral comme l’était le désengagement
de Gaza, l’annexion de la rive du Jourdain, la main mise sur Jérusalem
Est.
C’est cela la réalité des Palestiniens : une interminable et sanglante
occupation, un Mur condamné par la cour de la Haye mais toujours debout.
Tout l’argent que nous donnerons à la Palestine ne lui permettra pas
d’échapper à cette réalité : la paix marche aujourd’hui à reculons.
C’est pourquoi, s’il faut un plan B pour soutenir financièrement la
Palestine, un plan compatible avec nos règles de transparence et nos
exigences éthiques, il faut surtout une riposte politique courageuse et
crédible aux derniers événements !
Si l’Europe reste silencieuse, comment
pourrait-elle encore être porteuse d’un message d’espoir ?"
Véronique De Keyser