Mahmoud Abbas, à New York, le 25 septembre, lors de l’Assemblée générale de l’ONU.
La Palestine à l’ONU, acte II : en 2011, le 23 septembre, Mahmoud Abbas était monté à la tribune des Nations unies pour demander au Conseil de sécurité de reconnaître formellement l’indépendance de l’Etat de Palestine. Cette année, le président de l’Autorité palestinienne, qui s’exprimera le 27 septembre à New York, effectuera une démarche similaire, mais cependant très différente : l’ambition n’est plus d’obtenir un statut d’Etat membre à part entière de l’ONU, mais de se contenter de celui d’" observateur permanent ".
Un tel statut, identique à celui de l’Etat du Vatican, représenterait un succès politique et symbolique pour les Palestiniens, mais qui risque d’être de courte durée, tant il est probable qu’Israël sanctionnera une telle initiative, sans que celle-ci change en quoi que ce soit la réalité concrète de l’occupation israélienne. En un an, les espoirs des Palestiniens de convaincre les membres du Conseil de sécurité de concrétiser par un vote leur soutien de principe à un Etat palestinien se sont évanouis.
La plupart des pays européens ont adopté la position des Etats-Unis, pour qui un Etat palestinien ne peut naître qu’en point d’orgue d’un règlement de paix négocié entre Israéliens et Palestiniens, et non à la suite d’une démarche " unilatérale " palestinienne. Cette seconde tentative de Mahmoud Abbas devrait être couronnée de succès : sa demande est présentée devant l’Assemblée générale de l’ONU, où les Palestiniens disposent d’une large majorité, et où il n’existe pas de veto.
Saëb Erakat, le principal négociateur palestinien, a indiqué qu’il comptait sur le soutien de 150 à 170 pays sur les 194 Etats représentés à l’ONU. " Nous voulons remettre la Palestine sur la carte, sur les lignes de 1967 - avec les territoires qui ont été conquis par Israël au cours de cette guerre - , avec Jérusalem-Est pour capitale ", a-t-il précisé. Présentée jeudi, la demande palestinienne sera vraisemblablement formalisée ultérieurement, sans doute le 29 novembre, date de la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien.
Un tel délai répondrait au souci de ne pas embarrasser Barack Obama avant le scrutin présidentiel américain du 6 novembre. Dans la mesure où il ne s’agit plus de reconnaître la Palestine comme Etat de plein droit, la Maison Blanche aura du mal à justifier un refus de lui accorder un statut d’observateur, alors que M. Obama n’a cessé de soutenir le principe de deux Etats, l’un israélien, l’autre palestinien. S’il acceptait, alors que l’Etat juif est hostile à toute forme de reconnaissance de la Palestine à l’ONU, le candidat Obama ferait le lit de son adversaire républicain, Mitt Romney, qui l’accuse de vouloir " jeter Israël sous un bus ".
Représailles potentielles
Or les Palestiniens n’ont aucun intérêt à favoriser une victoire du candidat républicain. M. Romney assurait dans une vidéo pirate diffusée le 18 septembre que ces derniers " ne s’intéressent absolument pas à la paix ". S’il est élu, il a promis de ne pas intervenir pour relancer le processus de paix interrompu depuis septembre 2010. Que peuvent-ils espérer d’un statut d’observateur permanent ? Adhérer à un certain nombre d’Agences onusiennes et sans doute également poursuivre des responsables israéliens devant la Cour pénale internationale (CPI).
Mais Israël ne restera pas les bras croisés : ses représailles potentielles vont de l’arrêt du remboursement à l’Autorité palestinienne des droits de douane que l’Etat juif perçoit en son nom, à l’annexion pure et simple de la vallée du Jourdain ou des " blocs de colonies " juives en Cisjordanie. Une telle punition aurait cependant un effet boomerang : l’Autorité palestinienne traverse une grave crise financière qui s’est traduite par une grogne sociale sans précédent, laquelle fragilise non seulement le premier ministre palestinien, Salam Fayyad, mais aussi M. Abbas.
Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a reconnu qu’accentuer cette évolution reviendrait à renforcer la position du Hamas en Cisjordanie, un scénario catastrophe pour Israël. Les Palestiniens se rendent donc à l’ONU en désespoir de cause, en faisant semblant de croire qu’une fois leur objectif atteint, il sera possible de reprendre, sur une meilleure base, des négociations avec Israël. Or il paraît douteux que d’une telle tentative renaisse un processus vertueux, et pacifique.