Le 12 novembre 2006, Adalah a présenté une réponse à une pétition déposée devant la Cour Suprême d’Israël par les habitants de la ville juive de Kamoun, située en Galilée, dans le nord d’Israël. Adalah a déposé la réponse au nom des habitants du village arabe de Kammaneh (le comité local de Kammaneh), l’un des trois défendeurs. Dans la pétition, les habitants de Kamoun requièrent l’annulation du plan directeur pour le village voisin de Kammaneh, à moins que trois exigences ne soient remplies. Dans sa réponse à la pétition, Adalah a argué que ces exigences sont racistes et rappellent l’ancien régime d’apartheid en Afrique du Sud. L’avocat d’ Adalah, Suhad Bishara, représente les habitants de Kammaneh.
La pétition a été déposée par les habitants de Kamoun le 24 juillet 2006, dans la foulée de la publication du plan directeur de Kammaneh approuvé par le Conseil national de la Planification et de la Construction (NCPB) le 19 juin 2006. Les autres défendeurs sont le NCPB et le Conseil de la Planification et de la Construction du district nord.
Les trois exigences racistes des habitants de Kamoun, ainsi que le présente Adalah dans sa réponse, sont :
1. "Le nettoyage de Kamoun de ses habitants arabes."
Les habitants de Kamoun ont exigé que le plan directeur de Kammaneh inclue une "solution" pour une famille arabe, les Shahade, qui vivent actuellement à Kamoun, à savoir qu’il fallait les reloger à Kammaneh. Cette famille vit sur des terres qui sont à l’intérieur des limites de Kamoun depuis le début du 19ème siècle, bien longtemps avant la naissance de la ville, dont elles sont la propriété depuis.
Depuis des années, des membres de la famille essaient d’obtenir un permis pour construire sur leur terre ; en vain, bien que leur terre soit constructible selon le plan directeur de la ville.
Dans la réponse, Adalah a argué que conditionner l’approbation du plan directeur pour Kammaneh au relogement de la famille Shahade est arbitraire et illégal. Cette exigence constitue une tentative de lier la réalisation des droits élémentaires des habitants de Kammaneh au relogement de familles arabes qui vivent à Kamoun. Adalah a aussi argué que cette requête implique l’imposition d’un système d’apartheid par le biais de l’exploitation des procédures de planification et de construction, en empêchant les familles arabes de vivre dans la ville.
2. La construction d’une route à l’usage exclusif des habitants de Kammaneh.
Cette demande concerne l’asphaltage d’une route de contournement pour éviter Kamoun, afin de ne pas forcer ses habitants juifs à passer sur la même route que leurs voisins arabes de Kammaneh. Adalah a fait savoir que la position du NCPB est que la route existante a été prévue, en terme de transport, pour les besoins des deux villes. Adalah a affirmé que, même si une nouvelle route s’avérait nécessaire, on ne peut faire dépendre l’approbation du plan directeur pour Kammaneh d’une route "réservée" à Kamoun.
3. La sauvegarde à long terme d’une majorité juive sur le "Mont Kamoun".
Dans la pétition, les habitants de Kamoun ont affirmé que le plan directeur du village de Kammaneh empêchera l’expansion future du plan directeur de Kamoun. Adalah a néanmoins argué que le plan directeur de Kammaneh n’empêchera pas l’ expansion de Kamoun, puisque le plan directeur proposé pour l’expansion de Kamoun, joint à la pétition par les habitants de Kamoun , n’est pas conçu selon un calcul de la superficie de la terre dans le plan directeur de Kammaneh.
Adalah affirme qu’il y a d’autres raisons derrière cette pétition, qui sont révélées dans un certain nombre de documents produits avant la pétition, y compris une lettre du comité municipal de Kamoun envoyée en janvier 2006 au responsable du Conseil de la Sécurité nationale. On y trouve la déclaration que "l’expansion actuelle du village de Kammaneh met en danger l’équilibre sensible entre les habitants des deux villes, Juifs et Bédouins". Dans la même lettre il y a aussi cette question : "Nous nous sommes détournés de la réalisation du sionisme et du rêve de judaïsation de la Galilée, pour devenir un facteur non contraignant qui ne préoccupe personne dans l’appareil décisionnel de l’Etat ; alors, est -ce que la judaïsation de la Galilée fait toujours partie des buts de l’Etat d’Israël ?"
Le contexte historique de Kammaneh et "Kamoun".
Le village de Kammaneh a été établi en 1810, quand la famille Sawaed a pris possession de la terre sur le Mont Kamoun. Le village a été reconnu par le gouvernement israélien en 1995. Des plans directeurs ont été élaborés mais ces plans excluaient deux quartiers du village de ses limites juridictionnelles (ce qui fait 50% des terres du village). En novembre 1999, Adalah a déposé une pétition devant la Cour Suprême (H.C. 7960/99, Hashem Sawa’ed, et al. v. Misgav Regional Council, et al.), dans l’espoir d’une reconnaissance officielle du quartier d’ al-Jelasi et de son inclusion dans le nouveau plan directeur pour Kammaneh.
Dans la pétition, Adalah et les habitants d’Al-Jelasi arguaient que l’exclusion de leur quartier des limites du plan directeur était une grave violation de leurs droits à l’égalité et la dignité, à la propriété et au logement.
La Cour a accepté la pétition en septembre 2001, donnant instruction au Comité de la Planification du District nord de soumettre un plan d’expansion aux plans directeurs, dans les 18 mois. Mas les autorités de la planification n’ont pas respecté leurs obligations, aucun plan pour inclure al-Jezali dans les limites officielles de Kammaneh n’a été soumis ni approuvé. C’est le 9 décembre 2005 - plus de quatre ans après que la Cour Suiprême en eut donné l’ordre et après qu’Adalah eut déposé une motion pour outrage au tribunal au nom des habitants d’ al-Jelasi - que les autorités de planification compétentes ont soumis un plan étendu pour Kammaneh qui incorporait al-Jelasi, et en permettait ainsi la reconnaissance officielle.
La ville de Kamoun a été établie en 1981, quand un certain nombre de familles juives ont commencé à construire des maisons sur le Mont Kamoun, sans permis de construire, et en l’absence d’un plan approuvé.
Un plan directeur pour Kamoun a été approuvé en 1984, ce qui a rendu possible la délivrance de permis à des familles juives. Le plan directeur comprenait des lopins de deux dunams (2000 m²) pour chaque famille et créait les conditions d’une planification de haut niveau pour la ville. Depuis, trois plans directeurs consécutifs pour Kamoun ont été approuvés.