Photo : Le poste-frontière de Rafah entre l’Egypte et la bande de Gaza, le 19 octobre 2023 - Crédit : Plestia Alqata (Instagram)
Le poste-frontière égyptien de Rafah, dans la province du Nord-Sinaï, autrefois agitée, reste fermé au moins jusqu’au vendredi 20 octobre, sans que l’on sache exactement quand il sera ouvert pour permettre l’acheminement des secours et de l’aide aux Palestiniens en détresse de la bande de Gaza, qui subissent une guerre brutale de la part d’Israël.
Entre-temps, des centaines de militants et d’habitants du Nord-Sinaï ont entamé un sit-in ouvert du côté égyptien du point de passage, passant déjà la nuit dans des tentes pour le troisième jour consécutif. Ils promettent de rester là jusqu’à ce que les Palestiniens de Gaza aient accès aux besoins de première nécessité.
Le 10 octobre, l’Égypte a fermé le poste frontière de Rafah avec Gaza jusqu’à nouvel ordre, après que des frappes aériennes israéliennes ont touché le point de passage du côté palestinien. Le poste frontière a été bombardé à plusieurs reprises par des frappes aériennes israéliennes. La dernière a eu lieu le 16 octobre et a endommagé la structure du côté égyptien.
Le poste frontière de Rafah est la seule connexion de la bande de Gaza avec le monde extérieur.
Des promesses non tenues
Les manifestants, dont beaucoup sont des étudiants d’universités situées dans la province du Nord-Sinaï, ainsi que des travailleurs humanitaires et des chauffeurs de camions transportant de l’aide, ont adopté le slogan « Camper jusqu’à ce que l’aide soit livrée », alors que les convois d’aide s’entassent dans la ville de Rafah, dans le Nord-Sinaï, en attendant l’autorisation de passer à Gaza pour fournir de l’eau, de la nourriture, des fournitures et des médicaments aux milliers de Palestiniens en détresse de l’autre côté de la frontière.
« Nous resterons dans nos tentes et nous ne partirons pas avant que les convois d’aide n’atteignent notre communauté à Gaza », a déclaré un manifestant à The New Arab sous le couvert de l’anonymat.
Les jeunes du Sinaï ont appelé les dirigeants du monde entier à ouvrir immédiatement le poste frontière dès qu’ils le pourront afin de permettre aux ambulances égyptiennes à l’intérieur de Gaza de transporter les blessés vers les hôpitaux du Nord-Sinaï et les autres cas graves vers les grands hôpitaux de la capitale, Le Caire, pour qu’ils y soient soignés.
Jeudi 19 octobre, des milliers de tonnes d’aide envoyées par plusieurs pays du monde entier attendaient d’entrer dans la bande de Gaza, s’entassant sur le poste frontière après que le président américain Joe Biden eut conclu un accord avec l’Égypte et Israël dans la nuit pour permettre l’entrée des secours.
Vendredi, à près de minuit, les autorités frontalières égyptiennes ont enlevé les barrières de ciment qu’elles avaient précédemment construites à la frontière, ce qui laissait supposer que la frontière serait bientôt accessible.
Toutefois, à l’heure où nous publions ces lignes, nous ne savons toujours pas quand exactement les habitants de Gaza pourront accéder à l’aide et aux secours par la frontière égyptienne, compte tenu des promesses officielles contradictoires et non tenues.
Théories du déplacement
L’Égypte et Israël sont officiellement en paix depuis 1978 et entretiennent d’étroites relations diplomatiques et économiques. Mais le peuple égyptien est depuis longtemps en conflit avec les régimes successifs du pays au sujet de la normalisation. En effet, nombreux sont ceux qui considèrent Israël comme un colonisateur de la Palestine depuis la guerre de 1948, un oppresseur du peuple palestinien et un ancien occupant de la péninsule du Sinaï.
Le gouvernement égyptien s’est souvent inquiété d’un éventuel exode massif de Palestiniens contraints de choisir entre la mort sous les bombardements israéliens et le déracinement de leur terre.
Les théories du complot, apparues dans les années 1950, ont toujours laissé entendre que l’Égypte pourrait céder une partie du Nord-Sinaï aux habitants de Gaza pour qu’ils y construisent un État.
Récemment, le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi Sisi a suscité la controverse en déclarant, lors d’une conférence de presse conjointe avec le chancelier allemand Olaf Scholz au Caire, que les habitants de Gaza pourraient être déplacés dans le désert israélien du Néguev : « Jusqu’à ce qu’Israël soit capable de vaincre le Hamas et le Jihad islamiste. Ensuite, les Palestiniens pourraient retourner dans leur patrie. »
« Un déplacement vers le Sinaï signifie que les attaques contre Israël sont déplacées vers les territoires égyptiens, ce qui menace la paix entre Israël et un pays de 105 millions d’habitants [l’Égypte] », a déclaré publiquement M. Sisi.
Depuis 2007, l’Égypte et Israël imposent un blocus strict à Gaza après que le Hamas a pris le pouvoir à la suite d’affrontements avec la faction rivale du Fatah qui dirige la Cisjordanie occupée.
Ce n’est que près d’une décennie plus tard, lorsque le Hamas a cessé d’être affilié aux Frères musulmans, un groupe légalement interdit en Égypte depuis 2014, que le régime égyptien a adouci son ton à l’égard de la faction palestinienne.
Traduit par : AFPS