La chasse à l’homme a duré près de deux semaines et s’est finalement terminée alors qu’Udai Tamimi continuait à tirer avec son arme de poing sur les soldats israéliens, même s’il était allongé sur le sol dans ses derniers instants.
Le 8 octobre, Udai Tamimi a tiré en voiture sur le poste de contrôle militaire de Shu’fat, tuant un soldat israélien avant de se retirer indemne et de disparaître dans le camp de réfugiés de Shu’fat. La chasse qui s’ensuivit fut l’une des plus vastes campagnes de recherche et d’arrestation de l’histoire récente, l’armée israélienne assiégeant l’ensemble du camp de réfugiés et la ville voisine d’Anata.
La solidarité communautaire et les efforts populaires et citoyens pour lutter contre les recherches de l’armée ont été incessants. Les habitants du camp de réfugiés de Shu’fat ont lancé et mené une campagne de désobéissance civile, affrontant l’armée dans les rues, érigeant des obstacles sur les routes pour entraver les mouvements de l’armée et tentant de couvrir Tamimi en demandant à tous les jeunes hommes du camp de se raser la tête pour ressembler à l’apparence du résistant recherché. Pendant dix jours, Tamimi a non seulement échappé à la capture mais a réussi à quitter le camp sans être détecté, dans ce qui semble être un échec spectaculaire de l’appareil de sécurité israélien.
Dans la nuit du mercredi 19 octobre, Tamimi est réapparu loin de chez lui, à l’entrée de la colonie israélienne illégale de Maale Adumim, en Cisjordanie occupée, où il a ouvert le feu sur les soldats qui montaient la garde à l’entrée de la colonie, en en blessant un selon l’aveu de l’armée israélienne.
Une vidéo circulant sur les réseaux montre les derniers instants de Tamimi, qui continue de tirer sur les gardes pendant trente secondes, même après avoir été blessé par plusieurs balles et être tombé au sol, avant d’être finalement abattu.
L’appel de la "Tanière des Lions"
Quelques heures après l’annonce de la mort de Tamimi, le groupe de résistance armée Areen al-Usud ("la Tanière des lions" ou "l’Antre des lions"), basé à Naplouse, a publié une déclaration concernant la mort de Tamimi et appelant les Palestiniens de Naplouse et de toute la Cisjordanie à sortir "sur les toits, dans les rues et partout pour saluer le héros de la Palestine" à 12h30 le 20 octobre. Et les Palestiniens ont répondu à leurs appels.
Dans les villes de Naplouse, Jénine, Ramallah, Bethléem, ainsi que dans les villes et villages de Cisjordanie, les Palestiniens sont descendus dans la rue, scandant des slogans de soutien à Tamimi et à la Tanière des Lions, jurant d’affronter l’occupation israélienne et de poursuivre sur la voie d’al-Tamimi. Les Palestiniens du camp de réfugiés de Jabaliya, dans la bande de Gaza assiégée, sont également descendus dans la rue pour dénoncer le meurtre de Tamimi.
Dans le camp de réfugiés de Shu’fat, dont Tamimi était originaire, des milliers de Palestiniens sont descendus dans la rue après son assassinat, en signe de soutien à Tamimi et à la résistance armée palestinienne. Des affrontements ont éclaté en plusieurs endroits de Cisjordanie, les forces israéliennes réprimant les manifestants palestiniens à coups de gaz lacrymogènes, de balles en caoutchouc et de balles réelles.
La Tanière des Lions, un groupe de résistance relativement nouveau qui semble avoir vu le jour après l’assassinat d’Ibrahim al-Nabulsi cet été, a vu sa popularité et son influence monter en flèche en Cisjordanie et à Jérusalem ces dernières semaines, ses membres ayant continué à revendiquer des dizaines d’opérations de tir visant des cibles militaires israéliennes en Cisjordanie.
Promettant de riposter au meurtre de Tamimi, qui n’était pas un affilié connu du groupe, le Lion’s Den a déclaré qu’il répondrait avant l’aube jeudi. À 4 heures du matin, le groupe a publié une autre déclaration indiquant qu’il avait mené au moins trois opérations pendant la nuit, tirant sur trois positions militaires israéliennes distinctes dans la région de Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie.
Les médias palestiniens ont également rapporté que des coups de feu ont été tirés vers 12 h 30 en direction du kibboutz illégal de Meirav, à l’est de Jénine, juste de l’autre côté de la ligne verte. Le Lion’s Den n’a pas revendiqué l’opération, ce qui indique que d’autres groupes armés de Cisjordanie occupée répondent à l’appel du groupe à des représailles collectives.
"Le sang d’Udai Tamimi et des martyrs de Palestine est devenu le combustible d’un volcan que seul Dieu éteindra", a déclaré le groupe. "Nous disons à l’occupant, nous verrons qui assiégera qui", poursuit la déclaration, semblant faire référence au blocus de neuf jours du district de Naplouse, qui se poursuit depuis que Lion’s Den a revendiqué une opération le 11 octobre qui a fait un mort parmi les soldats israéliens.
Grève générale : les Palestiniens se joignent à l’appel
Suite aux appels lancés par les Lion’s Den pour une "journée de rage" contre l’occupation jeudi, les factions politiques palestiniennes se sont unies pour annoncer qu’une grève générale aurait lieu jeudi en Cisjordanie et à Jérusalem en signe de deuil après le meurtre de Tamimi.
Les entreprises locales, les écoles, les universités, les bureaux gouvernementaux et les réseaux de transport public ont été complètement fermés jeudi, alors que des millions de Palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem ont participé à la grève.
Les factions ont également exhorté les Palestiniens à descendre dans la rue et à affronter l’armée et l’occupation israéliennes au sujet du meurtre de Tamimi. Des manifestations sont attendues en Cisjordanie et à Jérusalem jeudi et vendredi, alors que les Palestiniens répondent à ces appels.
Les tensions en Cisjordanie et à Jérusalem ont atteint un point d’ébullition, après des semaines de violence de la part de l’armée israélienne et des colons dans le territoire occupé, qui ont entraîné la mort de 17 Palestiniens depuis le début du mois d’octobre.
Udai aurait laissé derrière lui un dernier testament manuscrit, dont l’image a circulé sur les réseaux sociaux.
Voici les mots qu’il a laissés derrière lui :
"Je suis le recherché Udai Tamimi, du camp des martyrs de Shu’fat. Mon opération au poste de contrôle militaire de Shu’fat n’était qu’une goutte d’eau dans l’océan bouillonnant de la lutte. Je sais que je serai martyrisé tôt ou tard, et je sais que je n’ai pas libéré la Palestine avec cette opération. Mais je l’ai menée avec un objectif clair, à savoir que l’opération incitera des centaines de jeunes à prendre le fusil après mon départ. Udai, le pourchassé, le 11 octobre."
Traduction et mise en page : AFPS / DD