Samuel P. Huntington, professeur de Harvard, est célèbre pour son livre publié en 1996 « Le Choc des civilisations ». Il a été interviewé par Amina R. Chaudary de magazine d’Islamica, sur la situation actuelle du Moyen-Orient.
Votre théorie sur le choc des civilisations avance qu’il faut comprendre la politique globale actuelle comme le résultat de conflits profonds entre les grandes cultures et religions du monde. Cette thèse a gagné du terrain après le 11 septembre 2001, et la guerre contre le terrorisme est maintenant souvent définie, en termes de la guerre de l’Occident contre l’Islam, comme un choc fondamental entre ces deux civilisations. Estimez-vous que votre thèse a été employée correctement quand on décrit la guerre contre le terrorisme comme une guerre de l’Occident contre l’islam ? Sinon, quelles modifications de cette application apporteriez-vous ?
Huntington : L’argument sur la guerre des civilsations que je développe a été bien repris dans une courte citation qui dit que dans les 10 ans à venir réflèteront très probablement les engagements culturels, les liens culturels et les antagonismes avec les autres pays. Il est tout à fait évidemment que le pouvoir continuera à jouer un rôle central dans la politique globale, comme il le fait toujours. Mais il y a d’habitude autre chose derrière des conflits. Au XVIIIème siècle en Europe, les problèmes impliquaient dans une large mesure la question de la monarchie, celui de la monarchie contre les mouvements républicains naissants, d’abord en Amérique et puis en France. Au XIXème siècle, ce fut surtout la nationalité et la tentative de certains de définir le nationalisme et de créer des Etats qui reflèteraient ce nationalisme. Au XXème siècle, l’idéologie a pris le dessus, en grande partie, mais pas exclusivement, en raison de la révolution russe. Et nous avons eu le fascisme, le communisme et la démocratie libérale qui se faisaient concurrence. Bon, ça, c’est quasiment fini. Les deux autres (le communisme et le fascisme) n’ont pas totalement disparu mais sont certainement marginalisés et on en est venu à accepter la démocratie libérale, en théorie au moins, partout dans le monde. Ainsi la question est vraiment de savoir ce qui sera au centre de la politique globale dans les prochaines décennies et j’affirme que ce sont les identités culturelles, les antagonismes culturels et les affiliations qui joueront un rôle, pas le seul mais un rôle très important. Les pays coopèreront et il est vraisemblable que leur coopération sera plus forte si leurs cultures sont semblables, comme le montre de façon spectaculaire l’Union européenne. Mais d’autres groupes de pays émergent en Asie du Sud-est et en Amérique du Sud. A la base, comme je l’ai dit, ces politiques s’articuleront en grande partie sur des similarités et des antagonismes culturels.
Alors, si votre thèse explique complètement les relations entre les Etats après le 11-septembre, comment expliquez vous, par exemple, l’alliance entre le Pakistan et les Etats-Unis contre l’Afghanistan ? Ou d’autres relations similaires ?
Huntington : De toute évidence le Pakistan et les Etats-Unis sont des pays très différents mas nous avons des intérêts géostratégiques communs -empêcher le communisme de s’emparer de l’Afghanistan- aussi, maintenant que le Pakistan a un gouvernement avec lequel nous pouvons coopérer bien que ce soit un gouvernement militaire, nous travaillons ensemble à la promotion de nos intérêts communs. Nous avons bien sûr des divergences avec le Pakistan sur un certain nombre de points.
Vous avez écrit : "Pendant 45 ans, le Rideau de Fer fut la ligne de division centrale en Europe. Cette ligne s’est déplacée à des centaines de kilomètres vers l’est. C’est maintenant la ligne qui sépare les peuples du christianisme occidental, d’une part, des peuples musulman et orthodoxe de l’autre." En réaction à cette analyse, des intellectuels ont déclaré qu’une distinction aussi dichotomique entre l’ouest et l’islam implique qu’il existe une grande uniformité entre ces deux catégories. Certains ajoutent que cette distinction implique que l’islam n’existe pas en Occident. C’est une critique que l’on vous a souvent faite. Comment y réagissez vous en général ?
Huntington : Cette implication que font certaines personnes est totalement erronée. Je ne dis pas que l’Occident est uniforme. Évidemment, il y a des divisions à l’intérieur de l’Occident et des divisions dans le monde musulman. Il y a différentes sectes, des communautés différentes, des pays différents . Ainsi aucun des deux n’est homogène. Mais ils ont des choses en commun. Partout les gens parlent de l’Islam et de l’Occident. Vraisemblablement, cela a un certain rapport avec la réalité, que voilà des entités qui ont une signification, et elles l’ont. Naturellement, le noyau de cette réalité ce sont les différences entre les religions.
Y a-t-il une réconciliation ou un point de convergence entre les deux côtés de ce nouveau "Rideau de Fer" ?
Huntington : D’abord vous dites "les deux côtés" mais comme je l’ai dit les deux côtés sont divisés et les pays occidentaux collaborent avec les pays musulmans et vice versa. Je répète que c’est une erreur de penser en termes de deux côtés homogènes dans une confrontation radicale. La politique globale demeure extrêmement complexe et les pays ont des intérêts différents, qui les mèneront aussi à conclure des amitiés et alliances qui pourraient sembler très bizarres. Les Etats-Unis ont coopéré et coopèrent toujours avec diverses dictatures militaires dans le monde. Évidemment, nous préférerions qu’ils se démocratisent, mais nous le faisons parce que nous avons des intérêts nationaux,qu’il s’agisse de travailler avec le Pakistan ou l’Afghanistan ou qui que ce soit.
Vous avez dit récemment que le communisme a échoué parcequ’il s’est reposé sur l’idéologie plutôt que sur la religion et la culture comme moyen de lier la société. En conséquence, quand les gens ont perdu leurs illusions sur cette idéologie, comme c’est toujours le cas, les pays se sont écroulés. De même vous avez affirmé que alors que la civilisation est en évolution aux Etats-Unis, elle tend à se centrer sur le libéralisme démocratique comme idéologie.
Huntington : cela a été toujours l’idéologie des Etats-Unis.
Soit.Que pensez vous du développement de cette tendance en Amérique, en relation avec la chute de l’Union soviétique alors qu’elle se focalisait idéologiquement sur le communisme ? Quelles leçons l’Amérique devrait- elle tirer, selon vous, de cette expérience ?
Huntington : Question intéressante. Comme je l’ai dit, depuis la révolution du XVIIIème siècle, l’idéologie aux Etats-Unis a fondamentalement été la démocratie libérale et le constitutionalisme . En général quand j’écris, j’évite d’utiliser le terme "idéologie". Je parle des croyances et des valeurs américaines. Quand vous utiliser le mot "idéologie", les gens pensent tout de suite au communisme, qui était une idéologie extrêmement bien formulée et une déclaration de foi. Vous lisez le Manifeste communiste et vous en trouvez le coeur. Ce que nous avons nous, c’ est un ensemble moins rigide de valeurs et de croyances, qui sont restés constants depuis deux siècles et demi environ. C’est vraiment frappant. Évidemment, des changements et des adaptations se sont produits en raison du développement économique, de l’industrialisation, de l’immense afflux d’ immigrants qui sont venus dans ce pays, de la crise économique, de la Dépression et des deux guerres mondiales, qui ont tous eu un effet. Mais le coeur de cet ensemble des croyances américaines n’a pas changé. Si l’un des "pères" de la Déclaration d’Indépendance" revenait aujourd’hui, il ne serait pas surpris de ce que disent et croient les Américains et de la manière dont ils le présentent dans leurs déclarations publiques. Cela leur semblerait familier. D’autres pays ont connu des changements spectaculaires, des guerres des monarchies à leur remplacement par des régimes républicains ou communistes dans diverses parties de l’Eurasie. Le nationalime est une idéologie centrale pour des gens qui veulent établir leurs Etats où ils veulent une place dominante. En termes d’idéologies ou de croyances politiques, les pays sont très différents. De plus deux événements importants ont bien sûr eu lieu dans les dernières décennies : la chute du communisme en tant qu’idéologie et l’acceptation, en théorie sinon en pratique de la démocratie libérale. [1]
Dans un monde où le libéralisme démocratique gagne du terrain au moins en théorie, quelle sera la place que l’on pourrait accorder au monde musulman ?
Huntington - Nous avons constaté au moins un commencement plus ou moins profond des évolutions sociales et économiques dans le monde musulman. Et à mon avis, cela aboutira au moment opportun aux évolutions politiques dans les pays musulmans. Évidemment, les sociétés musulmanes, comme les autres sociétés, deviennent de plus en plus urbaines et de plus en plus industrialisées. Mais puisqu’un certain nombre d’Etats musulmans ont des richesses naturelles en gaz et en pétrole, ils ne manifestent pas une grande impulsion pour le changement. En même temps, les revenus pétroliers leur donnent leur la possibilité au changement. Les pays comme l’Iran commencent à développer leurs infrastructures industrielles.
Pensez-vous que « la civilisation islamique » deviendra de plus en plus une entité ou un bloc important à l’avenir ?
Huntington - Evidemment, nous avons constaté des mouvements dans ce sens. Mais je ne crois pas qu’il y aura une importante et une véritable concordance parmi les sociétés musulmanes. Mais je pense que nous pouvons nous attendre à ce que les chefs des sociétés musulmanes coopèrent les uns avec les autres dans plusieurs domaines, tout comme les sociétés occidentales qui coopèrent ensemble dans beaucoup de dossiers. Je n’exclus pas la possibilité que des pays arabes et musulmans puissent développer une certaine forme d’organisation commune comparable à l’union européenne.
Vous avez écrit : « La culture islamique est responsable, en grande partie, du manque de démocratie dans une grande partie du monde musulman. » Pourtant, plusieurs pays musulmans comme l’Indonésie, la Malaisie, le Sénégal ou l’Inde, qui a une grande population musulmane, ont des régimes démocratiques. Y a-t-il vraiment un rapport, dans ce sens, entre la culture islamique et la démocratie ?
Huntington - Je ne sais pas comment répondre à cette question, car je ne suis pas un expert en islam, mais ce qui me frappe est de voir la lenteur relative avec laquelle les pays musulmans, en particulier les pays arabes, marchent vers la démocratie. Leur acquis culturel et leurs idéologies peuvent être en partie responsables de ce problème. L’expérience du colonialisme peut expliquer en partie ce problème, car cette expérience amène les pays musulmans à se méfier de l’Occident, de la domination anglaise, française, etc. Certains de ces pays étaient essentiellement des sociétés rurales. Je pense qu’ils marchent vraiment vers l’urbanisation et les systèmes politiques beaucoup plus pluralistes. Dans presque tous les pays musulmans, cela se produit. Évidemment, ils développement leurs coopération avec des sociétés de non musulmans. Un aspect principal qui influencera la démocratisation, naturellement, est l’immigration des musulmans en Europe.
Que pensez-vous des récentes déclarations de votre collègue Stephen Walt de l’Université d’ Harvard, et de John Mearsheimer de l’Université de Chicago, qui ont dit que la politique étrangère des Etats-Unis est d’une manière disproportionnée affectée par les lobbies pro-israéliens ? Etes-vous d’accord avec eux ?
Huntington - Je pense que c’est un argument qu’il faut prendre au sérieux. Ils ne sont pas de vrais polémistes. Je ne suis pas entièrement persuadé par leur argument, mais ce qui attire mon attention c’est le terme « d’une manière disproportionnée ». Je ne sais pas comment le juger. La politique étrangère des Etats-Unis, dans tous les domaines, est effectuée par les groupes ethniques économiques ou régionaux. Il y a un lobby irlandais qui exerce son influence sur la politique étrangère des Etats-Unis depuis un siècle et demi, et qui a créé parfois des difficultés dans les relations entre les Etats-Unis et la Grande Bretagne. Il y a d’autres lobbies, ce qui veut dire que le lobby pro-israélien n’est pas unique dans son genre. La différence qui existe c’est que ce lobby se concentre sur un sujet unique : la survie d’Israël et la promotion des aides accordées à Israël.
Est- ce que vous êtes de ceux qui voient dans le conflit arabo-israélien la principale source de tension au Moyen Orient ?
Huntington - Il est clair que ce conflit n’a cessé de s’amplifier ces dernieres années et que ses impacts se font sentir un peu partout en Egypte, au Liban en Irak et ailleurs. Sur le plan stratégique, il est difficile de prévoir quel sera le pays de la région qui parviendra à s’imposer en tant que puissance hégémonique. Pour l’Amérique du sud, nous avons le Brésil. En Afrique, ce sera sans doute l’Afrique du sud. En Afrique centrale, en Asie de l’est et en Asie du sud, les futures puissances emergeantes seront respectivement le Nigeria, la future puissance emergente (...).
Mais quel va être le pays du Moyen Orient capable de faire pendant aux géants que je viens de citer ? Il est vrai qu’Israël dipose de multiples potentialités. Il détient un arsenal atomique, le plus puissant de toute la région. Mais Israël est un état minuscule. Toutes les autres nations du Moyen -Orient sont musulmanes et non israéliennes. Vu sous cet angle, Israël n’est pas à même de devenir une superpuissance.
L’Iran est aussi une possibilité, bien qu’il soit chiite et opposé en cela à la majorité des Arabes qui sont, eux, sunnites. A première vue, cela pose ou peut poser un problème. Il y a aussi le fait tout simple que l’Iran est un pays non arabe dans une région où l’arabité est un critère identitaire. Viendra ensuite la Turquie, état important mais non arabe, elle non plus et qui a de surcroît de multiples intérêts territoriaux et pétrogaziers au nord de l’Irak intérêts qui la poussent à se défendre contre toute tentative secessioniste.
Quels sont donc les chances pour qu’un pays arabe joue à l’avenir un rôle de premier plan à l’échelle de la région ? Je ne saurais pas le dire. L’Arabie saoudite est un pays riche mais relativement peu peuplé. L’Irak avec ses vastes ressources et ses nombreuses élites était un dirigeant potentiel mais il a pris le mauvais chemin. Peut-être qu’il finira un jour par faire marche arrière et redevenir l’espoir arabe. Ce me semble une hypothèse tout à fait plausible.
De nombreux analystes voient en Turquie un pont entre le monde musulman et l’Occident. Qu’en pensez-vous ?
Huntington - Cette thèse ne séduit pas tellement. La Turquie défend ses propres intérêts ; elle a longtemps été cette puissance conquérante qui a colonisé les Arabes et contre qui ces derniers se sont battus. Bien sûr, il s’agit là des réalités qui appartiennent à l’Histoire et qui ne joueront pas forcément en faveur ou en défaveur de ce qui se produira à l’avenir. Mais n’oublions pas que ces faits historiques ont durablement marqué l’esprit des gens au Moyen Orient.
L’émergence d’une puissance régionale s’inscrit-elle dans le sens des intérêts des Etats Unis ?
Huntington - Cela dépend du pays qui revendiquera ce statut de leader. Du point de vue stratégique, il sera plus facile pour les Etats -Unis de marchander avec une seule superpuissance. Les Américains pourront par exemple aller en Inde et dire à ses dirigeants : au Bangladesh, il y a tel ou tel problème et vous devez faire quelque chose ; ou qu’est-ce que nous pourrons faire ensemble pour jeter les bases d’une politique commune ? Mais en absence d’une puissance de la taille et de la stature de l’Inde, il faudra à l’Amérique d’aller d’une capitale à l’autre, de chercher à faire des alliances, tâche qui, du reste, est loin d’être facile. Surtout au Moyen- Orient où les pays partagent un passé marqué par toutes sortes de rivalités, éthniques et religieuses entre autre.
Amartia Senn, votre collègue à l’Université d’Harward critique votre théorie du clash des civilisations ; il dit que l’identité n’est pas la fin de l’histoire et que chacun est libre de choisir, de forger sa propre identité. Senn estime que votre théorie du clash miniaturise l’humanité, l’atomise en de petits fragments identitaires, bons à ranger dans des boites nommées "civilisation". Qu’est que vous pensez des citoyens qui ont à la fois plusieurs nationalités ?
Huntington - je crois que ce jugement est totalement faux. Je n’ai jamais rien dit de tel. Je sais bien qu’il y a des gens multi-identitaires. Ce que je dis dans mon livre est simple : les bases des alliances et des désalliances ont tout simplement changé de nature. Dans les décennies à venir, ce seront le patrimoine culturel, la langue et la religion qui pèseront sur la politique internationale. Ma théorie remonte à une dizaine d’années et au regard des faits, elle ne s’est toujours pas démentie.
Comment peut-on discuter avec les gens multi-identitaires, par exemple avec un musulman ou un juif qui vivent aux Etats -Unis et qui ont à la fois deux identités, religieuse et américaine ? Comment faut-il s’y prendre ?
Huntington - En bien il faudrait arriver à une entente, entente à laquelle ces gens là sont aujourd’hui arrivés au terme de deux ou trois siécles d’efforts d’adaptation. Lorsque les flux migratoires s’intensifient et que le nombre de minorités raciales et religieuses se multiplie, de nouvelles règles, de nouvelles langues apparaissent. La société d’accueil doit reconnaître à ses minorités le droit de jouir d’une certaine autonomie dans le domaine des pratiques religieuses, linguistiques. Le problème des races renvoit souvent aux questions liées à la langue. Il faut savoir jusqu’où ces minorités pourront aller dans la pratique de leur langue maternelle ou quels sont les critères qui permettent de qualifier un pays de mono ou bilinguiste.
A votre avis, de quelle manière le fondamentalise- l’idée qui consiste à faire primer une identité aux dépens des autres- influe-t-il aujourd’hui sur la politique internationale ? Croyez-vous en l’existence d’un fondamentalisme de nature islamique ou ce phénomène peut-il se rencontrer dans n’importe quelle religion ?
Huntington - Je suis totalement d’accord avec votre définition du fondamentalisme. Le fondamentalisme signifie le fait de donner la priorité à une identité, à une civilisation, à une culture et de la juger supérieure aux autres. Il va de soi que le fondamentalisme a depuis toujours existé et qu’il n’est pas propre à un espace géographique particulier. Ici aux Etats -Unis, nous avons eu nous aussi nos fondamentalistes qui se sont longtemps opposés à l’immigration, au brassage de notre culture avec celle des autres. Ces tendances extrémistes sont universelles. Mais le problème surgit à partir du moment où ces tendances ne sont plus contrôlées et qu’elles se transforment en force motrice au sein d’une société. Une telle société risque de voir les libertés de ses citoyens, de ses minorités se rétrécir. Il se peut même que cette société déclare la guerre aux autres et qu’elle cherche à leur imposer ses idées, ses manières d’être.
Pourquoi les tensions interethniques sont-elles plus palpables en Europe qu’aux Etats Unis, j’entend les tensions qui opposent les musulmans aux autres communautés ?
Huntington - le premier point est sans doute le poids numérique des musulmans. Ces derniers sont peu nombreux aux Etats -Unis au contraire de l’Europe où ils ont une présence plus massive. Le second est que les musulmans ne sont pas arrivés en Amérique à pied ou à bord de bateaux de fortune ; ils ont traversé des milliers de kilomètres pour venir ici. Les Etats -Unis n’ont pas de frontières communes avec les états musulmans. Mais l’Europe en a. La différence fondamentale réside justement dans ce point.
Comment oserait-on comparer la situation des musulmans européens avec celle de nos hispaniques ? Les deux cas ne sont tout simplement pas comparables. les Etats- Unis ont été et resteront un pays d’immigration. Les hispaniques qui y arrivent sont tous catholiques, une religion que les Américains pratiquent ou reconnaissent. Un tiers de notre population est catholique. Donc les hispaniques ne causent pas les mêmes disharmonies que les Arabes d’Europe. Nos immigrants viennent non pas de l’autre bout du monde, mais tous simplement des pays limitrophes. Il est vrai que l’immigration aux Etats -Unis n’est pas allé sans créer des difficultés mais nous sommes encore trop loin de la situation que connait l’Europe où des religions antagonistes entrent en conflit. [2]