Comme Khader Adnan avant elle, Shalabih a rendu un grand service aux autres Palestiniens en révélant la nature antidémocratique de la détention administrative. Il faudra attendre un certain temps avant de savoir si ce combat aura restreint ou totalement aboli ce genre de détention.
En choisissant de résider à Gaza pendant trois ans, Shalabi a dévoilé ce que peu de gens au monde savent, à savoir que l’injuste siège qu’Israël impose à Gaza empêche aussi 1.5 million de Palestiniens ordinaires de quitter la bande et plus de 2.5 millions de Palestiniens de Cisjordanie de circuler dans un sens ou dans l’autre.
On a beaucoup parlé du siège économique imposé de façon unilatérale à la bande de Gaza. Le blocus israélien, terrestre et maritime, est toujours d’actualité. Les tentatives répétées pour le briser ont entraîné un allègement marqué de certains de ses aspects.
Alors que le blocus économique entend obtenir des résultats politiques et amener des changements dans l’attitude du gouvernement dirigé par le Hamas à Gaza, il est inconcevable que l’interdiction de se déplacer entre Gaza et la Cisjordanie perdure. Il n’y a jamais eu le moindre effort sérieux pour répondre à ce besoin humanitaire.
Aujourd’hui l’exil de Shalabi à Gaza est couvert par les médias locaux, régionaux et internationaux.
En proposant la liberté à Shalabi, les Israéliens ont admis indirectement que sa détention n’était pas motivée par des raisons sécuritaires. En proposant de la laisser vivre à Gaza pendant trois ans, ils signalent que l’interdiction de circuler entre la Cisjordanie et Gaza va continuer pendant au moins trois ans.
L’accord n’est rien moins qu’une punition, pour elle et sa famille. La seule possibilité pour que sa famille puisse la rencontrer dorénavant est qu’elle puisse sortir de Gaza vers un pays tiers (l’Egypte ou la Jordanie) où sa famille devrait se rendre, à partir de Jénine.
Shalabi, qui a été arrêtée de nombreuses fois sans accusation ni procès, a été libérée lors de l’échange avec Gilad Shalit et a été légalement graciée.
Les architectes des accords d’ Oslo ont conçu ce que l’on appelait une « route de libre passage » qui reliait la bande de Gaza à la Cisjordanie. Le protocole sur le passage sécurisé entre la Cisjordanie et la bande de Gaza ( Protocol Concerning Safe Passage between the West Bank and the Gaza Strip) fut signé à Jérusalem le 5 octobre 1999.
Israël n’a jamais respecté ce protocole, ce qui a amené des responsables états-uniens et des envoyés de paix à tenter de le réintroduire, sans résultats.
Excepté pour une courte période de quelques jours, le passage n’a pas été ouvert, en violation des accords bilatéraux et aussi de l’accord que la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice et l’ambassadeur Daniel Kurtzer avaient réussi à produire en une nuit à Jérusalem.
Israël a fait valoir un prétexte après l’autre pour nier aux Palestiniens le droit de voyager d’une zone palestinienne à l’autre.
La solution à deux Etat, qui a reçu l’approbation internationale et même le soutien public d’Israël, comporte une clause sur la nécessaire contiguïté du territoire palestinien. Même si la mise en place d’un train rapide ou un tunnel connectant la Cisjordanie et Gaza peut prendre du temps, il est quand même possible d’autoriser les Palestiniens à faire les déplacements.
L’horrible mur israélien est maintenant en place et les Israéliens peuvent installer toutes les mesures sécuritaires qu’ils veulent pour faire en sorte que la route de libre passage ne mette pas en danger la sécurité d’Israë. Interdire à des millions de Palestiniens le droit de circulation avec Gaza revient clairement à une punition collective.
L’accord de Shalabi pour mettre un terme à sa grève de la faim et vivre à Gaza pendant trois ans a mis sous le feu des projecteurs l’absurdité de la politique cruelle d’Israël qui sépare les Palestiniens entre eux sans la moindre raison.
Il est grand temps de mettre fin à des violations aussi affreuses des droits humains.