Qu’ont-ils en commun – les faucons des brigades Iz al-Din al-Qassam, l’aile militaire du Hamas ; le Premier ministre Benjamin Netanyahou ; son garde du corps, le ministre de la Défense, Ehoud Barak ; et le prix Nobel de la paix, le Président Shimon Peres ? Ils ont tous fait une crise à propos de la réconciliation entre le Fatah et le Hamas.
Les protestations du front du refus palestinien coulent de source : le document égyptien est l’acte de reddition du Hamas. Il oblige les organisations militantes à accepter l’autorité des forces de sécurité qui dépendent du Président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, sans leur donner la moindre prise dans l’arène politique.
D’un point de vue israélien, l’accord semble être trop bon pour que le chef politique du Hamas, Khaled Meshal, signe.
Alors pourquoi les hommes politiques israéliens qui prétendent être des hommes d’Etat épris de paix, ont-ils été si prompts à s’en prendre à Abbas ?
Ils réalisent que dans le pire des cas l’accord met fin à l’affirmation du gouvernement qu’ Abbas "représente seulement la moitié du peuple palestinien." Si les conditions que pose Abbas sont respectées - "une autorité, une loi, un fusil [une armée]" – cela pourrait détruire la grande mantra de la droite israélienne : "Nous avons quitté Gaza et nous avons des roquettes Qassam en échange."
La droite, qui sait que la réconciliation interne des Palestiniens pourrait précipiter la reconnaissance internationale de l’Etat palestinien dans les frontières de 67, dépeint délibérément cette avancée vers l’unité comme anti-israélienne. Un accord Fatah-Hamas apporterait probablement le calme sur la frontière de Gaza mais la droite fait monter consciemment la panique en agitant le spectre de "Qassams en Judée et en Samarie."
Dans le moins-que-pire (ou peut-être dans le pire que « pire ») des cas, Netanyahou, Barak et Peres n’ont pas pris la peine de lire l’accord ni voulu entendre les explications claires données par Abbas. Le document précise que le gouvernement d’unité nationale intérimaire palestinien sera seulement autorisé à s’occuper de l’unification et de la gestion des forces de sécurité, de la reconstruction des bâtiments et infrastructures endommagés pendant l’opération Plomb durci et de la préparation de l’ élection prévue pour mai 2012.
Abbas a répété avec insistance que c’est l’OLP qui a signé les traités avec Israël depuis les accords d’ Oslo, et que le gouvernement de technocrates qu’il va nommer ne pourra pas l’empêcher de négocier avec le gouvernement Netanyahou sur la base des frontières de 1967, des échanges de territoire, d’une solution au problème des réfugiés sur laquelle on s’est accordé et d’un moratoire sur la construction dans les colonies et Jérusalem-Est pour une période de trois mois. Donc, la reconnaissance par le Hamas des conditions mises en avant par le Quartette, qui comportent le respect de tous les accords passés avec Israël, n’a pratiquement pas de sens.
Si les dirigeants de l’Etat et leurs loyaux serviteurs à la Résidence présidentielle ont lu le texte de l’accord de réconciliation, ils ne se sont pas penchés sur les conditions qui le rendaient possible.
Un expert du Moyen-Orient, Matti Steinberg, actuellement professeur invité à Princeton, se ferait une joie de leur expliquer que ce texte est le même que celui proposé au Hamas il y a plusieurs mois -seul le contexte a changé.
Steinberg, qui a conseillé plusieurs chefs des services de sécurité du Shin Bet sur les questions palestiniennes, pourrait leur signaler la critique forte et précise émise par Yusuf al-Qaradawi, l’autorité intellectuelle islamique des Frères musulmans – les grands frères du Hamas– sur le massacre des Sunnites par le régime allaouite de Syrie.
La terre tremble en Syrie. Bashar Assad, le protecteur de Meshal et de ses collègues, est devenu un clone de Muammar Gadhafi aux yeux du monde. Signer l’accord de réconciliation est le prix payé par les réfugiés du Hamas à Damas pour le voyage au Caire. La décision d’ouvrir les portes de Rafah, comme la pression exercée sur le Hamas pour qu’il signe le traité, reflètent le désir de l’Egypte de créer un environnement qui permettra aux Palestiniens de reprendre les négociations avec Israël ; Il va parer à la Flottille annoncée pour Gaza et causera du tort au commerce des tunnels qui finance les forces du Hamas à Gaza.
Si Israël fait échouer la réconciliation, cela perpétuera la violence sur la frontière avec Gaza. S’attaquer à l’accord déséquilibrerait la relation délicate qui se forme avec le nouveau régime au Caire et améliorerait la position de l’ Iran.
L’accord de réconciliation et le front commun que l’on constate dans les territoires occupés sont les meilleures nouvelles possibles pour ceux qui cherchent la paix – des deux côtés de la Ligne verte. J’espère seulement que le Hamas ne va pas se rétracter à la dernière minute et qu’il respectera à la fois l’esprit et la lettre de l’accord.