Lorsqu’en 1967 Israël conquiert la Cisjordanie, la Bande de Gaza et Jérusalem-Est, se pose la question du devenir de ces territoires. « Dès juillet, de Gaulle définit la position française : retour aux lignes d’avant la guerre de juin 1967 contre reconnaissance d’Israël par les Etats arabes », explique l’historien Henry Laurens, professeur au Collège de France. A l’époque, il n’est pas question de Palestine, mais l’idée va faire son chemin : « le président Giscard d’Estaing [1974-1981] est à l’origine de grandes avancées dans le cadre européen avec la Déclaration de Venise évoquant une sorte d’autodétermination des Palestiniens », poursuit Henry Laurens.
L’idée d’un Etat palestinien continue de progresser après l’élection de François Mitterrand en 1981. Le président socialiste parle d’une « patrie » pour les Palestiniens et il n’hésite pas à prononcer le mot « d’Etat », y compris devant la Knesset, le Parlement israélien à Jérusalem, en 1982. « Au début François Mitterrand était ambivalent, estime Henry Laurens. Il ne disait pas où devait se situer la patrie des Palestiniens, ce qui pouvait laisser entendre qu’il pouvait s’agir de la Jordanie. Mais ensuite, la politique française s’est structurée autour de la reconnaissance mutuelle et de l’idée des deux Etats. »
Yasser Arafat à Paris
La France jouera un rôle clé pour asseoir la légitimité de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) comme représentant du peuple palestinien. En 1989, c’est à Paris que Yasser Arafat annonce que la charte de son mouvement est « caduque » : l’OLP ne recherche plus la destruction d’Israël et la reconnaissance mutuelle devient possible.
Logiquement, la France encourage le processus de paix d’Oslo lancé en 1993 sous parrainage américain, et c’est sur son sol que sont signés dans la foulée les Accords de Paris consacrés au volet économique du processus.
Paralysie
Mais deux décennies plus tard, ni la paix ni l’Etat palestinien ne sont au rendez-vous. Et c’est cette paralysie qui a récemment guidé une série de décisions françaises. En 2011, la France vote « oui » à l’adhésion de la Palestine à l’Unesco. Puis en 2012, aux Nations unies, la France vote « oui » à la reconnaissance de la Palestine comme « Etat observateur non membre de l’ONU ». Mais la position officielle ne change pas : à Paris comme ailleurs dans l’Union européenne, on estime qu’un Etat palestinien indépendant doit voir le jour à l’issue de négociations de paix avec Israël.
Processus à l’agonie, poursuite de la colonisation, guerre meurtrière de l’été 2014 à Gaza : autant de facteurs qui ont déclenché des démarches nouvelles en Europe ces dernières semaines. La Suède a formellement reconnu la Palestine alors que les Parlements britannique, espagnol puis français ont organisé des votes symboliques sur cette question. Mais au-delà des démarches parlementaires, le gouvernement français veut montrer qu’il reste à l’initiative. Il travaille désormais à un projet de résolution au Conseil de sécurité de l’ONU visant à « fixer un calendrier » pour la fin des négociations et l’avènement de l’Etat palestinien. Selon le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius : « Si les efforts échouent, alors il faudra que la France prenne ses responsabilités en reconnaissant sans délai l’Etat de Palestine. »