Mercredi 7 mai, un amendement introduisant la définition IHRA de l’antisémitisme dans des modules de formation a été adopté durant l’examen de la proposition de loi sur la lutte contre l’antisémtisme dans l’enseignement supérieur. Cette définition, qui lie critique des politiques de l’Etat d’Israël et antisémitisme, doit être rejetée en commission mixte paritaire.
La proposition de loi sur la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur a été examinée mercredi 7 mai par l’Assemblée nationale, après son adoption à l’unanimité au Sénat. Durant cet examen, un amendement déposé par la députée Caroline Yadan a été adopté en séance publique, malgré un double avis négatif des rapporteurs et du gouvernement. Cet amendement prévoit l’introduction de la définition de l’antisémitisme de l’IHRA dans les modules de formation à la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur.
La définition de l’antisémitisme proposée par l’IHRA, bien qu’avalisée par des résolutions de l’Assemblée nationale (2019) et du Sénat (2021), est contestée pour son ambiguïté : elle rend difficile la distinction entre antisémitisme et critique politique d’Israël, notamment par certains de ses exemples qui assimilent des critiques de l’État israélien à de l’antisémitisme. Dans un rapport de mars 2024, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur la liberté d’expression, Irene Khan, a jugé cette définition contraire à la liberté d’expression. En 2021, près de 400 universitaires ont proposé une alternative : la Déclaration de Jérusalem sur l’antisémitisme, plus précise et respectueuse de la liberté académique. Déjà en 2019, 127 intellectuels juifs appelaient les députés à ne pas adopter cette définition.
Cette définition risque d’être utilisée pour faire taire des personnes ou des organisations qui défendent les droits de la population palestinienne ou critiquent les violations des droits humains par les autorités israéliennes. Cela peut freiner la liberté d’expression, empêcher des débats légitimes, et mettre en danger des chercheurs, des étudiants ou des associations.
Une commission mixte paritaire devra parvenir à un texte de compromis entre les deux versions des textes : celle du Sénat (sans référence à la définition IHRA) et celle de l’Assemblée nationale (avec référence à la définition IHRA). Ce texte commun sera ensuite soumis pour adoption aux deux chambres sans possibilité d’amendement.
La Plateforme des ONG françaises pour la Palestine appelle les parlementaires qui vont siéger dans la commission mixte paritaire à supprimer la référence à la définition de l’antisémitisme de l’IHRA dans la version finale du texte. Si la lutte contre l’antisémitisme doit être une priorité absolue, il est essentiel que la législation française ne restreigne pas la liberté d’expression et le droit légitime à critiquer les politiques d’un État. Toute évolution législative en ce sens pourrait avoir des conséquences sur le débat public, la liberté académique et sur le travail des défenseurs des droits humains.