Le 29 novembre 1947, l’Assemblée Générale de l’ONU s’est prononcée pour la création d’un Etat juif (aux côtés d’un Etat arabe) sur la Terre d’Israël. Soixante neuf années plus tard, le 23 décembre 2016, le Conseil de Sécurité de l’ONU a voté pour essayer de le sauver. La Résolution 2334 qui a été approuvée vendredi est une bouffée de bonnes nouvelles, un souffle d’espoir dans la mer de ténèbres et de désespoir de ces dernières années.
Juste comme il semblait que tout allait en empirant – l’intensification de l’occupation de plus en plus soutenue par l’Amérique, en même temps que l’Europe se précipitant vers la droite – est arrivée lors d’Hanukkah une résolution qui allume une mince bougie. Alors qu’il semblait que les méchants resteraient vainqueurs, sont arrivés la Nouvelle Zélande et trois autres pays qui ont donné au monde un cadeau de Noël.
Merci donc à la Nouvelle Zélande, au Venezuela et à la Malaisie. En vérité, l’arbre de Noël qu’ils ont donné, avec toutes ses lumières étincelantes, sera bientôt enlevé ; Donald Trump est déjà en train d’attendre à la porte. Mais l’empreinte restera. Jusque là, cette réjouissance momentanée est un bonheur, malgré la gueule de bois attendue.
Bien sûr nous devons demander au Président des U.S.A. Barack Obama en colère : vous faites quelque chose maintenant ? Et nous devons demander au monde en état de frustration : qu’en est-il des actions ? Mais il est impossible d’ignorer la décision du Conseil de Sécurité qui statue que toutes les colonies sont illégales par nature.
Le Premier Ministre Benjamin Netanyahu peut rappeler ses ambassadeurs, tandis que son ministre de droite Yuval Steinitz peut hurler que la résolution est “injuste.” (Il a le sens de l’humour.) Et le chef de l’opposition Isaac Herzog peut babiller que “nous devons combattre la décision par tous les moyens.” Mais il n’y a aucune personne au monde, dotée de conscience, qui ne se réjouisse pas de la résolution.
Il n’y a non plus aucun Israélien honnête qui doive se laisser prendre par la propagande qui qualifie la résolution d’“anti-israélienne,” une définition que les médias israéliens se sont empressés d’accepter – dans leur servilité caractéristique, bien sûr.
Cette décision a ramené Israël au ferme terrain de la réalité. Toutes les colonies, y compris dans les territoires qui ont été annexés, y compris bien sûr à Jerusalem-Est, constituent une violation du droit international. En d’autres termes, elles constituent un crime. Aucun pays dans le monde ne pense différemment. Le monde entier est de cet avis – tous les soi-disant amis et tous les soi-disant ennemis d’Israël – de façon unanime.
Il y a tout lieu de croire que les outils de lavage de cerveau d’Israël, ainsi que les mécanismes de répression et de dénégation, essaieront d’ébranler la décision. Mais quand les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Chine et la Russie sont unis pour adopter une telle déclaration sans équivoque, ceci sera une tâche difficile.
Vous pouvez alors dire “le monde entier est contre nous.” Vous pouvez crier “anti-sémitisme !” Vous pouvez demander "Qu’en est-il de la Syrie ?” En fin de compte cette vérité limpide comme du cristal demeurera : le monde pense que les colonies constituent un crime. Toutes les colonies et tout le monde.
Assurément, le monde ne lève pas le petit doigt pour que les colonies soient supprimées, mais peut-être cela arrivera-t-il un jour. Toutefois, il sera trop tard à ce moment là , trop tard.
La Résolution 2334 fait artificiellement la distinction entre Israël et les colonies, ce en quoi elle vise les colonies, non l’occupation. Comme si la culpabilité d’Amona reposait sur ses colons et non sur tous les Israéliens. Cette tromperie prouve combien le monde continue à traiter Israël avec indulgence et hésite à prendre des mesures contre celui-ci, comme il l’a fait, par exemple, pour la conquête de la Crimée par la Russie.
Mais les Israéliens qui n’habitent pas à Amona, qui n’y ont jamais été, qui n’ont aucun veritable intérêt à son sort – il semble que ce soit le cas de la plupart des Israéliens – doivent se demander : est-ce que cela vaut vraiment le coup ? Tout ça pour quelques colons qu’ils ne connaissent pas et qu’ils n’ont pas vraiment envie de connaître ?
La Résolution 2334 est destinée avant tout aux oreilles israéliennes, comme un réveil qui vous assure de vous réveiller à l’heure, comme une sirène qui vous dit de descendre dans l’abri anti-aérien. A vrai dire, la résolution n’a aucune valeur réelle ; à vrai dire, la nouvelle administration des U.S.A. promet de l’effacer.
Mais deux questions resteront posées : pourquoi les Palestiniens ne méritent-ils pas exactement la même chose que les Israéliens, et dans quelle mesure un pays, avec tout son pouvoir d’influence, ses armes et sa technologie avancée, peut-il ignorer le monde entier ? En ce premier jour des deux fêtes de Hanukkah et de Noël, nous pouvons savourer, ne serait-ce que pendant un moment, la douce illusion que la Résolution 2334 soulèvera ces questions en Israël.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers