Des Palestiniens vivant dans des villages et des hameaux qui longent des colonies juives disent que le déracinement s’est accru depuis qu’Ariel Sharon, le premier ministre israélien, a quitté le Likoud et a formé son propre parti il y a près de deux mois.
Selon les villageois de Sikka, un petit village à 20 km à l’ouest de Hébron, l’armée israélienne a amené le 2 janvier environ 10 marteaux piqueurs et autres équipements lourds sur les oliveraies du côté Ouest du Mur de Séparation et qu’elle a détruit ou enlevé plus de 1.000 arbres.
Ayed Hureibat le propriétaire palestinien de certains de ces arbres déracinés, a raconté à Aljazeera.net : « Ils ont déraciné d’ énormes oliviers à l’aide de marteaux piqueurs, ont taillé les branches les plus grosses à l’aide de scies électriques puis ont monté les arbres dans des camions qui apparemment attendaient et ce, pour les replanter ailleurs en Israël »
« C’est du vol en plein jour ».
Hureibat dit que les soldats ont menacé de tirer et de tuer les villageois qui auraient eu l’idée de protester contre cette action des Israéliens.
« J’ai demandé à l’un des soldats de pouvoir parler à l’officier responsable de l’opération. Il m’a répondu : va parler à Allah ».
Des terres disputées
Le porte parole de l’armée, Avichai Adroa’ee, a admis « qu’un certain nombre d’arbres « avaient été déracinés à Sikka mais il a dit que les surfaces cultivées « appartenaient à Israël ».
Il a dit à Aljazeera.net que les arbres déracinés avaient été transférés à Beit Guvreal connu pour les Palestiniens sous le nom de Bait Jebril, et a ajouté que les fermiers palestiniens pouvaient faire une demande pour récupérer leurs arbres.
Majed Hishayesh, un fermier palestinien, a insisté pour dire que cette zone faisait partie de la Cisjordanie.
« Nous avons planté ces arbres il y a plus de 25 ans. Ils auraient pu nous arrêter à cette époque là s’ils avaient eu une preuve pour corroborer leurs revendications. »
« De plus, est-ce ainsi qu’on résout des disputes, en déracinant nos oliveraies et en les volant en plein jour ? »
Le 5 janvier, des colons juifs ont abattu 102 oliviers à Tuwwani au Sud de Hébron.
Christy Bsichoff, une activiste chrétienne pour la paix, a décrit la scène comme si c’était un enterrement.
« Alors que nous nous approchions de la femme (la propriétaire) assise à côté des 102 oliviers que les colons avaient coupés la nuit précédente, j’ai vu des larmes couler le long de son visage le regard fixé au loin. Nous venions lui présenter nos respects ; c’était comme un enterrement, un cimetière dans lequel des arbres vieux de 30 ans avaient été massacrés ».
Assurances israéliennes
Quand Israël a construit le Mur de Séparation dans les parties Nord et au centre de la Cisjordanie en 2004 et 2005, des officiels israéliens avaient assuré les villageois palestiniens que le Mur n’était qu’une mesure de sécurité et qu’il n’avait aucune signification politique.
C’était l’argument principal d’Israël vis-à-vis du verdict de la Cour Internationale de Justice de La Hague de juin 2004 qui avait statué que le Mur était illégal et qu’il constituait une violation claire de la loi internationale et de la Quatrième Convention de Genève.
Quand les Palestiniens se sont plaints auprès des tribunaux israéliens de la construction du Mur sur leurs terres, l’Administration Civile de l’armée israélienne a dit qu’elle permettrait aux villageois palestiniens d’avoir un libre accès à leurs oliveraies et à leurs fermes situées à l’Ouest du Mur (moitié barrière, moitié mur).
Said Hishayesh, le fermier, dit : « Ils nous ont menti, ils nous ont dit qu’en été nous aurions un accès libre à nos oliveraies et que nous pourrions labourer et moissonner nos récoltes. Et voyez ce qu’ils font maintenant, ils déracinent nos arbres et les emmènent pour être replantés en Israël ».
Oliveraies détruites
Selon B’Tselem, l’organisation israélienne pour les droits humains, les colons juifs ont détruit ces derniers mois des milliers d’oliviers appartenant à des villageois palestiniens dans le nord de la Cisjordanie.
Début janvier, Shaul Mofaz, le ministre de la défense israélien, a ordonné une enquête au sujet des destructions des oliveraies dans le voisinage des colonies juives dans le nord de la Cisjordanie.
Mais les Palestiniens comme les activistes des droits humains restent sceptiques sur la sincérité de Mofaz et du système judiciaire israélien au sujet de l’investigation.
Le 10 janvier, Yuval Diskin, le directeur du service de sécurité interne du Shin Bet, a dit aux affaires étrangères et comité de défense de la Knesset que l’armée n’avait rien fait pour prévenir l’abattage des oliviers palestiniens alors que l’armée connaissait l’identité des délinquants.
Le quotidien israélien Ha’aretz l’a cité : « A mon avis, ces actes sont très graves. Les oliviers sont juste un symptôme et le problème c’est qu’il n’y a pas contrainte efficace de la loi quand il s’agit de colons ».
Vols de terres
Selon un rapport publié par B’Tselem le 28 décembre, l’état a permis aux colons israéliens de s’approprier tranquillement de larges zones de terres palestiniennes appartenant à des propriétaires privés et qui étaient situées du côté « israélien » de la Barrière.
Ces terres incluaient des centaines d’hectares de terres agricoles.
Un officiel de l’Administration Civile de l’armée, contacté par Aljazeera.net, a dit : « nous n’avons pas encore examiné cette question ».
Ha’aretz a décrit le vol des propriétés privées palestiniennes de « crime organisé ».
Dans un article publié le 4 janvier, le correspondant du Ha’aretz, Akiva Eldar, a fait remarquer que l’état et sa branche juridique ne faisaient pratiquement rien pour arrêter la saisie illégale de terres palestiniennes par les colons et leurs sympathisants au gouvernement et dans l’armée dans les différentes parties de la Cisjordanie.
Eldar a accusé le ministère de la défense de refuser de mettre à exécution des ordres pour démolir des structures illégales construites par les colons sur des propriétés palestiniennes volées.
Eldar n’a pas fait de commentaires sur cet article.
Le 8 janvier, selon les rumeurs, Menachem Mazuz, le procureur général israélien, a ordonné un gel des constructions sur les propriétés saisies illégalement.
Reste à voir si cet ordre sera appliqué.