AFPS/OLP contre les sociétés Alstom, Alstom transport et Veolia transport
COMMUNIQUE de l’AFPS N°12
L’AFPS et l’OLP font appel du jugement du TGI de Nanterre du 30 mai 2011
*****
Au mois de février 2007, l’Association France Palestine Solidarité (AFPS) a fait assigner les Sociétés VEOLIA TRANSPORT et ALSTOM devant le Tribunal de Grande Instance de Nanterre afin de faire reconnaître le caractère illicite du contrat signé par ces sociétés, au mois de juillet 2005, avec le gouvernement d’Israël, dans le cadre du consortium City Pass, chargé de la construction et l’exploitation d’un tramway à Jérusalem-Est.
L’AFPS a demandé également au Tribunal d’interdire à ces sociétés de poursuivre l’exécution du contrat qui viole notamment les dispositions de la Convention de Genève du 12 août 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, et favorise l’expansion de la colonisation illicite de Jérusalem Est par l’Etat d’Israël, le tracé de la ligne de tramway qui en est l’objet tendant à relier le Centre de Jérusalem Ouest à des colonies de l’Est, installées sur des terres confisquées au Palestiniens.
L’O.L.P. est intervenue à cette procédure et s’est jointe aux demandes de l’AFPS.
Les sociétés Alstom et Veolia transport ont soulevé devant le Tribunal divers moyens d’incompétence et d’irrecevabilité qui ont donné lieu à différents jugements (11 janvier 2008, 6 juin 2008) lesquels ont condamné Alstom et Veolia transport à communiquer la traduction juré en français de la totalité du traité de concession et de ses annexes.
Les pièces communiquées à nos Conseils ont révélé que les sociétés Alstom et Véolia transport participent directement à l’exécution de ce contrat, bien qu’elles ne soient pas signataires du contrat de concession signé le 22 septembre 2004 entre la société City Pass de droit israélien et l’Etat d’Israël.
Il en est de même pour la société Alstom transport qui au surplus bénéficie d’un contrat d’ingénierie, d’approvisionnement et de construction.
C’est la raison pour laquelle l’AFPS et l’OLP ont également assigné le 18 novembre 2008 la société ALSTOM TRANSPORT devant le Tribunal de Grande Instance de Nanterre aux fins de faire constater le caractère illicite de son contrat et d’interdire à ladite société de poursuivre l’exécution de ses engagements.
L’ensemble des affaires concernant les sociétés Alstom, Alstom transport et Veolia transport a été plaidé sur les questions de compétence et les irrecevabilités de procédure à l’audience du 2 février 2009. Le Tribunal a rendu sa décision le 15 avril 2009.
***
Le jugement du 15 avril 2009 donne satisfaction concernant la compétence du Tribunal de Grande Instance de NANTERRE et la recevabilité de l’AFPS même si, pour des raisons de forme, le Tribunal a déclaré l’OLP en l’état irrecevable, cette irrecevabilité pouvant être régularisée pour l’avenir.
Le Tribunal a tout d’abord constaté, au regard des pièces que les sociétés ont été contraintes de verser aux débats, que Veolia transport, Alstom et Alstom transport participent à l’exécution du contrat de concession et qu’en conséquence elles étaient bien en situation de parties défenderesses, contrairement à ce que soutenaient les trois sociétés.
Le Tribunal s’est par ailleurs déclaré matériellement compétent, considérant notamment que les sociétés mises en cause ne pouvaient soulever l’incompétence au motif que l’Etat d’Israël bénéficierait de l’immunité de juridiction d’un Etat étranger.
Le Tribunal a en effet jugé : « outre que l’Etat d’Israël n’est pas partie à cette instance, cet Etat ne saurait en tout état de cause sérieusement soutenir et agir au titre des contrats querellés en qualité d’Etat souverain puisqu’il est en réalité puissance occupante de la partie de la Cisjordanie où est construit et où sera exploité le tramway litigieux, partie reconnue par la Communauté des Nations et la Cour internationale de justice comme relevant du territoire palestinien ».
Le Tribunal s’est également déclaré territorialement compétent, les sociétés défenderesses ayant leurs sièges sociaux dans son ressort.
Il a au surplus motivé sa compétence de la façon suivante : « compte tenu du risque de déni de justice inhérent à la nature de ce litige, la juridiction française est bien, de prime abord, compétente pour son règlement dans le souci de garantir le libre accès à la justice des parties en cause, au visa des dispositions de l’article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l’homme. Il est de jurisprudence constante que le risque de déni de justice est un critère de compétence des juridictions françaises dès lors que le litige présente un rattachement avec la France, ce qui est bien le cas dans les circonstances de la présente espèce, les défenderesses étant des entreprises françaises domiciliées en France, Alstom reconnaissant notamment que ses usines de La Rochelle, du Mans, Le Creusot, Villeurbanne et Tarbes fabriquent 46 voitures du tramway de Jérusalem ».
Alstom, Alstom transport et Veolia transport avaient également plaidé l’irrecevabilité de la demande introduite par l’AFPS en soutenant que celle-ci, partie tiers au contrat querellé, n’établissait pas sa qualité pour agir.
Là encore, le Tribunal a rejeté l’argumentation des défenderesses en reconnaissant la qualité de l’AFPS d’ester en justice, compte tenu de ses statuts.
Le Tribunal a par ailleurs rappelé : « il est désormais de principe qu’une association, peut même hors habilitation législative, agir en justice au nom d’intérêts collectifs dès lors que ces derniers entrent dans son objet social. En l’espèce une atteinte à l’objet social de l’AFPS du fait de l’exécution de contrats supposés illicites en référence au droit humanitaire international serait manifestement susceptible de lui causer à tout le moins un préjudice moral. »
Les sociétés Alstom et Alstom Transport ont formé un contredit pour solliciter de la Cour d’appel de Versailles l’infirmation du jugement de Nanterre. L’audience a eu lieu le 9 novembre 2009. Véolia, qui n’avait pas contesté le jugement du tribunal de Nanterre, y a été représenté par un de ses avocats qui a déclaré en fin d’audience que l’entreprise s’en remettra à la décision de la Cour.
La Cour d’appel de Versailles a rendu sa décision le 17 décembre 2009. L’arrêt, reprenant en grande partie l’argumentation de nos avocats, nous donne satisfaction, la Cour d’appel confirmant le jugement en ce qu’il s’est déclaré compétent pour statuer sur le litige.
Néanmoins, les sociétés Alstom et Alstom transport ont formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Parallèlement à leur contredit, les sociétés Alstom et Alstom transport avaient formé un appel du jugement de Nanterre. Notre avocat et notre avoué ont fait un incident de procédure pour voir déclarer irrecevable cet appel. Cette demande a été accueillie favorablement par la Cour dans une ordonnance rendue le 4 février 2010.
Dans ces conditions, le pourvoi en cassation ne stoppant pas les effets de l’arrêt de la Cour d’appel. le dossier pouvait retourner au TGI de Nanterre pour être jugé sur le fond. L’audience de plaidoirie a enfin eu lieu le 2 mars 2011. Entretemps, par arrêt en date du 10 février 2011, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation avait rejeté le pourvoi d’Alstom et Alstom transport.
***
Le jugement de 31 pages du tribunal de grande instance de Nanterre a été rendu le 30 mai 2011. Il rejette nos demandes mais déboute également les sociétés de leurs demandes financières à l’encontre de l’AFPS, le Tribunal considérant que son action n’était pas abusive, « le caractère illicite de l’occupation de Jérusalem Est (étant) unanimement reconnu par la Communauté internationale ».
Le Tribunal déclare irrecevable la seconde intervention de l’OLP en contestant la validité de la régularisation faite dans la rédaction des mandats.
Néanmoins, l’AFPS et l’OLP considèrent qu’il existe des moyens juridiques sérieux pour contester l’argumentation retenue par le Tribunal.
C’est la raison pour laquelle l’AFPS et l’OLP ont décidé de faire appel du jugement du 30 mai devant la Cour d’appel de Versailles.
L’AFPS ne manquera pas de donner toute information utile sur le déroulement de cette action.
Paris le 10 juillet 2011