Si vous ne vous déplacez pas en Cisjordanie, vous n’avez aucun moyen de comprendre les difficultés quotidiennes que rencontrent les gens ordinaires qui doivent vivre chaque jour sans savoir ce que la journée va leur apporter.
Y aura-t-il un couvrre-feu, un nouveau check-point, du retard pour aller au travail ? Chacun-e se demande : « est ce que je vais être arrêté-e, subir des heures d’interrogatoire, être tué-e peut-être ? »C’est avec ces questions que commence la journée pour les Palestiniens. Quant aux Palestiniennes, elles ont des préoccupations qui exigent des réponses immédiates.
L’Union générale des Femmes palestiniennes (UGFP) répond aux préoccupations des femmes confrontées à ces problèmes et travaille à trouver des actions immédiates de façon non violente.
J’ai eu l’occasion de rencontrer ce dynamique groupe de femmes quand notre groupe (Siraj [1]) est venu à Jénine samedi 2 août 2008. Notre bus nous as amenés au Centre des Femmes pour y rencontrer des membres de l’UGFP et échanger de façon informelle avec elles. L’Union, non politique, est membre de l’OLP mais accueille des femmes d’autres partis. Les femmes aident les femmes, le but étant de développer le rôle des femmes au niveau national.
Le soutien aux femmes emprisonnées, l’aide psychologique pour celles dont le mari est en prison ou a été tué et qui doivent élever seules leurs enfants, sont des préoccupations majeures. Un autre objectif est de récolter des signatures pour protester contre l’occupation et la construction du Mur de séparation. L’éducation sociale, pour que les femmes prennent conscience de leurs droits et de leurs devoirs, est un élément essentiel du programme qui propose aux femmes une formation en informatique et leur procure des informations pratiques, sur la formation de coopératives agricoles par exemple.
Les femmes sont confrontées à des problèmes quand leurs maris, qui subvenaient aux besoins financiers de la famille, sont en prison. La plupart des Palestiniens sont passés en prison et des femmes aussi . Bien que les chiffres changent tous les jours, on estime qu’il reste environ 11 000 Palestinien-ne-s aujourd’hui dans les prisons israéliennes. Certains sont incarcérés depuis de nombreuses années.
Chaque jour les citoyens de Jénine risquent la détention ou l’emprisonnement, Une femme explique que parfois les enfants sont traînés en prison pour avoir fait les bravaches, jeté des pierres ou été au mauvais endroit au mauvais moment . « C’est un souci permanent ».
L’UGFP s’interroge sur ce que les femmes peuvent faire pour surmonter une situation où elles se retrouvent seules avec une jeune famille à élever. Comment utiliser les compétences, quelles nouvelles compétences sont nécessaires pour continuer ?
L’Union est une coopération de femmes. Certaines sont compétentes en agriculture, d’autres en artisanat, d’autres ont une bonne éducation et des diplômes élevés et peuvent enseigner aux autres. Toutes voient leurs talents utilisés.
Tamam Qnawei est la présidente de l’Union à Jénine. Elle décrit ce qui s’est passé pendant la deuxième Intifada en 2002 et les changements qui ont entraîné la situation actuelle.
A Jénine, la répression a été particulièrement violente. “ Les Israéliens ont tué des enfants, des mères et des hommes,” dit Tamam, “mais nous sommes forts et ils n’ont pas tué notre esprit”. Elle dit que la résistance qui a commencé en 1967 est une résistance populaire pacifique.
Mais la deuxième Intifada, qui a commencé en 2000, a pris une nature politique plus violente. La visite de Sharon à la Mosquée Al-Aqsa a déclenché des émeutes et toute une série de représailles.
La réponse israélienne a été particulièrement brutale à Jénine. Des (avions)F-16 ont démoli des quartiers entiers. Tous les bâtiments ont été fermés, l’intérieur mis à sac et détruit. Les hommes ont été abattus devant les femmes et les enfants. “A voir leurs pères et leurs frères tués sous leurs yeux, les enfants ont commencé à comprendre comment agir ”, dit Tamam , “les hommes étaient emprisonnés et leurs femmes n’avaient pas le droit de leur rendre visite.Ca a entraîné des représailles.”
“Aujourd’hui la pauvreté et le chômage sont très répandus, et il y le mur, pas de possibilité de se déplacer, alors moins de femmes peuvent venir à l’Union.”
Les visiteurs membres de Siraj voulaient savoir quel message les femmes de l’Union voulaient transmettre aux Etats-Unis. Alors Tamara a répondu :
“Nous voulons vivre en sécurité, nous déplacer librement, donner une éducation à nos enfants. Nous voulons une vie saine, une vie décente avec une bonne situation économique -pas une économie qui dépend d’Israël. .”
Amneh Darymeh, qui enseigne à l’Université libre de Jérusalem (Al-Quds Open University) nous a dit : “Nous voulons que le monde écoute notre point de vue, que ce ne soit pas seulement un côté ». Elle a ajouté qu’il est important de connaître les sources des financements et quelles sont les conditions posées pour les obtenir .
Les femmes de l’Union affirment avoir la conviction qu’un jour elles pourront créer une ville qui répond aux besoins des femmes avec des magasins qui vendent de tout, des connections Internet, des bibliothèques, une station de télévision et une banque qui prête de l’argent aux femmes.
“Israël devrait nous donner une chance de vivre avec l’aide de tous les gens qui aiment la paix,” a ajouté Amneh.