Des soldats israéliens ont restitué la dépouille d’un adolescent palestinien tué en octobre en Cisjordanie occupée, pour se voir répondre par la famille qu’il s’agissait du corps d’une autre personne.
Cette confusion macabre, que l’armée a qualifiée d’"erreur malheureuse", était susceptible d’attirer l’attention sur la politique israélienne consistant à conserver les dépouilles de Palestiniens tués alors qu’ils étaient soupçonnés d’avoir commis des attentats, ce qui, selon les groupes de défense des droits de l’homme, équivaut à une punition collective des familles endeuillées.
Israël avait prévu de restituer les corps de deux Palestiniens - Isra Khazimia et Amjad Abu Sultan - pour des "raisons humanitaires". Au moment des attaques présumées, Isra Khazimia aurait eu des problèmes de santé mentale et qu’Abu Sultan était mineur.
Mais lorsqu’ils ont remis la dépouille d’Abu Sultan, sa famille a informé les soldats qu’il s’agissait du mauvais corps. La dépouille n’a pas été identifiée publiquement.
"Au retour du corps, il a été révélé que le corps avait été identifié de manière incorrecte. Cette malheureuse erreur est en cours d’examen par les autorités compétentes", a déclaré l’armée israélienne dans un communiqué. Elle a présenté ses excuses pour cette erreur et a déclaré que la dépouille correcte serait rendue à la famille samedi.
Le Comité palestinien des affaires civiles, qui coordonne les activités quotidiennes avec Israël, a déclaré que c’est la famille d’Abu Sultan qui a remarqué que le corps n’était pas celui de leur fils. La famille n’a pas pu être jointe immédiatement pour un commentaire.
Abu Sultan, 14 ans, a été tué le 14 octobre dans la ville de Beit Jala, près de Bethléem, en Cisjordanie occupée.
Un témoin a déclaré que les soldats israéliens ont tiré sur Abu Sultan, qui allumait un cocktail Molotov, sans aucun avertissement ni alerte.
"Les forces israéliennes tuent régulièrement et illégalement des enfants palestiniens en toute impunité, en recourant à une force excessive et à une force létale intentionnelle injustifiée", a déclaré Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation de Defense for Children International-Palestine, après la mort d’Abu Sultan.
La police israélienne a abattu Khazimia, mère de quatre enfants, en septembre, alors qu’elle aurait tenté de poignarder un agent dans la vieille ville de Jérusalem. Sa dépouille a été restituée au poste de contrôle de Salem, près de la ville de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie.
Selon des sources locales, l’armée israélienne a interdit aux Palestiniens de se rassembler près du poste de contrôle et n’a autorisé que le père de Khazimia à être présent pour recevoir son corps, ainsi qu’un véhicule d’ambulance conduit par le seul chauffeur.
Israël affirme que sa politique de détention des dépouilles d’agresseurs palestiniens est nécessaire pour dissuader de futures attaques et pour d’éventuels échanges avec les dépouilles de deux soldats israéliens détenus par le groupe palestinien Hamas dans la bande de Gaza.
Selon le groupe de défense des droits de l’homme Jerusalem Legal Aid and Human Rights Center (JLAC), Israël détient les dépouilles d’environ 80 Palestiniens, en plus des 254 corps enterrés dans de nombreux "cimetières des nombres" - des cimetières secrets où leurs tombes sont marquées par des plaques numérotées.
JLAC et Adalah Legal Center for Arab Minority Rights affirment qu’Israël est le seul pays au monde à pratiquer la nécroviolence, une politique de confiscation des restes humains, où il s’appuie sur des règlements datant de 1945 (pendant le mandat britannique) pour justifier sa politique.
Le droit international considère cette pratique comme une violation des droits de l’homme. Selon les Conventions de Genève, les parties à un conflit armé doivent enterrer les défunts de manière honorable, "si possible selon les rites de la religion à laquelle ils appartenaient et que leurs tombes soient respectées, convenablement entretenues et marquées de telle sorte qu’elles puissent toujours être reconnues".
Traduction : AFPS