Les réactions occidentales se sont fait attendre concernant la dramatique escalade de la violence au Proche-Orient. Depuis lundi, le Hamas tire contre Israël des centaines de roquettes, blessant trois Israéliens, dont un grièvement, à Ashdod. Mardi à minuit, l’armée israélienne lançait en représailles l’opération militaire Bordure protectrice, qui a déjà fait une centaine de morts du côté palestinien, dont un grand nombre de civils. Face à la gravité de la situation, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas exhorte depuis mardi la communauté internationale à "intervenir immédiatement".
Le premier responsable occidental à réagir est le secrétaire général de l’ONU. "Ces tirs sans discernement contre des zones civiles doivent cesser", a affirmé mardi son porte-parole. Or, Ban Ki-moon ne visait pas les bombes israéliennes, mais les roquettes du Hamas s’abattant sur l’État hébreu (au moins 500 depuis lundi, dont plus de 100 ont été interceptées par le système de défense Iron Dome, NDLR). Le patron de l’ONU a toutefois appelé les deux camps à "exercer le maximum de retenue" et à "éviter de nouvelles pertes civiles". Une déclaration dans l’exacte lignée de celles qui ont suivi les opérations israéliennes sur Gaza Plomb durci (2008-2009, 1 400 morts palestiniens et 13 victimes israéliennes) et Pilier de défense (novembre 2012, 177 morts palestiniens, 6 victimes israéliennes).
Or, une fois de plus, le message n’est pas passé au Proche-Orient. Les tirs de roquettes du Hamas ont continué de plus belle, contre Jérusalem, Tel-Aviv, Haïfa (un record) et la région de Dimona, où se trouve une centrale nucléaire. Idem pour les raids israéliens, qui se sont intensifiés sur le territoire palestinien. Vendredi midi, Bordure protectrice avait fait depuis son lancement au moins 100 victimes palestiniennes à Gaza. Tsahal a beau assurer que les populations sont prévenues en amont des bombardements à venir, 15 femmes et enfants ont été tués. Une spirale infernale qui a enfin amené François Hollande à réagir, sous la forme d’un communiqué. Et il est sans appel.
Soutien inconditionnel à Israël
La "France condamne fermement les agressions" contre Israël, a affirmé le président de la République, qui venait d’assurer Benyamin Netanyahou de sa "solidarité" avec Israël. Rappelant, comme à l’accoutumée, la "nécessité de prévenir l’escalade de la violence", le président français est allé bien plus loin que Ban Ki-moon. "Il appartient au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces", a-t-il souligné dans le communiqué. Si la condamnation des tirs de roquettes palestiniennes est entièrement justifiée, le chef de l’État n’a eu, en revanche, aucun mot pour les pertes civiles palestiniennes.
Un soutien inconditionnel à Israël qui fait des vagues au sein de la gauche française. "Le président de la République a témoigné son entière solidarité envers Benyamin Netanyahou et apporté son soutien à la politique de représailles menée par Israël, laquelle frappe aveuglément les populations civiles palestiniennes, a déploré Europe Écologie-Les Verts (EELV) dans un communiqué. EELV s’oppose à ce point de vue qui justifie par avance toutes les opérations militaires (raids aériens et attaques terrestres), particulièrement sur la bande de Gaza, au motif de prévenir le terrorisme."
Dès la nuit suivante, de mercredi à jeudi, Tsahal a accentué ses raids contre l’enclave palestinienne, affirmant avoir visé plus de 320 cibles du Hamas, tuant 14 Palestiniens. Dans un café de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, huit personnes qui regardaient la demi-finale de la Coupe du monde entre l’Argentine et les Pays-Bas sont mortes au cours d’une frappe, selon le porte-parole des services d’urgences, Achraf al-Qodra. Toujours dans cette ville, quatre femmes et quatre enfants ont péri dans leurs maisons bombardées alors qu’un cinquième mineur a trouvé la mort lors d’un raid à Beit Lahia, dans le nord de Gaza.
"Chant d’amour pour les dirigeants d’Israël"
En France, l’indignation a aussi gagné les rangs du PS. "En aucun cas, la France ne doit laisser penser qu’elle cautionne les violences ou les représailles militaires", ont souligné, jeudi dans un communiqué, les députés socialistes Razzy Hammadi et Alexis Bachelay. "La première conséquence de l’usage disproportionné de la force contre les Palestiniens est la mort de plusieurs dizaines de civils, dont de nombreux enfants. La France doit, au contraire, clairement condamner toutes les représailles militaires."
La dramatique aggravation des violences sur le terrain a finalement amené jeudi Ban Ki-moon à infléchir sa position. Les civils à Gaza "sont pris entre l’attitude irresponsable du Hamas et la dure riposte d’Israël", a souligné le secrétaire général de l’ONU alors que le nombre de victimes palestiniennes continuait d’augmenter. "Israël a des préoccupations légitimes pour sa sécurité, mais je suis inquiet aussi de voir de nombreux Palestiniens périr ou être blessés à la suite des opérations israéliennes."
Est-ce cette sortie de Ban Ki-moon ou alors la levée de boucliers de quelques voix à gauche qui a influencé François Hollande ? En tout cas, le président de la République a, lui aussi, décidé jeudi de mesurer son discours. À la faveur d’un nouveau communiqué, le second en moins de vingt-quatre heures, le chef de l’État a finalement "déploré que les opérations militaires en cours aient déjà fait de nombreuses victimes palestiniennes". "La sécurité de toutes les populations civiles doit être assurée et l’escalade doit cesser", a souligné François Hollande à l’issue d’un entretien avec Mahmoud Abbas. Et de rappeler que "la France reste mobilisée pour aider Israéliens et Palestiniens à atteindre cet objectif".
Reste à savoir si le président français osera brusquer son indéfectible allié au Proche-Orient. En novembre 2013, à l’occasion d’une visite en Israël, François Hollande n’a-t-il pas déclaré à Benyamin Netanyahou qu’il trouverait toujours "un chant d’amour pour Israël et pour ses dirigeants" ?