S’agissant du nombre d’enfants habitant Jérusalem-Est, une nouvelle étude affirme que les autorités israéliennes disposent de chiffres contradictoires ce qui ne leur permet pas de répondre de manière satisfaisante à leurs besoins éducatifs. Publié mardi par deux associations des droits de l’Homme, ce rapport accuse plusieurs politiques d’avoir un caractère discriminatoire. Et il fournit diverses informations le démontrant, notamment dans le domaine de la fourniture de services publics, les écoles primaires de Jérusalem-Est ne bénéficiant pas de la même qualité que celle assurée aux établissements de l’ouest. Le rapport dénonce également la non application par le ministère de l’Education et la municipalité de Jérusalem de la décision de la Cour suprême ordonnant l’ouverture de nouvelles classes à Jérusalem-Est.
Le rapport point les écarts entre les statistiques, selon qu’elles proviennent du registre de la population de la mairie de Jérusalem (qui recense 106 534 enfants non juifs âgés de 6 à 18 ans dans la partie est) ou de l’autorité administrative en charge de l’éducation dans la ville, Manhi en abrégé et en hébreu (qui comptabilise 88 845 enfants palestiniens, dont 86 018 inscrits à l’école).
"Si sur106 534 enfants, 86 018 seulement sont scolarisés, alors une simple soustraction suffit pour montrer que 20 516 n’ont pas fréquenté une institution scolaire connue de la Manhi", remarquent l’Association pour les droits civiques en Israël (ACRI) et l’association Ir Amin, auteurs du rapport.
Répondant à une question du Times of Israel, un porte-parole du ministère de l’Education a affirmé que la situation de tous les enfants en âge de fréquenter l’école était connue. Environ 70 000 enfants arabes habitant Jérusalem-Est sont inscrits dans les écoles officielles, placées sous la responsabilité de la mairie ; et 20 000 autres fréquentent divers établissements non officiels, notamment ceux administrés par l’Autorité Palestinienne ou l’ONU. La porte-parole du ministère a assuré que "aucun enfant n’a été oublié" sans expliquer, toutefois, l’écart de 15 000 subsistant dans le nombre d’élèves.
Ce rapport, version actualisée de celui qui paraît tous les ans, accuse les autorités israéliennes de mettre en oeuvre diverses politiques qui, prises ensemble, témoignent de l’existence de discrimination systématique à l’encontre des écoliers arabes de Jérusalem. Le rapport cite les informations communiquées par le maire adjoint de la ville, Pepe Alalu, selon lequel il manque 1 100 salles de classe dans la partie est de la ville. Alors que les autorités en sont informées et ont pris certaines mesures pour améliorer la situation, seules 33 salles ont été construites durant l’année scolaire 2011-2012. Pourtant, suite à une pétition présentée par l’ACRI, la Cour suprême a ordonné, en 2011, que l’écart numérique en termes de nombre de classe entre les parties est et ouest de Jérusalem soit comblé d’ici 2016.
Nisreen Alyan, de l’ACRI, a appelé "la mairie de Jérusalem et le ministère de l’Education à consacrer et de manière urgente plus de fonds à l’enseignement dans la partie est. La Cour suprême leur a donné cinq ans pour ce faire, à défaut de quoi ils devront payer les frais de scolarité à la place des parents. Un tiers du délai imparti est déjà écoulé ; à ce rythme, nous allons devoir saisir à nouveau la justice." Un porte parole de la mairie a rétorqué que la ville avait investit plus de 650 million de NIS pour développer l’éducation à Jérusalem-Est, dont 400 pour la construction de 400 salles de classe "afin de combler l’écart creusé par des décennies d’abandon".
Selon le rapport, la mairie et le ministère de l’Education sont aussi responsables du "sureffectif important" des classes à Jérusalem-Est : « Les écoles élémentaires officielles comptent en moyenne 32 élèves par classe dans la partie est contre 25 en moyenne à l’ouest ".
Le rapport attire également l’attention sur le fait que Jérusalem-Est affiche le plus fort taux d’abandon scolaire du pays : 4 élèves sur dix abandonnent le lycée avant la terminale (12th grade). Ce pourcentage est quatre fois supérieur à celui des élèves juifs inscrits à Jérusalem Ouest ou ailleurs en Israël alors que cet Etat gouverne la partie est depuis 1967 et l’a officiellement annexée en 1980.
Le rapport affirme que "Ces sombres statistiques indiquent qu’il faudrait appliquer des programmes d’action positive à Jérusalem Est pour lutter contre le phénomène d’abandon scolaire. Or, il n’en est rien et le problème est traité de manière discriminatoire ». En effet, alors que dans la partie ouest, il existe 16 centres dits "M.L.A » où les élèves qui risquent de laisser tomber l’école bénéficient d’un emploi du temps aménagé, Jérusalem-Est n’en compte que 5 du même type. Pourtant, la fréquentation des écoles officielles est la même dans les deux parties de la ville.
Oshrat Maimon, en charge des politiques et de la sensibilisation au sein de l’ONG Ir Amim, a déclaré que "Les responsables ont ignoré le droit à l’éducation de dizaines de milliers d’élèves de Jérusalem-Est en pratiquant une politique de promotion d’une communauté aux dépens de l’autre".
Les auteurs du rapport reconnaissent que les responsables de l’éducation font preuve de "bonne volonté" dans leurs tentatives de s’attaquer au problème. Mais ils soulignent que les discrimination subies depuis fort longtemps par les habitants de Jérusalem-Est sont attribuables à la politique inéquitable appliquée sans discontinuité par le gouvernement israélien depuis la prise de contrôle de la ville.
Le rapport précise : " Sur les 70 500 dunums de terres de Jérusalem-Est annexés à Jérusalem en 1967, plus de 24 500 ont été expropriés par le gouvernement d’Israël pour un usage public. Cependant, la majeure partie des terres expropriées a été affectée à la création de quartiers juifs. Les autorités chargées de la planification se sont peu souciées de satisfaire les besoins de la population palestinienne vivant sur les terres non expropriées de Jérusalem-Est et de réaliser, dans cette partie de la ville, de grands projets de construction, pour y répondre."
Traduction LS pour l’AFPS