En effet, depuis la prise de contrôle de la totalité de cette bande par les forces armées du Hamas, ces dernières ont mis en place leur « ordre » qui est d’autant plus imprévisible que ces forces et les militants du Hamas ne sont pas tous sur une ligne politique identique du fait de multiples facteurs qui ne trouvent pas leurs racines uniquement à l’étranger.
Il est donc devenu difficile, au regard de la réalité, de parler de « la force exécutive du Hamas ». Ce qui est certain, par contre, c’est que les dirigeants du Hamas ont été dépassés par leur base, devenue mosaïque d’intérêts, sur laquelle ils n’ont plus de prise réelle. Ils sont devenus plus des porte-parole des militants que des dirigeants au sens exact du terme.
Cette césure au sein du Hamas s’est produite après les Accords de La Mecque rejetés par beaucoup, y compris au sein du Fatah, pour des raisons opposées qui alimentent une dialectique dangereuse. A cela s’ajoutent les vœux, qui ne sont pas sans effets divers, d’Israël et des USA qui, relativement à ces Accords, étaient et restent clairs : c’est le rejet pur et simple de « l’entente nationale ».
L’origine de la situation actuelle d’isolement dans laquelle les militants du Hamas sont « tombés » à Gaza résulte clairement de cette suite et de cet enchevêtrement de volontés malignes diverses.
Cet ensemble très chaotique, malgré « l’ordre » imposé par les diverses forces du Hamas, provoque maintenant à Gaza deux séries de conséquences.
La première, c’est l’incapacité des dirigeants du Hamas, en particulier de ceux qui avaient souscrit finalement aux Accords de La Mecque, d’avoir une attitude marquant une volonté de reprise de dialogue clair sur une base « réaliste » et sincèrement « légaliste » avec le Fatah dont certains éléments font leur miel de cette absence. La situation de Gaza est non constitutionnelle. Il en résulte ce qui en résulte de l’autre côté. Dans cet univers de « non droit » on évoque des élections législatives anticipées, mais il est clair que sans accord politique préalable de toutes les parties celles-ci ne feraient qu’entériner la partition actuelle. Est-ce imaginable ?
Pour ne pas se couper de leurs militants, très influencés de diverses manières et par divers secteurs, les dirigeants « réalistes » du Hamas campent sur des positions très en deçà des Accords de La Mecque. Ils s’isolent de la communauté internationale laquelle n’en demandait pas tant, elle qui n’a rien fait, tout au contraire, pour encourager les avancées constatées suite à ces Accords. L’impasse politique des dirigeants du Hamas est flagrante. Ils subissent plus qu’ils n’indiquent un chemin. Il n’y a pas lieu de s’en réjouir. C’est l’évidence.
Le second élément qui accentue le premier, c’est l’attitude des diverses forces du Hamas. On ne compte plus les manifestations d’intolérance intégriste dont ils ont fait preuve vis-à-vis de la population.
Jusqu’à la montée vendredi 24 août de révoltes populaires soutenues par le Fatah et réprimées par des forces armées du Hamas. Des journalistes, dont l’un de l’AFP, ont fait les frais de cette réaction armée musclée face à une manifestation populaire pacifique. [1]
Il serait temps que les dirigeants du Hamas se ressaisissent et qu’on agisse aussi partout pour aller en ce sens. Il serait illusoire de penser que la Palestine pourrait être coupée en deux : une laïque et l’autre non ; illusoire de penser que sans l’union du peuple palestinien sur une base claire il puisse y avoir épingle à sortir du jeu pour quiconque ; illusoire de penser à la possibilité de l’existence de trois Etats, dont deux palestiniens.
La paix sera globale pour tous ou ne sera pas. Elle ne peut se concevoir hors un Etat palestinien et d’un seul.
Nous souhaitons vivement que, hors les pressions de toutes natures, les dirigeants du Hamas considèrent que l’intérêt suprême de leur cause c’est le peuple palestinien dans son ensemble et sa diversité.
Urgent aussi qu’ils considèrent que les divers acteurs extérieurs qui agissent derrière les diverses parties en présence se nourrissent mutuellement de ce qui en apparence les oppose radicalement. Finalement le jeu des uns ne fait que le jeu des autres. Avec comme seul vaincu et seule victime : le peuple palestinien. Avec comme seul constat « d’évidence » offert à la communauté internationale : décidemment on ne peut faire la paix avec eux.
La Conférence proposée par Bush est significative de cette volonté, soutenue par le Quartet, de ne pas avancer d’un centimètre dans la résolution du conflit « israélo-palestinien ». Il importe de faire monter l’exigence d’un accord global et final sur la base du droit international pertinent. C’est aussi de cette manière que tous les plans machiavéliques, nourris et entretenus ici et là, tomberont. La paix c’est aussi le meilleur remède aux manipulations de toutes sortes dont Gaza est un champ de manœuvre et dont le peuple palestinien est la seule victime.
En Europe, et en France, nous avons une responsabilité particulière dans cette situation car Tony Blair, qui vient d’être accroché sévèrement par les parlementaires britanniques pour sa politique au Proche et Moyen-Orient, a été nommé « envoyé spécial » de l’Union au Proche-Orient.
On ne peut le laisser faire à sa guise d’autant que nous la connaissons ! Quant à la France qui s’est focalisée sur le Liban elle ne manifeste aucune stratégie propre alors que tout est lié. Tout cela nous invite à de nouvelles initiatives, à décider de notre « Feuille de route » qui soit adaptée aux conditions actuelles.
Jean-Claude Lefort
Député honoraire
Le 26 août 2007