Soit parce que la représentation n’aura pas été telle que souhaitée avec les défections assumées ou diplomatiquement justifiées par de prétendus contretemps d’agendas nationaux ou parce que des leaders arabes utilisent les rendez-vous des sommets arabes comme une tribune privilégiée pour solder leurs comptes. L’image peu glorieuse retransmise par les télévisions du monde entier des amabilités échangées en direct au sommet de Tunis entre le roi Abdellah d’Arabie Saoudite et le colonel Maamar El Gueddafi illustre parfaitement l’étendue des divisions qui minent l’unité arabe tant proclamée mais contrariée et nourrie par la nature même des régimes arabes.
Le sommet de Damas qui s’est ouvert hier n’est donc qu’un remake des précédents sommets qui se sont presque tous terminés avec de vrais faux consensus. Les défections aux sommets arabes qui ne sont plus une exception depuis ces dernières années, notamment depuis la première guerre de l’Irak qui avait fait voler en éclats le fragile consensus arabe bâti autour du soutien à la cause palestinienne se multiplient entre deux sommets pour ne pas reconnaître l’existence d’une véritable crise dans les relations interarabes.
Lorsqu’un sommet enregistre un tel niveau de défection comme c’est le cas du sommet de Damas, c’est que fatalement la crise a atteint des seuils que les résolutions qui sortiront de ces assises, à l’instar des précédentes, ne parviendront pas à combler ni à cacher. D’autant que les pays qui ont adopté la politique de la chaise vide auront peine à justifier leur acte de boycottage dans la conjoncture politique internationale marquée par le génocide du peuple palestinien avec la complicité des grandes puissances et le silence tout aussi complice et criminel de certains régimes arabes.
Le voile s’est un peu plus levé avec la tenue à Damas, en Syrie, sur les enjeux des sommets arabes qui se nouent ailleurs que dans les capitales et sommets arabes. Le régime syrien qui est dans le collimateur des Américains pour ses positions nationalistes arabes pro-palestiniennes, un régime qui n’a pas que des amis même dans le monde arabe, apparaît comme l’alibi idéal pour les Américains. Ces derniers n’ont pas eu cette fois-ci à rivaliser d’ingéniosité pour faire capoter le sommet arabe en jouant sur les rivalités inter-arabes dont la Syrie représente un parfait microcosme. Pendant que le leader libyen se défoule devant ses pairs arabes en feignant de s’attaquer aux Américains, pendant que les dirigeants arabes absents au sommet savourent leur petite victoire qui sur l’« ennemi » syrien, qui sur l’infréquentable El Gueddafi, et sur bien d’autres abcès de fixation, et que ceux présents dans la capitale syrienne tentent de sauver la face en donnant l’illusion qu’en dépit de tout, l’unité et l’honneur arabes sont saufs, les appels au secours des enfants, des femmes et des vieillards de Ghaza et de Cisjordanie victimes du génocide de l’armée israélienne ne parviendront pas aux oreilles des dirigeants arabes réunis à Damas.