Madame la Maire de Paris,
Je viens de prendre connaissance du "voeu" que vous venez d’adopter à la Mairie de Paris sur proposition de l’exécutif municipal et je vous écris pour vous dire la consternation de la délégation de la Palestine auprès de l’UNESCO.
Quant à la forme pour commencer avec sa liste de "considérants", qui ressemblent fort aux "attendus" d’un jugement émis par un tribunal de l’Inquisition qui, dans la grande tradition de cette dernière, ne se serait pas encombré d’entendre la version de la partie injustement incriminée.
Quant au fond également. Vous auriez-vous donné la peine de lire le texte de la Résolution coupable selon vous de négationnisme, vous auriez découvert que le texte en question souligne, en toutes lettres et à deux reprises, la centralité de Jérusalem d’une part, d’Hébron et de Béthléem d’autre part, pour les trois religions monothéistes.
Auriez-vous poussé un peu plus loin votre nécessaire quête de la vérité, vous auriez découvert que le texte que vous accusez de tous les maux est un projet conjoint rédigé à la fois par la Palestine et la Jordanie.
La Palestine que j’ai l’honneur de représenter, dont vous avez dernièrement honoré le Président pour son adhésion tenace à une paix juste et à une réconciliation véritable.
La Jordanie qui, comme vous le savez est signataire d’un Traité de paix avec Israël, et dont le monde entier, gouvernement israélien en tête, s’accorde à louer la politique constructive et pacifique.
La Palestine et la Jordanie qui se retrouvent accusées selon vous d’œuvrer à délégitimer une religion, "en l’espèce le judaisme", propos que nous jugeons proprement insultants pour sa Majesté le Roi de Jordanie et le Président de l’Etat de Palestine.
Insultants également pour les vingt-quatre Etats souverains qui ont voté en faveur de l’adoption de la résolution, rétifs aux pressions et menaces de représentant de l’actuel gouvernement d’extrême droite israélien.
Vous abordez la question d’une "dénomination", celle que nous avons effectivement refusé d’adopter.
Permettez-moi de vous dire qu’auriez-vous pris la peine de nous joindre, nous vous aurions expliqué que notre refus relève d’une seule et unique conviction : la demande persistante du délégué israélien, aux antipodes d’un quelconque respect des religions, ne vise qu’à une légitimation de l’annexion de la Ville occupée en 67 sous couvert du respect de la foi des citoyens juifs d’Israël. Pratique "toponymique" commune à tous les occupants de quelque religion qu’ils se prévalent.
Nous vous aurions également montré que notre mandat ne vise qu’à une seule délégitimation, celle de l’occupation de Jérusalem-Est, capitale occupée de l’Etat de Palestine.
Le ton de ma lettre peut vous paraître choquant. Il reflète l’indignation et le sentiment d’injustice flagrante que votre décision a fait naître chez nous. Vous ne nous avez pas habitués à cela.
Je termine en vous affirmant que, convaincu du grand danger que constitue le mélange de la religion et de la politique, je demeure à votre disposition pour toute explication claire et amicale.
Je joins à toutes fins utiles le texte de la Résolution incriminée et vous prie de croire, Madame la Maire de Paris, à mes respects et à notre désir de dissiper par le dialogue le malentendu né de cette décision injuste et malvenue.
Elias Sanbar