C’est la terre la plus fertile de Cisjordanie avec d’importantes
réserves d’eau souterraines, pourtant l’armée et les colonies
israéliennes contrôlent 98% de cette eau et 95% de la terre.
Olmert a déclaré ouvertement qu’il voulait annexer la Vallée du
Jourdain à Israel.
Une nouvelle fois, j’utilise mon ’privilège’ en tant qu’international.
Les Palestiniens sont empêchés d’aller dans cette partie de leur pays.
Pour y aller là, doivent remplir un de ces trois conditions :
1. Ils doivent vivre dans la région de la Vallée du Jourdain, dans ce
cas ils obtiennent une carte d’identité de la Vallée du Jourdain : ils
ne sont pas autorisés à s’y déplacer sauf s’ils y vivaient déjà avant
que les restrictions aient été appliquées.
2. Ils travaillent dans l’une des colonies israéliennes - dans ce cas,
la colonie leur fournit une autorisation provisoire pour entrer dans le
secteur.
3. Ils ont obtenu une autorisation du DCO qui a été acceptée par l’armée.
Nous avons la chance d’avoir un hôte qui vit ici et qui possède la
bonne carte d’identité.
Il y a une ligne de montagnes entre la Vallée du Jourdain et le reste
de la Cisjordanie, donc pour y arriver sans passer par l’un des
nombreux checkpoints, vous devez passer par les montagnes, ce qui prend
au moins 3 heures.
C’est également très dangereux car l’armée israélienne utilise les
montagnes pour les ’exercices’ et elle y a planté des mines terrestres.
Après avoir passé les checkpoints, nous avons pris la quatre -voies,
entourée de plantations de colons.
Nous avons pu voir les maisons blanches des colonies israéliennes - il
y a 6.400 colons dans la Vallée du Jourdain.
Nous avons également vu les maisons des 52.000 Palestiniens qui vivent
toujours ici.
Il y a de petits villages de maisons en béton, et d’autres ressemblent
plus à des villes fantômes, avec des maisons faites de zinc et de
plastique.
Ce n’est pas parce qu’ils sont pauvres - bien qu’ils le soient vraiment
– c’est parce que ici les Palestiniens n’ont pas le droit de construire
de nouvelles maisons, ou même de rénover ou de réparer leurs maisons
existantes. Tous les villages ont eu leur terre volée, sauf quelques
maigres champs et ils sont entourés par les colonies.
Il n’y a aucun transport en commun ici, donc nous avons dû louer un
taxi pour la journée - naturellement, le chauffeur de taxi devait
posséder une carte d’identité ou une autorisation qui lui permettait
d’entrer dans ce secteur.
Nous avons insisté pour que le taxi ralentisse, qu’il s’arrête, pour
que nous puissions prendre des photos, mais on nous a dit que l’armée
et les colons contrôlaient ces routes, et qu’il n’était pas autorisé à
une voiture palestinienne de s’arrêter.
Quand nous avons réussi à le persuader de s’arrêter, il a immédiatement
bondi hors de la voiture, ouvert le capot, et feint de remettre de
l’eau.
Pour toute personne qui vit ici dans la Vallée du Jourdain : Exister, c’EST résister.
Il y a très peu de soins médicaux, l’éducation est limitée, il n’y a
aucune ligne téléphonique ou de transport en commun, et souvent il n’y
a pas d’électricité.
Il n’y a pas d’université.
Si les gens quittent la Vallée du Jourdain, alors ils peuvent plus
facilement accéder à ces services pour leur famille, mais ils perdront
leur carte d’identité de la Vallée du Jourdain et leur droit à y vivre.
A chaque fois que quelqu’un fait cela, c’est une petite victoire pour
IsraËl qui a pour objectif de faire partir tous les Palestiniens de ce
secteur. Chaque Palestinien que nous avons rencontré nous l’a dit.
Nous y avons passé une journée, nous avons vu des maisons qui avaient
été démolies, une école où l’enseignement se fait sous des tentes, les
fermiers qui luttent pour pouvoir surmonter toutes les restrictions
qu’Israël leur impose pour vendre leurs produits et survivre. Nous
rédigerons bientôt un article sur le sujet.
À la fin de la journée, nous étions dans le village de Bardala, au nord
de la Vallée du Jourdain, et nous voulions aller à Tubas, la ville la
plus proche qui est située à 20 kilomètres.
Notre hote pourrait faire ce voyage en passant par le checkpoint de
Tayasir, et serait à la maison dans l’heure si le checkpoint le
laissait passer. Sans checkpoint, cela lui prendrait juste 20 minutes.
Cependant, en tant qu’internationaux, nous ne pouvons pas utiliser ce
point de contrôle.
La meilleure chose pour nous serait d’aller passer la nuit à Jérusalem.
Mais notre hôte est Palestinien et non résident de Jérusalem. Il ne
peut pas donc entrer dans Jérusalem. Il a la mauvaise carte d’identité.
Nous avons donc entamé un voyage de 200km. Nous avons pris la quatre-voies en direction du sud vers Jéricho.
À Al Auja, nous avons tourné vers l’ouest pour passer les montagnes.
Rapidement, nous nous sommes retrouvés dans une file d’attente à un
checkpoint à l’extérieur de la Vallée du Jourdain.
A nouveau, montrer les papiers d’identité et les passeports.
Nous avons eu un voyage assez calme alors que nous circulions sur les
nombreuses routes venteuses à travers les villages et Beir Zeit.
Puis, au checkpoint de Huwara, nous avons dû sortir de notre taxi et
traverser le checkpoint à pied, mais personne n’a vérifié nos
passeports et nos identifications.
Nous avons pris un autre taxi, et j’ai pensé que nous allions en
direction de Tubas.
Rien n’est jamais si simple ici.
Un peu plus loin, après plusieurs tronçons de routes très accidentées
qui avaient été défoncés par l’armée, le taxi s’est arrêté.
Nous étions sur une sombre route de campagne sans éclairage mais notre
hôte palestinien est sorti de la voiture comme si tout était normal.
Devant nous, le blocage de la route était un monticule de terre
d’environ 2 mètres de haut.
Nous l’avons enjambé, en glissant un peu mais sans se faire mal, nous
avons descendu la route un peu plus loin pour tomber sur un autre
monticule de terre, mais cette fois, il était possible de suivre un
chemin pour le contourner.
Et là, nous avons trouvé plusieurs taxis qui attendaient des clients
comme si c’était la chose la plus normale au monde.
Nous avons pris un taxi, qui, quelques mètres en bas de la route, a
conduit avec précaution sur les traces qui s’étaient formées vers
encore un autre monticule de terre qui bloquait la route, puis, enfin,
Tubas.
Nous avons rencontré beaucoup de gens au cours des deux derniers jours
et nous avons vu la réalité de l’Apartheid israélien qui est imposé aux
Palestiniens.
En dépit de cela, tout le monde nous a souhaité la bienvenue, et nous
a offert plus de nourriture, de thé et de café qu’il serait jamais
possible de consommer.