Les docteurs Mads Gilbert et Erik Fosse, qui interviennent dans la région depuis une vingtaine d’années avec l’organisation non gouvernementale (ONG) norvégienne Norwac, ont pu sortir du territoire la veille, avec quinze blessés graves, par la frontière avec l’Egypte. Non sans ultimes obstacles : "Il y a trois jours, notre convoi, pourtant mené par le Comité international de la Croix-Rouge, a dû rebrousser chemin avant d’arriver à Khan Younès, où des chars ont tiré pour nous stopper", ont-ils dit aux journalistes présents à Al-Arish.
Deux jours plus tard, le convoi est passé, mais les médecins, et l’ambassadeur de Norvège venu les accueillir, furent bloqués toute la nuit "pour des raisons bureaucratiques" à l’intérieur du terminal frontalier égyptien de Rafah, entrouvert pour des missions sanitaires seulement. Cette nuit-là, des vitres et un plafond du terminal furent cassés par le souffle d’une des bombes lâchées à proximité.
"A 2 mètres, le corps est coupé en 2 ; à 8 mètres les jambes sont coupées, brûlées "
"A l’hôpital Al-Chifa, de Gaza, nous n’avons pas vu de brûlures au phosphore, ni de blessés par bombes à sous-munitions. Mais nous avons vu des victimes de ce que nous avons toutes les raisons de penser être le nouveau type d’armes, expérimenté par les militaires américains, connu sous l’acronyme DIME – pour Dense Inert Metal Explosive", ont déclaré les médecins.
Petites boules de carbone contenant un alliage de tungstène, cobalt, nickel ou fer, elles ont un énorme pouvoir d’explosion, mais qui se dissipe à 10 mètres. "A 2 mètres, le corps est coupé en deux ; à 8 mètres, les jambes sont coupées, brûlées comme par des milliers de piqûres d’aiguilles. Nous n’avons pas vu les corps disséqués, mais nous avons vu beaucoup d’amputés. Il y a eu des cas semblables au Liban sud en 2006 et nous en avons vu à Gaza la même année, durant l’opération israélienne Pluie d’été. Des expériences sur des rats ont montré que ces particules qui restent dans le corps sont cancérigènes", ont-ils expliqué.
Un médecin palestinien interrogé, dimanche, par Al-Jazira, a parlé de son impuissance dans ces cas : "Ils n’ont aucune trace de métal dans le corps, mais des hémorragies internes étranges. Une matière brûle leurs vaisseaux et provoque la mort, nous ne pouvons rien faire." Selon la première équipe de médecins arabes autorisée à entrer dans le territoire, arrivée vendredi par le sud à l’hôpital de Khan Younès, celui-ci a accueilli "des dizaines" de cas de ce type.
Les médecins norvégiens, eux, se sont trouvés obligés, ont-ils dit, de témoigner de ce qu’ils ont vu, en l’absence à Gaza de tout autre représentant du "monde occidental" – médecin ou journaliste : "Se peut-il que cette guerre soit le laboratoire des fabricants de mort ? Se peut-il qu’au XXIe siècle on puisse enfermer 1,5 million de personnes et en faire tout ce qu’on veut en les appelant terroristes ?"
Arrivés au quatrième jour de la guerre à l’hôpital Al-Chifa qu’ils ont connu avant et après le blocus, ils ont trouvé un bâtiment et de l’équipement "au bout du rouleau", un personnel déjà épuisé, des mourants partout. Le matériel qu’ils avaient préparé est resté bloqué au passage d’Erez.
"Quand cinquante blessés arrivent d’un coup aux urgences, le meilleur hôpital d’Oslo serait à la peine, racontent-ils. Ici, les bombes pouvaient tomber dix par minutes. Des vitres de l’hôpital ont été soufflées par la destruction de la mosquée voisine. Lors de certaines alertes, le personnel doit se réfugier dans les corridors. Leur courage est incroyable. Ils peuvent dormir deux à trois heures par jour. La plupart ont des victimes parmi leurs proches, ils entendent à la radio interne la litanie des nouveaux lieux attaqués, parfois là où se trouve leur famille, mais doivent rester travailler… Le matin de notre départ, en arrivant aux urgences, j ai demandé comment s’était passé la nuit. Une infirmière a souri. Et puis a fondu en larmes."
A ce moment de son récit, la voix du docteur Gilbert vacille. "Vous voyez, se reprend-il en souriant calmement, moi aussi…" [1]
De même, selon Human rights watch, traduit par ISM,
Israël utilise du phosphore blanc dans la bande de Gaza
Israël doit arrêter l’utilisation du phosphore blanc dans les opérations militaires dans les zones densément peuplées de la bande de Gaza, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Le 9 et 10 Janvier, 2009, des chercheurs de Human Rights Watch en Israel ont observé plusieurs explosions aériennes de phosphore blanc tiré par l’artillerie sur ce qui semblait être la ville de Gaza et la région de Jabaliya.
Israël semble utiliser du phosphore blanc comme "obscurant" (un produit chimique utilisé pour masquer les opérations militaires), une utilisation autorisée en principe par le droit international humanitaire (lois de la guerre).
Cependant, le phosphore blanc a un effet incendiaire qui peut brûler gravement les personnes et les structures, les champs, et autres biens civils à proximité de l’incendie. Le potentiel de dommages pour les civils est amplifié par la forte densité de population dans la bande de Gaza qui est l’une des plus élevées du monde.
"Le phosphore blanc peut incendier les maisons et causer d’horribles brûlures quand il est en contact avec la peau », a déclaré Marc Garlasco, un analyste militaire de Human Rights Watch. "Israël ne devrait pas l’utiliser dans les zones fortement peuplées de la bande de Gaza."
Human Rights Watch estime que l’utilisation du phosphore blanc dans les zones densément peuplées de la bande de Gaza viole les exigences du droit international qui demande de prendre toutes les précautions possibles pour éviter les blessures des civils et les décès.
Cette préoccupation est aggravée par les preuves techniques publiées par les photographies dans les médias, qui témoignent des explosions dans l’air de bombes au phosphore blanc. Les explosions aériennes de bombes au phosphore blanc disséminent 116 galettes incendiaires sur une superficie de 125 à 250 mètres de diamètre, en fonction de l’altitude de l’explosion, exposant ainsi plus de civils et infrastructures civiles aux dommages potentiels qu’une explosion terrestre localisée.
Depuis le début de l’offensive terrestre d’Israël à Gaza, le 3 Janvier 2009, il y a eu de nombreux rapports des médias sur une possible utilisation de phosphore blanc par les Forces de défense israéliennes (FDI).
L’armée israélienne a déclaré à Human Rights Watch aux journalistes qu’elle n’utilisait pas de phosphore blanc dans la bande de Gaza.
Le 7 Janvier, un porte-parole des FDI a déclaré à CNN, "je peux vous dire avec certitude que le phosphore blanc n’est absolument pas être utilisé."
[2]