Depuis plus de cinq ans, la situation se préparait à ce moment, au moins pour Israël. Alors que les projets d’Israël de n’offrir aux Palestiniens que 40 pour cent de la Cisjordanie pour y créer leur « état » date des années quarante, cela a pris tout ce temps aux Israéliens pour mettre réellement ces plans en application et faire que le monde leur tape sur l’épaule en les approuvant de le faire.
Cependant, la facilité et la rapidité avec lesquelles le monde est tombé dans le piège de la propagande israélienne et a adhéré à la ligne israélienne ont été une surprise même pour les personnes les plus impassibles dans ce conflit déséquilibré.
Les Etats unis, comme toujours depuis la création d’Israël, ont joué le rôle de meneur des supporters d’Israël, soufflant sur le feu des condamnations et accusations contre le nouveau gouvernement palestinien.
Les dollars US ont été vite enlevés à l’Autorité nationale Palestinienne et le gouvernement Hamas a été rejeté au niveau diplomatique par tout ce qui peut représenter officiellement les Etats unis.
L’Union européenne n’était pas loin derrière. La semaine dernière l’UE a annoncé qu’elle allait geler tout financement au tout nouveau gouvernement palestinien dirigé par le Hamas tant que ce dernier ne renoncerait pas au terrorisme et ne reconnaîtrait pas le droit à l’existence d’Israël. Déjà deux sources essentielles de financement ont disparu avant même que le Hamas ait eu le temps de lever la tête, avant qu’il ait eu le temps de rebondir après l’euphorie de la victoire électorale.
La communauté internationale, si elle est cruelle, n’est certainement pas naïve. Elle sait que couper les vivres à l’Autorité palestinienne déjà à court d’argent et dépendante aura des effets dévastateurs qui vont ricocher dans toute la société palestinienne.
Le 12 avril les organisations de l’ONU se sont réunies à Jérusalem et ont mis en garde contre une crise humanitaire dans les Territoires palestiniens occupés si on arrachait du bras de l’ANP la perfusion du financement international.
C’est certain, une crise va survenir, étant donné la vulnérabilité des Palestiniens et leur dépendance de l’aide internationale. L’ANP emploie 152,000 fonctionnaires qui font à leur tour vivre plus d’un million de personnes qui dépendent d’eux. Ceci revient 25 % de la population en Cisjordanie et à Gaza. Aussi, si les salaires de ces employés ne leur sont pas versés, cela signifie une augmentation énorme du chômage, l’envol des niveaux de pauvreté et la plongée des niveaux de revenus. Selon les estimations des Nations unies, le taux de pauvreté a déjà grimpé de 25 pour cent en 2000 à 56 pour cent aujourd’hui. Si le statut quo continue, ce taux pourrait atteindre le niveau considérable de 74 pour cent.
Cette situation terrible est considérablement aggravée par les mesures oppressives d’Israël sur le terrain. Les bouclages, les interdictions de se déplacer, et les sièges ont ruiné l’économie, empêchant des dizaines de milliers de gens de se rendre à leur travail à l’intérieur d’Israël ou même dans d’autres endroits en Palestine.
Des centaines de personnes ont perdu leur emploi ou on été contraintes à accepter de maigres salaires par rapport à ce qu’elles gagnaient avant chez des employeurs israéliens, parce qu’Israël ne délivre plus de permis de travail ou qu’elles ne peuvent plus accéder à leurs lieux de travail à cause des nouveaux points de contrôle ou du mur d’apartheid.
Et puis il y a ceux qui sont coupés de leurs terres, leur seule source de subsistance. Les fermiers sont coupés de leurs récoltes qui dépérissent et pourrissent car personne ne peut les récolter. Ils sont humiliés par les soldats israéliens qui sont chargés des quelques portails dans le Mur qui leur permettent d’accéder à leurs champs. Par fois ils ne sont pas autorisés à y accéder ou ils doivent attendre des heures que l’autorisation leur soient donnée.
La liste est longue. Il y a ceux qui ont été complètement dépossédés de leurs terres au profit des colonies israéliennes ou pour la construction du Mur. Il y a ceux qui croupissent dans les prisons israéliennes et qui ont des familles, des enfants à nourrir.
Et il y a tous ceux qui ont perdu la vie.
C’est là que la boucle est bouclée. Avec la campagne israélienne en plein essor, les responsables déblatérant et hurlant contre l’organisation terroriste qui est maintenant à la tête des Palestiniens,ils ont finalement reçu le feu vert pour faire ce qu’ils savent si bien faire, c’est à dire annihiler les Palestiniens et leur cause.
Selon le Croissant Rouge Palestinien, du 1 ou 9 avril les attaques militaires israéliennes ont causé la mort de 9 personnes. Du 7 au 11, 14 personnes ont été tuées, essentiellement à cause des bombardements israéliens sur la Bande de Gaza dans les régions de Beit Hanoun et Beit Lahiya. En un seul jour, le 8 avril, 8 Palestiniens ont perdu la vie.
Cela s’insère parfaitement dans le schéma général. Israël réalise son vieux projet de séparation d’avec les Palestiniens en leur laissant le moins de terre possible tout en maintenant une majorité juive dans ce qu’ils appellent leur « terre promise ». Et tout cela ils l’ont fait avec la bénédiction compréhensive du monde.
Ceci dit, il reste un point crucial sur lequel il faut insister, qui est que, bien que la situation soit extrêmement préoccupante en termes de problèmes humanitaires (si Israël continue à fermer les points de passage de sa frontière avec Gaza, il y aura pénurie de pain dans la Bande de Gaza), ce n’est certainement pas cela le coeur du conflit. Nous ne sommes pas en Somalie, où les enfants meurent de faim mais où la souveraineté de l’état n’est pas mise en question.
Non, le coeur du conflit en Palestine c’est qu’il s’agit d’une lutte nationale, d’un peuple qui se bat pour l’indépendance et l’autodétermination.
Qu’on supprime la cause qui empêche d’atteindre ces objectifs- à savoir l’occupation israélienne- et il n’y aura plus de crise humanitaire. Que l’on permette aux Palestiniens de travailler leurs terres, de créer leurs emplois et de développer une économie indépendante dans leur état souverain et il n’y aura plus besoin de s’inquiéter de ce que la farine ne puisse pas entrer dans la Bande de Gaza ou que des hommes et des femmes ne puissent pas se rendre sur leurs lieux de travail de l’autre côté du Mur en Cisjordanie. C’est aussi simple que ça.