La Cour Internationale de Justice (CIJ) a rendu ce vendredi 26 janvier sa décision sur les mesures conservatoires demandées par l’Afrique du Sud contre Israël au sujet du génocide en cours dans la bande de Gaza.
Elle a affirmé sa compétence à statuer sur la requête de l’Afrique du Sud dans le cadre de la Convention pour la prévention et la répression du risque de génocide et a rejeté la demande d’Israël de radier l’affaire.
Tout en rappelant que pour l’instant elle n’en était pas à statuer sur le fond, la Cour considère qu’il existe un risque sérieux de génocide et que des mesures conservatoires sont nécessaires pour préserver les droits de la population palestinienne.
Après avoir rappelé la définition du génocide – un ensemble d’actes qui visent à détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux - la présidente a décrit, nombre de rapports à l’appui, ce que subit depuis le 7 octobre la population de la bande de Gaza : des dizaines de milliers de morts et de blessés, les destructions massives de bâtiments, les déplacements forcés, la privation de nourriture, d’eau et de soins. Elle a ainsi estimé que l’existence même des habitants de la bande de Gaza est menacée et évoqué les traumatismes terribles des survivants.
Elle a également rappelé les nombreux discours déshumanisants des responsables politiques israéliens et considéré qu’il existe un lien direct entre ces discours et le risque de génocide à Gaza. Elle a considéré qu’il y avait un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé aux droits des habitants de Gaza.
En conséquence de quoi la Cour ordonne à Israël :
– de prévenir tout acte génocidaire, d’empêcher ses militaires de commettre de tels actes et d’assurer l’entrée dans la bande de Gaza de nourriture, d’eau, de médicaments et d’autres besoins humanitaires
– de s’abstenir de commettre des actes constitutifs d’un génocide et de poursuivre les auteurs d’incitation au génocide
– de soumettre sous un mois un rapport avec les mesures prises pour s’acquitter des ordonnances de la Cour.
Bien que la Cour n’ordonne pas explicitement un cessez-le-feu, l’obligation de laisser entrer l’aide humanitaire impose de facto ce cessez-le-feu.
L’AFPS se réjouit de la décision historique de la CIJ. Les décisions de la CIJ sont définitives, contraignantes et sans appel, et tous les États doivent se conformer à leurs obligations légales en prenant toutes les mesures possibles pour s’assurer qu’Israël respecte la décision de la Cour et mette en œuvre intégralement et sans délai les mesures provisoires ordonnées.
La décision de la CIJ accroît la responsabilité juridique des États qui doivent mettre fin au génocide israélien en cours.
L’AFPS s’adresse donc solennellement au gouvernement français et particulièrement à son ministre de l’Europe et des Affaires étrangères qui a affirmé la semaine dernière devant l’Assemblée nationale : « accuser Israël de génocide dépasse le seuil moral ». La première réaction de la diplomatie française n’est absolument pas conforme à gravité de la situation. Non seulement elle ne précise pas comment elle va contraindre Israël à appliquer les décisions de la Cour, mais on comprend qu’elle va contester auprès d’elle la qualification de génocide. Nous rappelons donc à messieurs Macron et Séjourné qu’au-delà de la responsabilité de la France, c’est leur responsabilité personnelle et morale dans une potentielle complicité du crime de génocide qu’ils engagent.
Les décisions de la CIJ ont été toutes prises à la quasi-unanimité de ses 17 juges, monsieur Séjourné, allez-vous reconnaître, comme la Cour vient de le faire, que le risque de génocide à Gaza est plausible ?
La démarche de l’Afrique du Sud redonne toute sa place au droit international. La France s’est engagée à respecter la décision de la Cour Internationale de Justice : il faut donc passer aux actes maintenant ! Il faut contraindre Israël à respecter les ordonnances de la Cour ? C’est une obligation autant juridique que morale.
Il ne suffit pas de rappeler à Israël qu’il doit se conformer au droit, il faut le lui imposer, comme il faut lui imposer par tous les moyens le cessez-le-feu, y compris par des sanctions. Et en tout premier lieu, cesser de vendre des armes à Israël !
Le Bureau national de l’AFPS
Le 26 janvier 2024
Photo : La Cour Internationale de Justice lors des plaidoiries des 11 et 12 janvier 2024. Crédit : Times Of Gaza