Photo : Aqil Awawdeh. Réseaux sociaux.
La colère s’est répandue dans les territoires palestiniens occupés à la suite de l’arrestation d’un éminent journaliste par les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne.
La famille d’Aqil Awawdeh a déclaré que les forces du service de sécurité préventive palestinien ont fait une descente sur son lieu de travail à Ramallah jeudi après-midi, l’ont arrêté et l’ont transféré vers une destination inconnue.
L’arrestation a eu lieu après qu’il a publié une courte vidéo contestant une affirmation du porte-parole des services de sécurité palestiniens selon laquelle il n’y avait pas de détenus politiques dans leurs prisons.
Quelques heures après son arrestation, le groupe Avocats pour la justice a annoncé que la détention de M. Awawdeh avait été prolongée jusqu’à dimanche.
Le chef du groupe, l’avocat Muhannad Karaja, a déclaré à Middle East Eye qu’il avait pu rendre visite à Awawdeh pendant quelques minutes afin d’obtenir son accord pour désigner un avocat de la défense qui suivrait les procédures judiciaires.
Selon M. Karaja, le journaliste est détenu par le ministère public pour "incitation au conflit racial" sur la base de messages sur les médias sociaux attribués à M. Awawdeh.
"Une séance d’enquête sera tenue le concernant dimanche, et il est possible qu’il soit libéré par le ministère public, ou qu’il soit renvoyé au tribunal pour prolonger sa détention, ou qu’un acte d’accusation soit lu", a-t-il ajouté.
Le groupe a condamné l’arrestation des militants, ainsi que la loi sur la cybercriminalité de l’Autorité palestinienne qui, selon lui, a légalisé la répression des libertés publiques et des droits constitutionnels.
Selon le groupe, cette loi viole la loi fondamentale palestinienne et les normes internationales en matière de droits de l’Homme, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
La loi sur la cybercriminalité a été adoptée en 2017 avec l’approbation du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Malgré les objections des institutions de la société civile, en particulier des groupes de défense des droits de l’Homme, la loi est toujours en vigueur.
A la suite de cette loi, des dizaines de Palestiniens ont été arrêtés et des actes d’accusation ont été émis.
Des dizaines de détenus
La question de la détention politique est un point sensible pour de nombreux Palestiniens, au même titre que la critique générale des services de sécurité palestiniens en Cisjordanie occupée.
Asmaa Harish, journaliste et militante des droits de l’Homme, a déclaré que 40 personnes étaient détenues par les services de sécurité palestiniens pour des motifs politiques.
Elle a ajouté que plus de 300 cas d’arrestations politiques avaient été enregistrés depuis le début de l’année 2023 en Cisjordanie occupée, y compris des étudiants à l’université, des journalistes et des activistes.
"Les journalistes, en particulier, ont fait l’objet depuis le début de l’année de nombreuses arrestations et de harcèlement, y compris de campagnes de diffamation et d’incitation par les services de sécurité, en plus de menaces constantes d’arrestation et de suspension de leur travail" a expliqué Mme Harish.
Selon elle, les affirmations selon lesquelles il n’y a pas de détenus politiques témoignent d’un "manque de respect de l’intelligence des Palestiniens" qui constatent quotidiennement l’ampleur des violations de leur liberté d’exprimer leur opinion.
"Par exemple, la campagne d’incitation contre Al Jazeera International Media Network fait partie de ce à quoi les journalistes de l’Autorité palestinienne sont exposés, ainsi que de nombreux réseaux d’information."
Le Syndicat des journalistes palestiniens a condamné l’arrestation de M. Awawdeh et exigé sa libération immédiate, affirmant que son arrestation constituait une violation flagrante de la liberté d’opinion et du droit de l’exprimer.
"Le moment choisi pour l’arrestation, jeudi soir [à] la veille du week-end, qui se prolonge jusqu’à dimanche matin, vise à empêcher sa libération rapide" a déclaré le groupe dans un communiqué.
Les services de sécurité palestiniens détiennent depuis plus d’un mois un certain nombre d’étudiants de l’université de Birzeit, dont le chef du conseil étudiant, Abdul Majeed Hasan. Leur détention a été prolongée à plusieurs reprises après leur participation aux élections étudiantes en mai.
L’avocat Mustafa Shatat a déclaré que les étudiants avaient été torturés lors de leur arrestation et que, lors de leur dernière séance au tribunal, l’un d’entre eux, Yehia Farah, avait crié : "Sortez-moi d’ici, je veux rentrer chez moi."
Samedi matin, des sources locales ont annoncé que les services de sécurité palestiniens avaient également arrêté six étudiants de l’université nationale Al-Najah de Naplouse, en raison de leur participation à l’organisation d’une cérémonie de remise des diplômes organisée par le Bloc islamique il y a quelques jours.
Traduction : AFPS