Quelles seront les principaux enjeux une fois que le retrait de Gaza sera effectué ?
H B :
Tout dépend de la continuité du désengagement. Les frontières, l’aéroport et le port constituent les véritables enjeux de l’après-retrait. Israël conserve pour l’instant la main mise sur ces espaces stratégiques. A mon sens, Gaza reste sous occupation car l’armée l’entoure et il n’y a pas de continuité avec la Cisjordanie.
Le retrait est significatif mais pour autant Gaza ne représente que 5 % des territoires palestiniens. Ariel Sharon n’a pas vraiment fait un cadeau car Israël a toujours voulu se débarrasser de Gaza qui ne possède pas de réel intérêt stratégique : il n’y a pas d’eau, la démographie y est élevée.
L’enjeu se situe aussi au niveau de la Cisjordanie. Shaul Mofaz, ministre israélien de la Défense, a annoncé qu’Israël allait conserver les six blocs de colonies en Cisjordanie et que la construction du mur de séparation continuerait. L’ONU a pourtant voté une résolution contre ce mur. Cette politique reste en dehors de toute légalité.
La communauté internationale aura son rôle à jouer pour faire pression sur Israël en vue de l’application de la Feuille de route et des résolutions de l’ONU.
L’Autorité palestinienne a-t-elle les moyens de contrôler la Bande de Gaza, malgré les dissensions qui existent, notamment au sein du Fatah ?
HB :
La Bande de Gaza était jusqu’à présent coupée en trois. L’Autorité palestinienne s’exercera mieux une fois que les colons et les soldats seront partis.
Gardons à l’esprit que tout est lié. Il n’y a pas un peuple à Gaza, un autre à Naplouse et encore à autre à Hébron ou à Jénine. Le ministre français des Affaires étrangères a résumé la situation en soulignant que si le retrait n’était pas lié au sort de la Feuille de route, il ne représenterait rien.
Mahmoud Abbas maintient une position claire et nette. Il a réussi à obtenir une trêve des attaques, pas d’opérations militaires ni d’attentat suicide de la part des différentes factions palestiniennes. Pour que cela continue dans l’avenir, il est nécessaire qu’un processus politique entier soit initié et respecté par les Israéliens.
La paix va dans les deux sens, elle n’est pas réalisable si Israël maintient une politique de colonisation.
Le retrait de Gaza est-il en mesure de débloquer la situation actuelle et de créer un climat de négociations ?
HB :
Il faut absolument souligner l’avancée que constitue le retrait. Il met fin à 38 ans d’occupation pendant lesquels la population a souffert. Des femmes ont accouché sur des barrages, des blessés n’ont pas pu les passer et des hommes y ont été tués.
La fin de cette présence offre des perspectives de développement et de reprise économique. Elle est susceptible de favoriser les négociations mais les responsables palestiniens ont fait part de leurs inquiétudes. Le retrait va-t-il servir à un renforcement des colonies cisjordaniennes ?
Il existe aussi des menaces de certains groupes extrémistes israéliens qui veulent qu’Israël détruise la Mosquée d’Al Aqsa, troisième lieu saint de l’islam.
En définitive, nous avons l’impression qu’Ariel Sharon cherche à tromper le monde, grâce aux images du retrait, pour continuer sa politique sur les autres points. Ce retrait est une mise en scène, il apparaît comme une opération médiatique.